Wolf Man (Leigh Whannell, 2025)

Wolf man (2025) - IMDb

Je n’ai pas vu son Insidious : Chapitre 3, mais j’ai grandement apprécié ses Upgrade et Invisible Man, ce qui m’a convaincu d’aller voir le dernier effort de Leigh Whannell en salle malgré les critiques majoritairement négatives. Et je me félicite de cette décision, ayant assisté à un excellent film de genre qui offre un regard très intéressant sur le mythe du loup-garou.

Blumhouse's Wolf Man Sets the Stage for 2025's Must-See Horror - Trailer -  Nerdtropolis

Leigh Whannell possède cette capacité fondamentale à donner corps à des récits intimistes là où on s’attendrait à des débauches d’action, et il applique donc une recette similaire à celle utilisée sur Invisible Man, sans pour autant ressasser les mêmes thématiques. Là où Elisabeth Moss combattait un ennemi implacable dans un registre metoo très bien articulé, Wolf Man va se concentrer sur la cellule familiale primordiale à laquelle appartiennent Blake, Charlotte et Ginger. On va se familiariser avec cette petite famille de manière très touchante, leurs relations étant rédigées avec beaucoup de sensibilité et un zeste d’humour. Il faut croire que Leigh Whannell, en écrivant avec son épouse Corbett Tuck, a puisé dans leur propre vie familiale, puisqu’ils partagent leur existence avec 3 enfants. L’actrice qui jouait dans Insidious et Insidious : Chapitre 3 apporte clairement une belle sensibilité au récit, qui va logiquement gagner en intensité avec la proximité que l’on a avec les personnages. Parallèlement à leur amour pour la petite Ginger, on sent que Blake et Charlotte ont quelques difficultés à trouver un équilibre entre eux, et le dialogue qu’ils ont pour se dire les choses s’avère très réaliste et très beau.

15/01/2025 – Vieille Carne

Mais on n’en oublie pas pour autant d’aller puiser dans le film de genre, et l’introduction du film est là pour nous rappeler à quel point Leigh Whannell est un superbe conteur horrifique. Sa façon de nous plonger dans ce récit macabre lui permettrait de se placer en priorité au coin du feu pour nous faire flipper ^^ Il maîtrise parfaitement la grammaire cinématographique horrifique, et l’évocation primordiale du Mal rôdant dans ces forêts perdues de l’Oregon possède une sorte de classicisme savoureux mêlé à une modernité bienvenue dans le rythme. Ca n’a jamais paru aussi simple de faire monter le stress, et Whannell gère sa partition de main de maître.

Le réalisateur de Wolf Man prévient : la conception du monstre pourrait ne  pas plaire à tout le monde, mais il y a une raison valable.

Le travail qu’il va effectuer sur le son va s’avérer très important pour l’immersion totale du spectateur, et il va prendre le temps de développer les capacités sensorielles du personnage qui va peu à peu se métamorphoser. Ca fait plaisir de voir un cinéaste qui aime prendre le temps de construire son film, et qui parvient à gérer les différentes phases de transformation de sa créature en devenir. La difficulté à communiquer qui va se mettre en place peut se lire à un autre niveau, et l’on a l’impression d’assister à l’acceptation de la maladie d’un de ses proches, avec la mort rôdant dans les parages. Les séquences tournantes de tentatives de dialogues sont excellentes, et outre l’aspect sonore, elles se développent également sur un niveau visuel tout aussi bien traité. A ma connaissance, on a rarement vu ce genre de procédé sur un film horrifique, et cela m’a fait penser à la vision spéciale acquise par Matt Murdock dans la saison 1 de Daredevil (procédé qui à ma grande incompréhension, n’a jamais été réutilisé dans les saisons suivantes).

