Caïd saison 1 (2021)

Il y a 4 ans, Ange Basterga et Nicolas Lopez présentaient leur premier long métrage au Festival du Polar de Cognac, et en sont repartis avec le Grand Prix! Une sacrée réussite pour un coup d’essai, mais la suite sera moins heureuse, car le film ne parvenant pas à trouver de diffuseur, l’oeuvre n’atteindra jamais les salles de cinéma. Basterga et Lopez ne travaillaient avec aucun producteur, les 70 000 euros de budget étant auto-financés. L’aventure aurait très bien pu s’arrêter dans cette impasse… Mais Frenchkiss Pictures et Netflix s’intéressent à ce polar tourné en seulement 4 jours, et optent pour une refonte du scénario dans un format sériel. Nicolas Peufaillit, auteur sur Un Prophète, La Horde ou Goal of the Dead, est appelé pour retravailler le script originel avec Basterga et Lopez, afin d’insuffler un rythme encore plus vif et un découpage en 10 épisodes, aux durées variant de 8 à 16 minutes.

Ange Basterga et Nicolas Lopez ont repris les mêmes acteurs principaux que sur le film, et ont eu 24 jours de tournage (6 fois plus que sur l’oeuvre initiale!) du côté de Martigues et Port-de-Bouc, et le résultat est une immersion totale en terrain inconnu pour un jeune réalisateur de clip et son caméraman! Franck et Thomas se rendent dans un quartier de banlieue afin de rencontrer Tony, future star du rap pour laquelle ils doivent tourner un clip. Mais dans ce quartier où les flics ne sont pas les bienvenus, la situation va très rapidement s’échauffer, et Franck et Thomas vont se retrouver pris en plein milieu d’une situation très explosive!!! Il y a 2 ans (novembre 2019), on découvrait l’excellent Les Misérables de Ladj Ly, plongée sans concession dans le quotidien d’une brigade de la BAC. Avec Caïd, on a un autre regard sur l’enfer du décor, et le traitement choisi par Basterga et Lopez s’avère d’une force imparable. Tout est filmé en point de vue réel, avec caméra à l’épaule et GoPro, Franck décidant comme il peut de ce qu’il va filmer. On est donc dans un croisement très intelligent entre Les Misérables et [REC], et franchement, même sans zombies, il y a de quoi vraiment flipper…

Avec ce format sériel aux durées très courtes, il n’y a pas de temps à perdre, et Basterga et Lopez vont droit à l’essentiel. Le premier épisode va donc nous propulser dans le grand bain de manière ultra frontale, et l’arrivée de Franck et Thomas dans cette cité fait déjà bien tourner le palpitant. Sans crier gare, on se retrouve en terrain miné, et ce qui apparaissait comme une mission de routine pour tourner un simple clip va revêtir des atours bien plus tendus! Sébastien Houbani est très crédible dans le rôle de ce réalisateur rapidement perdu et pris par l’angoisse, et même si on le voit beaucoup moins, Julien Meurice laisse aussi transparaître avec beaucoup de réalisme la peur du cadreur Thomas!

Il faut dire qu’ils ont face à eux une belle brochette de personnages, à commencer par le fameux Tony (on pense forcément à Montana!), tout juste sorti de prison et qui compte bien réussir dans le rap. Avec ses petites lunettes de vue et son sourire, on le croirait plutôt cool et détendu, mais l’acteur Abderamane Diakhite va rapidement nous faire comprendre qu’il faut se méfier des apparences. S’il a des rêves de gloire plus vastes que dans sa cité, Tony est avant tout le caïd local, et doit continuer à gérer son business très lucratif alors qu’un concurrent entend bien le dépouiller… Tony va donc devoir faire preuve de fermeté et va s’avérer bien moins tendre que ce que l’on aurait pu penser au départ… Abderamane Diakhite joue avec subtilité sur cette ambivalence de caractère, qui n’est pas véritablement un choix, mais une nécessité pour ne pas se faire bouffer…

