Sisu : de L’Or et du Sang (Jalmari Helander, 2022)

Certains se souviennent peut-être de Père Noël : Origines, la variation gentiment gore de Santa Claus débarquée sur les écrans en 2010, et notamment au festival de Gérardmer. Ce premier effort signé Jalmari Helander surfait sur la vague des films fantastiques démystifiant les mythes donc, à l’instar d’un Troll Hunter datant de la même année et qui avait fait forte impression, à Gérardmer notamment lui aussi (même s’il accuse tout de même le poids des ans depuis). Père Noël : Origines s’avérait être un divertissement sympathique, avec quelques effets gores bienvenus, mais l’ensemble était convenu et ne dénotait pas malgré l’originalité de son sujet. On retrouvera Helander 4 ans plus tard sur Big Game, qui se permettait tout de même d’avoir Samuel L. Jackson et le regretté Ray Stevenson au casting. En 2022, soit 8 ans après Big Game, Jalmari Helander revient avec ce Sisu : de l’Or et du Sang, qui va s’avérer nettement plus pêchu et maîtrisé que son premier film, tout en ramenant son acteur fétiche Jorma Tommila, déjà présent sur ses 2 premières oeuvres.

Le film démarre de manière très contemplative avec une vision lointaine de la guerre, en prenant le point de vue d’un chercheur d’or habitant dans le fin fond de la Laponie avec son chien et son cheval pour seule compagnie. Si Tommila est avare de paroles durant la quasi-totalité du film, il impose une présence racée avec son physique à la fois fort et meurtri, et une gueule ainsi qu’un regard d’acier. On est dans le registre du héros mutique et solitaire à la Django, et on est donc agréablement surpris par la tournure western crépusculaire offerte par Jalmari Helander, d’autant plus qu’on a pas du tout l’habitude d’avoir un film de ce type situé dans les contrées désertiques de Laponie. Helander prend le temps de filmer ces lieux arides et cette période dévastatrice, avec un sens du tragique très épuré et d’autant plus percutant. Voir ce personnage perdu dans le cadre avec au loin des éclairs de lumières dus aux bombes explosant à des centaines de kilomètres, ça impose graphiquement et on est d’emblée séduit par cette approche âpre et intense.

On va suivre le quotidien de cet homme ayant pour seul but de trouver du métal rare, et il va passer ses journées à creuser, tel un fossoyeur se cherchant une raison de sortir de son trou… On sent la terre argileuse, on ressent le souffle du vent, et on est aux côtés de cet homme seul qui semble avoir accepté son destin. Tout va changer le jour où il tombera sur un filon représentant la promesse d’une nouvelle existence. Mais nous sommes en 1944, à la fin du second conflit mondial, et la présence de soldats nazis à proximité va clairement lui compliquer la tâche.

On sent d’emblée un côté grindhouse avec le chapitrage des séquences et les choix musicaux les accompagnant, ce qui va accentuer légèrement le rythme par rapport à un début relativement calme. Helander sait comment filmer ses personnages afin de leur donner davantage de stature, et après nous avoir brossé le portrait du chercheur d’or, il va nous dévoiler une unité nazie dont il va amplifier l’aura maléfique par ses choix de cadre et aussi d’acteurs! Il va nous dévoiler des archétypes de soldats SS suintant le Mal, et va faire du chercheur d’or sa vision fantasmée du Bien. La première rencontre entre ces deux extrêmes va s’avérer relativement tendue, avec un côté Tarantinien très maîtrisé, à savoir une tension palpable et une gestion à la fois du temps et de l’espace qui font plaisir à voir! On va assister à une première confrontation s’avérant relativement réaliste et qui se permet quelques fulgurances gores bienvenues, permettant d’asseoir la solidité de notre chercheur d’or. Les acteurs Aksel Hennie et Jack Doolan sont notamment parfaits dans leurs rôles de crevures!

L’esthétique racée de ce long métrage doit également beaucoup au très beau travail sur la photographie de Kjell Lagerroos, qui se conjugue parfaitement avec la vision crépusculaire d’Helander. On va plonger de plus en plus profondément dans ce combat entre un homme seul et des soldats bien sadiques, et on va prendre un malin plaisir à le voir dessouder du Nazi de manière méthodique et enragée. On assiste à des séquences surprenantes, comme celle près de la rivière, où on se demande bien comment il va s’en sortir cette fois… Il y a un bel apport scénaristique de la part de Jalmari Helander, qui signe son script tout seul comme un grand, et qui parvient à doser son suspense de très belle manière. Le film va toutefois se permettre au fur et à mesure de son avancée quelques entorses au réalisme, mais il le fait avec un sens du dynamisme excusant ces modifications. Plus on s’approche de la fin, plus le film propose des séquences abusées, jusqu’à un final qui fait quand même son petit effet.

Mais l’importance de ce style d’oeuvre est de s’inscrire dans le film de genre de manière clairement efficace, et Sisu : de l’Or et du Sang est une très belle surprise méritant largement le coup d’oeil, en proposant un spectacle bien plus captivant que les interchangeables Marvelleries et Fast & Furiouseries devenant de plus en plus inssuportables… C’est une bouffée d’oxygène dans un 7ème art que l’on croyait définitivement anesthésié, et je ne peux que vous inviter à vous rendre en salle le 21 juin afin d’en profiter pleinement!