Wolf Man : garou plutôt loupé [critique] | Premiere.fr

L’aisance avec laquelle Whannell traite son sujet fait que ce film n’offre aucun temps mort, et le mélange d’intimité et d’action s’avère très convaincant. Sa façon de jouer avec la menace est excellente, et on à le palpitant qui accélère régulièrement! Whannell sait exactement comment éclairer et filmer ses personnages, les faire se fondre dans les ombres inquiétantes et les voir apparaître avec leur potentiel létal. Je n’avais pas du tout reconnu Christopher Abbott, que j’ai pourtant vu très récemment au ciné, puisqu’il jouait l’Etranger dans le très bon (oui j’assume ^^) Kraven the Hunter. Il jouait également dans l’excellente saison 1 de The Sinner ou encore dans It Comes at Night. Il n’est pas un acteur très connu, mais sa prestation dans Wolf Man s’avère de plus en plus viscérale, aidée par des effets visuels assez bluffants. Il est capable de faire passer de belles émotions tout en sachant également se rendre très inquiétant. Julia Garner, la révélation de la série Ozark, s’avère très convaincante dans le rôle de cette mère dépassée par les événements, et Matilda Firth impressionne par la justesse de son jeu, alors qu’elle n’a que 10 ans!

Is Wolf Man 2025 a remake? Details explored

Wolf Man s’avère être une excellente production Blumhouse, grâce à un Leigh Whannell très inspiré capable de diriger efficacement ses acteurs qui de leur côté sont très motivés! On se retrouve donc dans un récit faussement classique, qui se permet de retravailler un mythe vieux comme le monde afin de le moderniser et d’offrir des strates de lecture différentes.

Wolf Man (2025) | MovieFreak.com

 

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Comme le Feu (Philippe Lesage, 2024)

COMME LE FEU - PHILIPPE LESAGE - Couleur Bulle

Philippe Lesage est un metteur en scène canadien ayant déjà à son actif 7 longs métrages dont il a assuré l’écriture et la réalisation. Je découvre ce cinéaste avec sa 7ème oeuvre, sortie l’an passée, qui sur une durée de 2h41, parvient à nous hypnostiser en nous racontant les affres des relations humaines.

Comme le feu»: le temps d'une chasse | Le Devoir

Un homme nommé Albert part vivre quelques jours dans un chalet en pleine nature canadienne avec sa fille Aliocha, son fils Max et un ami de son fils, Jeff. Ils rejoignent un ami du père, Blake, la collaboratrice (Millie) de cet ami, qui est un réalisateur de documentaires, et 2 autres collaborateurs de Blake. Entre sorties en pleine nature et soirées arrosées au chalet, les 8 individus vont vivre ensemble avec tout ce que cela implique en terme d’adaptation sociale, de non-dits et de tensions. On va rapidement glisser vers ce qui s’apparente à une étude anthropologique, et on comprend au vu de la filmographie de Philippe Lesage qu’il s’agit de l’un de ses sujets de prédilection. Mais là où l’on pourrait craindre une étude de moeurs trop bavarde et sans relief, il va nous immiscer d’une manière extrêmement sensitive dans les affres de cette sociabilisation plus ou moins forcée, et des frustrations et rancoeurs qui en découlent.

Comme le feu" : règlements de comptes entre amis dans un chalet isolé au  cœur des forêts profondes du Grand Nord canadien

Le plan ouvrant le film symbolise déjà ce trajet mental que vont effectuer les personnages, et indique que le réalisateur va prendre tout son temps afin de laisser les situations se développer et se charger peu à peu de tension. La manière dont il filme cette voiture emmenant les protagonistes vers leur destination est chargée de sens, tant d’un point de vue cinématographique que psychologique. Le premier plan se déroulant à l’intérieur de la voiture achève de démontrer la maîtrise fondamentale du réalisateur, qui sans que l’on voit au départ leurs visages, place déjà les enjeux entre 2 des personnages principaux. Philippe Lesage filme les détails corporels puis les regards fuyants pour nous faire comprendre les affres de Jeff alors qu’aucun mot n’a été échangé.