Aux côtés de Tony, on a Moussa, qui est à la fois proche comme un frère et qui est une sorte de lieutenant chargé de vérifier le bon déroulement des opérations. L’acteur Mohamed Boudouh s’avère vraiment excellent et parvient à créer des moments de pure tension, Moussa étant constamment sur la brèche et perpétuellement parano. Il faut dire qu’il sait comment analyser les situations, et qu’il a du mal à faire confiance, donc quand il voit débarquer 2 gus avec des caméras, il sent que ça va leur apporter plus d’emmerdes qu’autre chose, et il va bien l’expliquer à Franck et Thomas… Et que dire d’Idir Azougli, qui joue Steve? Ce personnage est complètement givré, et on se demande s’il ne se rend jamais compte à quel point il joue avec sa vie, ou s’il en a juste une paire incroyablement énorme??? La prestation de l’acteur est franchement impressionnante aussi, car il parvient à générer une tension des plus explosives alors que son personnage semble de prime abord juste un peu à l’ouest! Mais là encore, il y a une stratégie derrière, et il compte bien prendre la place de son rival Tony…

Franck et Thomas vont donc se retrouver pris dans une guerre des gangs sans la moindre possibilité de s’enfuir de cette cité. En l’espace de 10 épisodes, on va se rendre compte à quel point le souffle va nous manquer suivant les séquences, et on ne va vraiment pas se sentir bien tout le long de ces courts instantanés d’une banlieue sous pression. Franck et Thomas ne vont avoir aucune marge de manoeuvre, et vont être obligés de suivre les directives de Tony. Ils ne peuvent pas rentrer chez eux le soir puisqu’on leur a confisqué leur voiture et leurs passeports, et ils se retrouvent en immersion totale dans un univers clos dont ils ne possèdent pas les codes! C’est angoissant dès le départ, et pourtant, ça ne va faire qu’augmenter au gré des épisodes… Basterga et Lopez investissent le genre avec une énergie et une radicalité impressionnantes, et cette série Caïd s’avère être réellement ravageuse! Les 2 metteurs en scène savent exactement comment doser leurs impacts au maximum, et ne s’arrêtent pas seulement à l’action même, puisqu’ils vont offrir des contrepoints psychologiques très intéressants. La comparaison entre les vies de Tony et de Franck pourrait paraître banale, mais elle souligne en fait de manière importante les points de vue faussés que l’on a lorsqu’on ne connaît pas le monde de l’autre. Et surtout, si cela n’excuse pas Tony pour ses actes, ça a le mérite de démontrer que la marge de manoeuvre n’est pas toujours aussi franche qu’on veut bien le penser…

Caïd se regarde avec une vraie angoisse et une réelle boule au ventre, mais qu’est-ce que c’est bon de ressentir une telle vitalité dans une production française! Le tournage en prises de vue réelles apporte une authenticité incroyable et un caractère viscéral à cette histoire, qui est avant tout celle d’une survie en territoire hostile, tout simplement! Nerveuse, fiévreuse et authentique, Caïd a tous les atouts pour marquer durablement les esprits, et est une réussite tant sur le point formel que narratif, de laquelle on ne peut sortir que très secoué…

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Police Fédérale, Los Angeles (William Friedkin, 1985)

Police fédérale Los Angeles, affiche

En 1985, William Friedkin est un metteur en scène reconnu, nous ayant livré French Connection (1971), L’Exorciste (1973), Le Convoi de la Peur (1977), Cruising – la Chasse (1980)… Il fait partie de cette génération d’auteurs à la vision très frontale et aux oeuvres âpres, tels Peter YatesMichael Cimino, Sam Peckinpah, Paul Schrader… Des réalisateurs qui sont parvenus à livrer leurs oeuvres les plus emblématiques durant les années 70 et 80, avec toujours en filigrane cette fin de l’innocence post-JFK. En 1985, Friedkin poursuit donc son exploration sociétale en nous plongeant dans un genre qu’il affectionne particulièrement, le film policier. Police Fédérale, Los Angeles (To live and die in L.A. en version originale) est une sorte d’instantané sur le quotidien d’un jeune flic, mais aussi sur la lente décadence des mégapoles. Friedkin va irrémédiablement lier Richard Chance, fougueux et opiniâtre agent des services secrets, à la ville dont il compte bien assurer la sécurité.

