Longmire saison 1 (John Coveny, Hunt Baldwin, 2012)

A l’opposé des séries aux aspects poseurs qui pullulent outre-Atlantique, Longmire est une immense bouffée d’air frais dans le domaine policier. Pas de gadgets high-tech, pas de flic roublard, pas de labos aseptisés où on analyse l’ADN au microscope avec une musique tendance faisant ressembler le tout à un clip… Longmire, c’est le shérif local bourru et secret, flanqué de ses adjoints aussi humains qu’attachants, qui vont prendre en charge des histoires variées semant le trouble dans la paisible communauté d’Absaroka.

Mise en scène très soignée, compo musicales envoûtantes et utilisée à bon escient, personnages creusés sans pour autant révéler tous leurs mystères, Longmire est assurément l’excellente surprise de la chaîne A&E! Menée par un acteur australien jusque-là inconnu, elle révèle tout le talent de Robert Taylor qui fait du personnage de Walt Longmire un compromis très subtil entre le vieux baroudeur inflexible et l’homme en proie à une profonde tristesse. Walt Longmire est le shérif du comté (fictif) d’Absaroka, situé dans le Wyoming. Veuf depuis 1 an, il tente de reprendre le cours de sa vie tant d’un point de vue personnel que professionnel, entre une fille qui aimerait le voir plus souvent et une future élection pour le poste de shérif.

Walt Longmire est le total opposé du flic typique des Experts, et c’est dans son réalisme et sa fragilité qu’il apparaît résolument captivant. Sa détermination à contrôler son comté est d’une simplicité renvoyant à un certain code de l’honneur hérité du far-west, et l’application avec laquelle il fait régner l’ordre lui vaut la confiance des habitants. Les détails concernant ce personnage, comme son besoin de ramasser les déchets qui traînent sur le bord de la route, construisent un personnage ancré dans des convictions que l’on pourrait qualifier de naïves mais qui le rendent attachant. Walt fait partie de cette vieille école vouée à disparaître, tel le vestige d’une époque où les cowboys faisaient la loi. Evidemment, il n’est pas toujours aisé pour ses adjoints de comprendre son mode de fonctionnement, et ces aspects constituent également une partie du très grand intérêt que suscite cette série.

On retrouve avec plaisir Katee Sackhoff dans le rôle de l’adjointe Victoria Moretti, et elle est tout simplement excellente dans la peau de cette flic récemment arrivée qui tente de s’intégrer à l’ambiance locale. Son caractère trempé cache quelques failles que l’on va approfondir au fil des épisodes, et sa relation avec Walt prend des airs de rapport père-fille protecteurs et touchants. C’est un vrai plaisir de retrouver Lou Diamond Phillips, second rôle emblématique des années 80 et 90 (Young Guns, Flic et Rebelle, Le Vent sombre…), dans le rôle d’Henry, le patron de bar et meilleur ami de Walt. L’acteur philippin a très souvent joué des rôles d’Indiens, et ne déroge pas à la règle ici. Son personnage d’Henry Standing Bear possède à la fois un sens de l’humour teinté d’un certain cynisme ainsi qu’une vision très profonde de la vie, comme il se doit pour un Indien d’un certain âge! Les dialogues échangés avec Walt comportent quelques moments bien sentis permettant de mesurer à la fois le respect entre les 2 hommes et les disparités entre leurs 2 peuples. On retrouve aussi avec plaisir Peter Weller, qui ne se contente pas de jouer dans un épisode, mais qui le met également en scène! Son personnage de vieux briscard est un régal, et sa relation avec Longmire est un très bon moment du show!

En prenant place au Wyoming, les créateurs de la série John Coveny et Hunt Baldwin laissent une belle place à l’aspect social et politique consacré aux Cheyennes vivant dans la réserve du comté. En se basant sur la série de bouquins de Craig Johnson, les récits développent une atmosphère où la nature et l’homme coexistent de manière bien plus prégnante que dans une grande ville, et les Cheyennes représentent une certaine vision de l’Amérique qui n’est pas forcément la plus plaisante. La coexistence pacifique s’avère tendue, et la lutte entre le shérif Longmire et l’officier indien de la réserve Mathias se règle parfois de manière violente. Entre les trafics de drogue, les meurtres, la prostitution et les viols, le paisible comté d’Absaroka ne s’avère finalement pas si tranquille, Walt et ses adjoints étant constamment sur la brèche.

Il y a une réelle force évocatrice dans cette série, qui prend les approches modernes à revers pour créer une atmosphère très prenante et très riche. La nature est constamment présente, et les changements climatiques apportent leur propre charge émotive, appuyant la puissance des histoires développées. Les plaines désertiques, les sommets enneigées, les forêts impénétrables sont autant d’éléments primordiaux dans le développement du récit, car ils composent à la fois les lieux où se déroulent les crimes, mais créent en même temps l’ambiance si particulière du show. Walt Longmire est un pur produit du Wyoming, tentant de redonner un sens à son existence, se rattachant à des détails paraissant anodins, mais finalement chargé de beaucoup de sens. Construite sur des bases vraiment solides, cette série promène ses personnages dans un climat de toute beauté, les faisant interagir afin d’élucider la nature humaine à travers des enquêtes savamment ficelées. Une vraie bonne surprise, qui donne quelques pistes pour la suite en ayant l’intelligence de garder certains secrets au chaud, ce qui donne encore plus envie de replonger dans cette Amérique profonde d’une très grande richesse!

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