Comme le feu (2024) - Critique du film de Philippe Lesage

Si Lesage est capable de faire ressortir les émotions intérieures des personnages sans le moindre dialogue, il est tout autant capable de filmer une séquence de repas qui s’étire, et lors de laquelle les protagonistes discutent tranquillement avant de se focaliser sur un terme employé, que la personne visée va relever et qui va faire monter la tension d’un seul coup. On se retrouve dans une veine très naturaliste mais qui n’oublie pas d’être résolument cinématographique, comme dans une sorte de Festen mais qui serait bien plus entomologique. Philippe Lesage filme ces discussions autour de la table en choisissant parfois un simple plan fixe, mais en ayant opté pour l’angle le plus approprié; ou il se permet à d’autres moments des travellings qui vont le faire passer d’un protagoniste à l’autre, alors qu’une discussion va en supplanter une autre. Mais à chaque fois, il va suivre l’évolution de ce point de cristallisation de tension, et on va ressentir un malaise et une gêne lors de ces moments notamment où Albert et Blake règlent leurs comptes.

Comme le feu - Shellac

On va avoir des sensations encore plus viscérales lors de l’échappée de Jeff, qui ne sait tout simplement pas comment gérer ses émotions et ses frustrations. Sa communion forcée avec la nature possède quelque chose de résolument primal, lui qui s’est extrait pour un temps du groupe, et il se retrouve face à ses besoins vitaux que sont dormir et manger. Le basculement se fait à la fois très rapidement mais également assez naturellement, et une fois encore, sans qu’un seul mot soit prononcé. Philippe Lesage filme les tréfonds de l’âme avec une aisance confondante, et on pourrait rapprocher son acuité de celle du Denis Villeneuve de la période Polytechnique et Incendies. On ressent la culpabilité de Jeff, ainsi que son désespoir très prégnant.

Comme le feu Bande-annonce VF

On se retrouve totalement immergé dans ce film qui possède un pouvoir quasi-hypnotique, capable de mettre en place des situations évoluant de façon graduelle, mais également capable de finir une séquence de manière abrupte mais pourtant très maîtrisée. En ce sens, la musique de Cédric Dind-Lavoie occupe un rôle central dans cette oeuvre, même si elle n’est pas présente dans toutes les séquences. Le passage avec la balade en canoë possède une atmosphère impressionnante en combinant justement la mise en scène de Lesage et cette excellente musique. Le thème de la musicalité est important également lors de cette superbe séquence où l’on pense que la musique est extra-diégétique, mais sur laquelle Aliocha va poser sa voix avec une très belle douceur. On se rend alors compte à quel point Philippe Lesage est capable de générer de l’émotion à partir d’une matière totalement brute, sans la moindre parole ou la moindre musique, mais qu’il est également capable de se servir de ce qui est dit ou entendu pour sublimer l’instant.

Bande-annonce : Comme le feu, un film d'apprentissage en pleine nature  québécoise - Actualités - Cinoche.com

On pourrait rapprocher ce film d’une autre oeuvre canadienne récente, Jour de Chasse, qui baigne elle aussi dans une atmosphère faite de tensions et de non-dits. Philippe Lesage parvient à aller bien plus loin dans son étude des moeurs sans pourtant chercher à les disséquer, mais en restant un fin observateur des mouvements erratiques des corps et des âmes. On est dans l’incapacité de prédire les événements qui vont avoir lieu au gré de ces jours de vie commune, mais on sent dès le départ qu’il va se passer quelque chose. C’est dans ce jeu-là que le scénariste et metteur en scène va parvenir à nous guider à sa manière hypnotique, et même les moments festifs qu’il va décrire sont chargés de tensions. La séquence de la soirée où les personnages se mettent à danser semble tout droit sortie d’un film italien des années 70 ou 80, et on a notamment quelques réminiscences de La Maison au Fond du Parc de Ruggero Deodato.