Depuis des mois, Chance et son partenaire Jim Hart enquêtent sur un faux-monnayeur dont ils remontent peu à peu la piste, et qu’ils espèrent enfin parvenir à prendre en flagrant délit. Mais la mission tourne mal, et Chance va devenir de plus en plus obsédé par la traque du criminel. C’est William Petersen qui incarne Chance, et il apporte toute sa vivacité et sa grande gueule au flic sanguin, lui qui est connu pour avoir incarné Grissom dans 196 épisodes des Experts! A l’époque, il n’avait alors joué que dans Le Solitaire de Michael Mann, et ce rôle de Chance est son 2ème film (qui se trouve être produit par Mann)! On le sent très à l’aise dans ce polar urbain, et il parvient à donner une belle complexité à son personnage. Face à lui, on a un Willem Dafoe tout jeune aussi, qui en est juste à son 7ème rôle dans un film! Il incarne le faux-monnayeur Eric Masters, et lui confère une âme d’artiste et un goût prononcé pour la violence, créant un personnage ambivalent et d’une certaine manière fascinant! Dafoe est sans conteste l’un des plus grands acteurs de sa génération, et c’est un réel plaisir de suivre sa performance chez Friedkin!

Police Fédérale, Los Angeles commence presque comme un documentaire, avec une vision très réaliste et ultra-détaillée sur la fabrication de faux billets. On suit Eric Masters dans l’accomplissement de son travail, étape par étape, et on se rend compte du boulot fastidieux que cela représente! Cette vision terre-à-terre offre un contrepoint artistique, car celui qui peint à ses heures perdues est véritablement un artiste dans sa fabrication de billets. En s’attachant à nous dévoiler le long processus, Friedkin nous place aux côtés de Masters pour qui il s’agit d’un boulot comme un autre, et ce choix narratif vient appuyer une vision « banalisée » du travail de faussaire, dans le sens qu’il gangrène de manière relativement facile la ville de Los Angeles. Il y a un côté anti-spectaculaire qui fait que l’on va plonger au coeur du trafic aux côtés de protagonistes tout ce qu’il y a de plus humain, avec ce que cela comporte comme héroïsme et comme failles profondes. C’est ce fort réalisme qui donne sa force à Police Fédérale, Los Angeles, et qui en fait un représentant important du polar 80’s.

Si on a vu French Connection ou Le Convoi de la Peur, on se retrouve en terrain connu et on apprécie la continuité de cette oeuvre dans la filmo de Friedkin. Il se plaît à recréer le plus fidèlement possible la réalité de la vie urbaine de son époque, et on va arpenter les rues et les autoroutes aux côtés de Chance et de son équipier, lors de séquences se permettant même parfois de se passer entièrement de musique, pour renforcer encore l’aspect réaliste des événements en train de se dérouler. On sent un questionnement perpétuel sur l’âme de la ville, à l’instar d’un Michael Wadleigh avec son envoûtant Wolfen en 1981. C’est dans cette recherche d’une identité profonde issue de cette jungle bétonnée que réside une autre grande partie de la force de ce film, et on va arpenter les trottoirs et l’asphalte en ressentant à chaque instant la connexion liant Chance à Los Angeles. Et c’est cette connexion même qui va le pousser à franchir les limites de la loi, et à dangereusement basculer, au risque d’entraîner d’autres personnes avec lui dans sa quête vengeresse…

La relation qu’il a avec son indic Ruth démontre déjà une prise de pouvoir machiste, et celui qui apparaissait au préalable comme une grande gueule sympathique commence dès lors à dévoiler des travers plus discutables… L’actrice Darlene Fluegel confère à Ruth une très belle fragilité, à laquelle elle doit constamment offrir un contrepoids. Elle se sert de ses informations pour tenter d’amadouer Chance, et sous le couvert d’être une simple indic, elle aimerait pourtant représenter bien plus à ses yeux. La carrière de Darlene Fluegel n’est pas très étoffée, mais elle a participé à des films importants sur plusieurs décennies, comme Les Yeux de Laura Mars, Il était une Fois en Amérique, Haute Sécurité ou Simetierre 2. On retrouve également John Turturro, qui aura joué dans tellement de films dans sa carrière!!! Ce bon vieux Steve James également, ou encore un certain Robert Downey Sr., qui n’est autre que le père de Jr., oui ^^