Le 31 Juillet prochain sortira au cinéma le film “Comme le feu” avec Arieh  Worthalter, Noah Parker et Aurélia Arandi-Longpré. Découvrez la  bande-annonce. – Bienvenue sur le site de Médias Infos qui

Comme le Feu fait partie de ces films qui n’expliquent par leur déroulé, mais auquel le spectateur doit être attentif afin de percevoir ce qui se cache dans les non-dits et les allusions. En ce sens, il parvient à nous conter un récit nous renvoyant à nos propres frustrations, qu’elles soient sexuelles ou sociales, à nos propres culpabilités, et à nos propres peurs. Ce film impressionne par sa structure et par la qualité des acteurs, qui sont dirigés de main de maître par Philippe Lesage. Noah Parker est d’une justesse estomaquante dans sa gestion du personnage de Jeff, et Aurélia Arandi-Longpré excelle dans ce rôle d’Aliocha, qui oscille entre naïveté ethérée et séduction. Arieh Worthalter (Le Procès Goldman) est très bon dans le rôle de Blake, qui va souvent s’opposer à un Albert joué par un Paul Ahmarani impressionnant lui aussi. L’ensemble du casting s’avère très bon, avec quelques rôles en retrait, mais qui permettent de faire briller les autres.

Comme le Feu est une oeuvre totalement étrange et terriblement sensitive, qui si l’on accepte d’y plonger, va nous remuer durablement.

Philippe Lesage – « Comme le feu » | Culturopoing

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Artus-Jérémy Ferrari et Gaspard Proust

Sylvain, le serial killer - Les duos impossibles 8ème édition

Je ne connaissais pas ce sketch issu des Duos Impossibles, et qui voit Jérémy Ferrari donner la réplique à un Artus hilarant dans sa composition d’un tueur en série déficient mental. Les répliques sont excellentes et la manière dont il assure la diction est impressionnante, parce que ça doit être très difficile de hâcher ses phrases comme il le fait! C’est rare de voir Jérémy Ferrari en retrait, mais son rôle permet vraiment de faire briller Artus comme il le mérite, avec cette perle d’humour noir!

Best of de Gaspard Proust : «Entre la lutte contre le fascisme et le  tiramisu moi je choisis le mascarpone»

J’avais envie de vous partager un second extrait de spectacle, avec cette fois-ci une vision bien plus clinique de l’humour noir que l’on doit à Gaspard Proust, et qui dans un registre bien différent s’avère extrêmement percutant lui aussi. L’écriture ciselée à mort et le cynisme dont il fait preuve sont des bénédictions en ces temps de bien-pensance outrancière qui ne fait que mener à de la censure. Gaspard Proust balance sans le moindre état d’âme, et c’est un pur régal!

 

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David Lynch 1946-2025

David Lynch : un voyage au cœur de l'inconscient humain – Salles Obscures

C’est à l’âge de 78 ans que David Lynch aura tiré sa révérence, en ce jeudi 16 janvier 2025. L’homme était connu pour la vision onirique et résolument étrange qu’il impulsait à ses oeuvres, majoritairement au cinéma mais également en tant que peintre, photographe ou musicien. Il peut à juste titre être considéré comme un digne héritier des surréalistes tels que Miró, Dali ou Buñuel, chacune de ses oeuvres nous entraînant dans un univers où la stabilité de la réalité se fissure rapidement, et où les personnages vont se retrouver confrontés à des événements angoissants comme des distorsions temporelles, des glissements entre les réalités, ou des apparitions de doppelgängers. Quand on se remémore sa filmographie, à bien y réfléchir, il pourrait bien être le père spirituel des backrooms chères à Kane Pixels

David Lynch : l'architecte des rêves étranges s'éteint - The Good Life

David Lynch est né le 20 janvier 1946 à Missoula, dans le Montana, et se destine initialement à une carrière axée sur le dessin et la peinture. C’est en 1967 qu’il a l’idée de donner du mouvement à ses oeuvres picturales, et qu’il commence à s’intéresser tout naturellement au cinéma. La continuité se fait de manière très évidente pour cet autodidacte touche-à-tout, qui réalise alors ses premiers courts métrages. 10 ans après, en 1977, il pousse l’expérimentation encore plus loin en mettant en scène un film à l’atmosphère cauchemardesque tourné en noir et blanc, qui obtiendra au fil du temps un statut culte, Eraserhead. 3 ans après, il enchaînera avec son film le plus « abordable », le tragique Elephant Man consacré à la vie particulière de cet homme difforme. On sent très rapidement que Lynch est la voix des freaks, et qu’il a une affection particulière pour les êtres en marge, surtout lorsqu’ils le sont à cause de leur physique. En 1984, il est engagé sur son seul et unique blockbuster, le très bancal Dune qui ne lui laisse pas un très bon souvenir, car il a dû se plier aux exigences du producteur Dino De Laurentiis, et qu’il n’a pas pu avoir le final cut. Mais ce film marque sa première rencontre avec l’acteur Kyle MacLachlan, qui le suivra de nombreuses années.

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S’ensuivent Blue Velvet en 1986 et  Sailor et Lula en 1990, films très ancrés dans leur époque mais dans lesquels la patine de Lynch est toujours détectable. Mais si le metteur en scène est acclamé pour son oeuvre cinématographique, son unique participation à un show télévisé est probablement le travail qui aura traversé les décennies de manière la plus marquante. Co-créée avec Mark Frost, Twin Peaks vient en 1990 et 1991 totalement bouleverser les codes de la télévision, qui en sera à jamais métamorphosée. Selon moi, cette série marque une rupture flagrante dans la manière d’aborder l’écriture, la mise en scène et le statut même de la télévision. Twin Peaks est une bizarrerie traversant le temps avec une aura toujours mythique, et même si elle a forcément pris un coup de vieux dans sa structure et dans son imagerie, elle n’en reste pas moins fascinante et terriblement envoûtante 30 ans après. La musique incroyable d’Angelo Badalamenti, la vision éthérée de Laura Palmer, la menace latente planant sur cette ville…  Conçue comme un soap dont les codes vont être dynamités, Twin Peaks nous livre une galerie de personnages étonnants, inquiétants, parfois drôles, dont les destins s’entremêlent dans cette bourgade de laquelle se dégage une atmosphère indescriptible.

LUNDI SÉRIE – « Twin Peaks » : le monde étrange de David Lynch - Maze.fr

Lynch donnera une suite cinématographique à sa série en 1992, avec Twin Peaks : les 7 Derniers Jours de Laura Palmer. Lost Highway vient perpétuer son style narratif unique et visuellement envoûtant. En 1999, il nous livrera Une Histoire Vraie, un road-movie en tondeuse à gazon ^^. Mullholland Drive vient à nouveau offrir une certaine aura mythique à son auteur en 2001, avec un récit qui nous plonge dans ses thématiques de prédilection fait d’étrangeté et de mystère, le tout emballé avec son génie visuel et sonore. Son dernier film, Inland Empire, sort en 2006 dans une certaine indifférence, étant très peu accessible, et c’est un échec au box-office. Très affecté par cet accueil relativement froid, David Lynch choisit de mettre un terme à sa carrière cinématographique. Il reviendra pourtant une ultime fois à la réalisation en 2017, par le biais de la petite lucarne, en nous offrant une 3ème saison à Twin Peaks. 26 ans après la fin de la saison 2, nous retrouvons donc une majorité de personnages découverts dans les années 90. Ce retour ne parvient pas à ranimer la flamme des 2 saisons initiales, mais reste une curiosité intéressante nous offrant au gré de certains épisodes des instants impressionnants.

David Lynch s’en est donc définitivement allé, et on peut parier que tout là-haut, il est allé rejoindre son éternel ami Jack Nance, qui aura traversé la filmographie du metteur en scène dans pas moins de 6 oeuvres.

Twin Peaks : les 7 derniers jours de Laura Palmer sur myCANAL : résumé de  l'épisode

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Les Guerriers de l’Hiver (Olivier Norek, 2024)

Olivier Norek revient à la rentrée avec Les Guerriers de l'Hiver

Si l’on connaît surtout Olivier Norek pour sa série sur Victor Coste (Code 93, Territoires, Surtensions et Dans les Brumes de Capelans) et son éprouvant Entre Deux Mondes, l’ancien policier devenu romancier a également navigué sous la Surface des eaux d’un lac artificiel pour réveiller un cold case, ou s’est aventuré dans le domaine de l’éco-terrorisme avec Impact. Cette année, il nous livrait son premier roman historique, située sur un laps de temps très court, à savoir quelques mois, qui comprennent les semaines précédents le début de la Guerre d’Hiver, et les 4 mois qu’elle aura duré.