Police Fédérale, Los Angeles développe encore un rythme très 70’s dans sa narration, qui n’est pas une succession de course-poursuites mais qui oscille avec intelligence entre séquences de dialogues tendues et filatures. La longue scène de poursuite automobile vers la fin du film est vraiment prenante, et on sent le lien spirituel avec French Connection ou Bullitt. La partie à contresens sur l’autoroute est assez dingue, et a dû être un calvaire à tourner! Il a fallu 6 semaines pour filmer toute cette poursuite, et Friedkin avait décidé qu’il s’agirait de la dernière séquence à réaliser. Au cas où un accident arriverait à un des acteurs, le reste des scènes serait déjà dans la boîte… Et pour l’anecdote, il s’agit de la toute première fois où on assiste au cinéma à une poursuite à contre-sens sur une autoroute! Cette scène fait bien monter le palpitant, et on saluera le travail exemplaire de Buddy Joe Hooker et de son équipe de cascadeurs! L’homme est un vétéran chevronné dans sa discipline, et a participé à plus de 200 oeuvres, du Survivant de Boris Sagal en 1971 à Fast & furious 8 en 2017, en passant par Le Jeu de la Mort, Prophecy – le Monstre, L’Emprise, Rambo, L’Etoffe des Héros, L’Arme fatale 2 et tellement d’autres!!!

Ce film de Friedkin fait encore partie de la belle époque, et on ne penserait jamais qu’il puisse un jour nous livrer un truc aussi immonde que son dernier The Devil and Father Amorth

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Les news de la semaine : Fous ta cagoule!

Maintenant que WandaVision est enfin terminée, la suite des opérations du Marvel Cinematic Universe ne tardera pas à se poursuivre, puisque Le Faucon et le Soldat de l’Hiver débarque dès ce 19 mars! L’occasion de partager quelques poster-personnages nous présentant évidemment les 2 rôles-titres, mais également Sharon Carter, interprétée par Emily VanCamp, ainsi que le fameux Zemo. L’acteur germano-espagnol Daniel Brühl a enfin décidé d’enfiler la cagoule emblématique du Baron Zemo, et on espère qu’il conférera à son personnage toute la folie destructrice qu’on lui connaît!

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La Ferme de la Terreur (Wes Craven, 1981)

En 1981, le metteur en scène Wes Craven n’est pas encore connu du grand public, son succès Les Griffes de la Nuit n’ayant lieu qu’en 1984. Mais il possède une réputation d’artisan chevronné dans une veine trash assumée, avec les surévalués La dernière Maison sur la Gauche et La Colline a des Yeux. La Ferme de la Terreur est son 4ème long métrage, et va s’avérer être un formidable terrain d’expérimentation pour le jeune réalisateur, dont on ressent une myriade d’influence dans ce récit hautement maîtrisé.

Jim et Martha vivent dans une ferme isolée, avec pour voisins des Hittites, nom fictif désignant une communauté obéissant à des traditions similaires à celles des Amish. Le patriarche Isaiah est totalement opposé au progrès, et voit d’un très mauvais oeil ce jeune Jim cultivant sa terre avec un tracteur. On se retrouve rapidement plongé dans des tensions entre les 2 modes de vie, et ce choc des cultures s’avère bien plus intéressant que dans Witness : Témoin sous Surveillance par exemple. Glen M. Benest, Matthew Barr et Craven rédigent un scénario qui sous couvert de série B horrifique, va développer une trame démontrant les incompréhensions totales entre les 2 communautés, ce qui enrichit considérablement le récit. Ernest Borgnine est très inquiétant dans le rôle d’Isaiah, le patriarche des Hittites, et il gère sa famille d’une main de fer.

On retrouve dans ce film une figure emblématique des productions horrifiques 80’s, avec la présence du très reconnaissable Michael Berryman, déjà présent chez Craven en 1977 dans La Colline a des Yeux dans le rôle culte de Pluto. Avec son physique atypique, il devient rapidement un acteur incontournable des séries B dans les années 80 et 90, son visage lui permettant d’endosser plein de rôles de maniaques et autres bad guys. Berryman est né avec le syndrome de Christ-Siemens-Touraine, qui fait qu’il n’a pas développé de système pileux, qu’il n’a pas d’ongles et qu’il a une absence de sensibilité dans certains nerfs. Suite à une opération du crâne, celui-ci possède désormais une forme légèrement plus allongée que la normale. Avec un tel visage, il est clairement destiné à alimenter les cauchemars en VHS de nombreux spectateurs… Dans La Ferme de la Terreur, il incarne un membre de la communauté Hittite un peu simplet, mais qui n’hésite pas à poursuivre une jeune femme dont il estime qu’elle ne respecte pas les codes demandés par Dieu. Il offre un contre-point tragique aux moeurs drastiques de sa communauté, et ça fait toujours plaisir de le croiser dans une production!