Les Guerriers de l'hiver » : Olivier Norek s'aventure en littérature blanche

Nous sommes en 1939 en Finlande, jeune état de 22 ans qui appartenait à l’URSS mais qui a acquis son indépendance en 1917. Ce minuscule territoire de même pas 340 000 km² va se retrouver opposé à la Russie, qui durant la Seconde Guerre Mondiale, décide de récupérer les territoires finlandais. Olivier Norek va nous raconter la lutte implacable des soldats finlandais pour la préservation de leurs libertés, et va nous démontrer comment ces hommes vont mettre en échec le mastodonte russe durant des mois. Staline tablait sur une invasion ultra-rapide, mais la détermination des Finlandais et les spécificités géographiques et climatiques du pays ont été une combinaison désastreuse pour la Russie.

Simo Häyhä | Photos - Film | FilmBooster.fr

Norek va principalement nous immerger dans 2 lieux spécifiques, les 2 endroits stratégiques qui ont été l’enjeu de luttes très destructrices : le front de Kollaa et la ligne Mannerheim située sur l’isthme de Carélie. Ces 2 postes sont situés à la frontière avec la Russie, et ont été le théâtre de batailles intenses ayant fait de très nombreuses victimes des 2 côtés. Mais c’est surtout sur le front de Kollaa que s’est bâtie la légende des guerrier de l’hiver, et notamment celle de Simo Häyhä, que les Russes surnommeront la Mort Blanche. Cet homme vivant paisiblement aux environs de la ville de Rautjärvi était un excellent chasseur, capable de pister une proie pendant des heures et d’être d’une très grande précision au tir à de grandes distances. Lors de sa mobilisation, il sera affecté à la 6ème compagnie de la garnison de Kollaa, sous le commandement d’Aarne Juutilainen, surnommé l’Horreur du Maroc. L’homme avait combattu en tant que légionnaire dans le pays africain, et y avait acquis une réputation de personnage sadique tant il appréciait tuer ses ennemis. Juutilainen ne vivait que pour faire la guerre, et il appréciait donc se retrouver en première ligne avec sa 6ème compagnie.

Throwback Thursday: Simo Hayha, Winter Warrior | NRA Family

Simo Häyhä quant à lui, n’avait pas le même tempérament que son chef, mais il était bien décidé à protéger son pays et ses amis. Il s’est engagé aux côtés de Toivo, Onni et Pietari, et chacun d’entre eux a tenté de veiller sur les autres durant cette Guerre d’Hiver. « Lorsque Simo priait, il ne demandait au ciel qu’une seule chose. Qu’à chaque soir en rentrant dans la tente, le compte de ses amis soit toujours exact. » Cette solidarité et cette fraternité vont être des moteurs essentiels dans leur lutte face à l’envahisseur, et si Simo deviendra malgré lui une figure légendaire de ce conflit, ce qui lui importait avant tout, c’était la survie de ses proches. Olivier Norek rend compte de ces liens indéfectibles entre les amis avec une émotion qui ne s’exprime pas frontalement, mais dont on ressent la solidité à toute épreuve.

La « guerre d'hiver », une défaite russe

L’auteur parvient à totalement nous immerger dans cette période tragique et glaciale, nous faisant vivre au côté de Simo et de ses amis cette guerre d’usure. Tout de blanc vêtu afin de ne pas être repérés par l’ennemi, se déplaçant à ski et se postant parfois de très longues heures afin de tendre des embuscades ou, comme Simo, de repérer et d’éliminer un sniper ennemi. « Il ne regardait rien d’autre que le même point fixe au loin, la cime d’un jeune épicéa, et dans le même temps, en se concentrant sur la totalité de sa vision périphérique, il regardait partout ailleurs. Une heure passa. Son coeur ralentit au rythme de sa respiration, et alors que le matin avait été brouillé de limaille de flocons, le soleil réapparut enfin. Une autre heure passa et Simo atteignit dangereusement la limite de sa résistance. Il sentit alors que son corps se détendait et qu’une douce tiédeur l’embrassait. Comme le troublant chant des sirènes qui mène les bateaux aux récifs, ou l’agréable odeur d’amande amère que dégage le cyanure, il n’y avait rien de rassurant dans cette sensation de bien-être et de chaleur. La main de la mort s’était posée sur son épaule et lui promettait que tout allait bien, que tout irait mieux au fil des heures et qu’il n’avait qu’à rester immobile. » Cet extrait représente à merveille la façon dont l’auteur parvient à nous faire saisir les sensations corporelles de ces soldats transis par le froid, par des températures allant parfois plus bas que -40 degrés.

Guerre d'hiver avec la Finlande: batailles pour Suomussalmi

Si l’envahisseur russe souhaitait avancer tel un rouleau compresseur sur le petit état finlandais, le Goliath aura eu de très nombreuses difficultés face à ce David inébranlable. Mais lorsqu’il traite de la guerre, Olivier Norek souhaite avant tout parler de l’humain, quel que soit le drapeau pour lequel il se bat. Dans Les Guerriers de l’Hiver, il ne va pas faire preuve de manichéisme, et il va également démontrer à quel point les engagés russes étaient très souvent pris pour de la simple chair à canon. S’ils refusaient d’aller au combat, ils étaient tout simplement exécutés, et donc de nombreux ennemis de Simo et de ses amis se battaient malgré eux, obligés de le faire pour tenter de rester en vie quelques instants de plus. Norek démontre qu’il n’y a pas de réelle victoire dans une zone de guerre, et que celui qui ôte la vie risque bien d’y perdre son humanité à petit feu. Les Guerriers de l’Hiver souligne bien la vacuité de ces pertes humaines pour gagner quelques dizaines de mètres de territoire, qui seront reperdus le lendemain…

Axe & Alliés - L'aide à la Finlande lors de la guerre d'Hiver

Avec ce roman, l’auteur met en lumière les exploits d’un sniper considéré comme le meilleur tireur d’élite de tous les temps, et nous offre également une superbe leçon de vie en nous faisant côtoyer ces hommes simples pris dans une tourmente implacable, et à travers les différentes batailles qu’ils mènent, on ressent leur appartenance à ce pays, à cette nature exigeante, et on vit leur indéfectible amitié. Les Guerriers de l’Hiver est un roman de guerre, mais il parle d’une guerre subie par ses participants (sauf Juutilainen qui s’en réjoussait!), qui ne rêvaient que de retrouver la simplicité de leur existence d’avant. Olivier Norek va nous confier des moments émouvants, comme cette rencontre entre un soldat et une infirmière, qui va leur apporter un peu de lumière en cette période si sombre. Chacun s’accroche comme il peut à sa part d’humanité, qui risque sinon de s’évaporer et de se fondre dans ces immensités neigeuses…

La guerre d'hiver 39-40: quand la petite Finlande a tenu tête à la Russie |  JDM

Olivier Norek use d’un style qu’il a encore affiné au gré de sa bibliographie, et ce roman volumineux se lit très rapidement tant le lecteur plonge littéralement dans ce morceau d’Histoire. L’auteur a tenu à être le pllus précit et respectueux de la vérité, en se basant sur de nombreuses archives, et ce même pour les dialogues. Comme il le souligne à la fin de l’ouvrage, « aucun fait d’armes n’a été inventé, ni aucune anecdote. Aucun acte de bravoure n’a été exagéré. » On va être pris aux tripes lors de séquences impressionnantes, notamment avec le fameux hyöky presque chargé de mysticisme! Et sur la totalité du bouquin plâne l’esprit du sisu, figure emblématique du courage et de la ténacité des Finlandais, qui leur aura permis de tenir durant cette longue période glaciale.

Les guerriers de l'hiver" d'Olivier Norek : Finnish Sniper - Benzine Magazine

 

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