Dans un autre style, on a un choix de casting étonnant avec la présence de Douglas Barr, l’éternel Howie, faire-valoir de Colt Seavers dans L’Homme qui tombe à pic! Il campe un homme qui a davantage la tête sur les épaules, et c’est assez drôle de le voir dans un tel contre-emploi! Sinon, on a une jeune actrice qui entame à peine sa carrière et qui en est à son 3ème film, une certaine Sharon Stone! La future star de Basic Instinct n’en est qu’à ses premiers pas dans l’industrie cinématographique, et joue le rôle d’une des amies du personnage principal Martha. Quand à l’actrice qui interprète Martha, Maren Jensen, elle n’aura participé qu’à 3 films, et celui-ci est le dernier!

Si La Ferme de la Terreur est considéré comme un film mineur de son auteur, il recèle pourtant une inventivité et des expérimentations graphiques qui en font une oeuvre forte de Wes Craven. On sent une nette influence héritée de John Carpenter, avec ces plans en caméra subjective d’un mystérieux intrus renvoyant à La Nuit des Masques (mais après tout, quel metteur en scène 80’s n’a pas été influencé par Carpenter???), et Craven parvient à se réapproprier le concept en créant une tension perceptible. On a également quelques soupçons hitchcockiens insérés dans l’intrigue, quelques envolées giallesques qui fonctionnent très bien, et ce mélange d’influences s’avère hautement réussi! On aurait en effet pu facilement tomber dans la surenchère ou dans l’élaboration automatique de séquences diverses, mais il y a une atmosphère crédible et solide unifiant l’ensemble, et qui fait que l’on est pris dans les tourments de ces jeunes femmes de plus en plus paniquées.

Et que dire de la séquence de la baignoire, qui préfigure la mythique scène des Griffes de la Nuit? Un serpent remplace la main du pervers griffu, mais l’effet est tout aussi saisissant, et on apprécie le mélange de sensualité et d’horreur se dégageant de cette scène. Placer la caméra entre les jambes de l’actrice principale donne une vision très forte et presque viscérale, et on ne peut qu’angoisser avec elle lorsque le corps étranger vient dangereusement se rapprocher de son intimité… Wes Craven traite son personnage féminin avec une grâce horrifique très symbolique, et c’est en cela qu’il parvient à créer des séquences de cet impact.

L’aspect fantastique fonctionne très bien, avec cette mystérieuse présence rôdant dans les environs, et on pourrait même penser que cela ait pu fournir quelques inspirations à M. Night Shyamalan pour son Signes! La manière dont Craven filme les immensités extérieures, sa façon de jouer sur la dualité entre l’habitation qui protège et l’extérieur sombre et dangereux, renvoie également d’une certaine manière aux contes anciens avec toutes les implications inconscientes qui y sont glissées. Le mal insidieux y est toujours représenté sous forme monstrueuse, mais ne fait que masquer la monstruosité se tapissant dans l’esprit humain… Et comme dans de très nombreux films horrifique, l’élément sexuel y est également traité, avec ici une approche en plus culturelle, puisque pour les Hittites rien que le fait de se balader en short relève du péché. On comprend dès lors les frustrations de certains membres de la communauté, et cette thématique triviale est donc renforcée par la culpabilisation religieuse. On peut donc aisément comprendre l’attraction que peut ressentir le personnage de John pour la délurée Vicky, alors que la vie qui lui est promise ne possède pas la moindre once d’originalité. Face à ce carcan familial et théologique, le jeune homme est tiraillé entre ses envies, ses pulsions et sa fidélité, et Wes Craven traite avec beaucoup de sensibilité cette problématique.

La Ferme de la Terreur est davantage un thriller qu’un réel film d’horreur, mais il est également un instantané social très frontal et dramatique, permettant ainsi d’offrir des problématiques bien réelles à ses personnages. Une oeuvre oubliée de Craven, qui mérite d’être exhumée!

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Le clip de la semaine : Aesop Rock – Drums on the Wheel

Ca faisait longtemps que je ne vous avais pas parlé d’Aesop Rock, non? Ce cher Ian Matthias Bavitz a sorti 2 albums l’an dernier, et ce Drums on the Wheel nous provient de l’un d’entre eux, intitulé Freedom Finger (Music from the Game). On retrouve son flow unique et son timbre sans pareil, et c’est toujours un plaisir de suivre son travail!

 

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