Et pour la petite histoire, il y a également un Onni Tommila au casting, qui n’est autre que le fils de Jorma Tommila, et le neveu du metteur en scène Jalmari Helander 😉 Et comme son père, il était au casting des 2 autres films de son oncle ^^

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Les news de la semaine : l’ordre et la Morale(s)

Amy Pascal avait l’annonce tout prête dans son tiroir, et au vu des rentrées financières impressionnantes de Spider-Man : Across the Spider-Verse lors de sa sortie (il a réalisé plus du double de l’excellent premier opus), elle a opportunément brandi l’information haut et fort histoire de profiter au maximum de la Spider-money : il y aura donc bien un film Spider-Man en live action centré sur Miles Morales! Attendu par les fans depuis bien longtemps, le Ricain d’origine afro-latino avait une fenêtre de tir magnifique avec Spider-Man : No Way Home, mais Pascal et les autres ne devaient pas être assez satisfaits des recettes de Spider-Man : New Generation. C’est bien dommage, car le timing aurait été parfait dans ce film!

Bref, Sony et Marvel Studios, même combat, l’originalité passe après la rentabilité, et on le voit d’ailleurs bien avec le second opus arachnéen animé, qui ne fait que singer en beaucoup moins bien son prédécesseur. Maintenant, la grande inconnue reste la manière dont ce nouveau Spidey sera amené, puisque Sony n’a pas les droits d’utiliser Peter Parker dans l’univers qu’ils ont créé avec Venom, Morbius et le prochain Kraven. Ce serait donc une aubaine pour introduire Miles qui prendra la place arachnéenne dans l’univers de Sony, sans que l’on fasse référence à Peter? Ce serait une possibilité, et on pourrait même à terme donner le nom d’univers Ultimate à cette branche, histoire de bien faire la distinction avec le 616 du MCU? Des questions qui n’obtiendront pas de réponses avant bien longtemps, mais en tout cas, c’est avec un mélange d’espoir et de crainte que j’apprends cette nouvelle, Miles étant sans conteste l’un des personnages les plus intéressants de la galaxie Marvel, et je ne peux que vous conseiller de lire ses aventures en version comics!

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Spider-Man : Across the Spider-Verse (Joaquim Dos Santos, Kemp Powers, Justin K. Thompson,2023)

Je viens de relire ma critique du premier opus, et je me demande comment on a pu passer d’une aussi belle réussite à… ça. Tout ce qui faisait la fraîcheur de cet excellent Spider-Man : New Generation a soit totalement disparu, soit à été intensifié jusqu’à atteindre un trop-plein… Bon, déjà il y a eu des ajustements au niveau de la réalisation, puisque les responsables du premier film, à savoir Bob Persichetti, Peter Ramsey et Rodney Rothman n’ont pas rempilé 5 ans après, mais ont été remplacé par un autre trio, Joaquim Dos Santos, Kemp Powers et Justin K. Thompson. Powers est un des co-réalisateurs de Soul, tandis qu’il s’agit du premier long métrage de ses compères. Le schéma est assez similaire au premier trio, puisque seul Peter Ramsey avait lui aussi déjà réalisé d’autres oeuvres au préalable. Mais la grosse différence, c’est que le trio initial avait toute latitude pour poser les bases d’un nouvel univers, tant dans sa partie graphique que narrative, tandis que suite au statut acquis par ce premier film, le second trio avait pour mission de réitérer son exploit.

La paire de scénariste initiale Phil Lord-Rodney Rothman s’est transformée en trio Phil Lord-Christopher MillerDave Callaham, et on pourrait se dire que le duo Lord-Miller fonctionnant ensemble ne peut amener que du mieux. Mais on sent une volonté qui doit planer bien au-dessus (l’ombre d’Amy Pascal très certainement) qui a décidé d’en mettre plein la vue à grands renforts d’effets visuels, un peu comme elle le fait avec les Venom : Let there be Carnage et autre Morbius? Bref, il manque singulièrement une authenticité à ce second épisode, et je vais revenir sur les manques et les trop-plein qui en font un gros objet boursouflé de 2h20, trop long pour tenir la route et sans accroche émotionnelle valide.

L’un des éléments qui fonctionnait très bien dans Spider-Man : New Generation était sa gestion des personnages et sa capacité à susciter des émotions sincères, on nageait alors en pleine aventure ado avec son lot de questionnements moraux et de liens affectifs, notamment ceux entre Miles et son père, qui s’avéraient très crédibles et très touchants. Ici, ça commence direct avec de l’humour très mal placé, et un décalage constant entre ses parents et Miles, mais sans que l’on se dise que ça fonctionne… Là où on avait envie que les choses s’arrangent entre eux dans le 1er, on se sent ici très peu concerné et on reste à distance de leurs problèmes, parce qu’ils sont traités avec une forme d’artificialité qui ne donne juste pas envie d’y croire. Les dialogues sont insipides au possible, et on se croirait presque dans les diatribes familiales chères à ce bon vieux Dom Torretto, c’est dire… Il faut dire aussi que la VF n’aide certainement pas car elle semble elle aussi très détachée…

L’identité visuelle du premier film avait fait l’effet d’un bel électrochoc, et les réalisateurs se devaient de maintenir le niveau pour ce second film. Résultat : ça dégueule constamment de couleurs et ça change de charte graphique quasiment tout le temps en s’adaptant à chaque personnage. Le début va nous offrir un Vautour alternatif bien laid visuellement, et la palme du too much revient certainement à Hobie Brown, le Spider-Punk, dont l’image se transforme à chaque seconde, entre changements de couleur et effets de texture. C’est visuellement fatiguant, et le film ne va pas s’arrêter là, puisque cette surenchère va se poursuivre avec des séquences d’action dégueulasses qui vont partir dans tous les sens dans un maelstrom épuisant de couleurs et de vitesse. Toute la fluidité du premier film a été laissée sur le bord de la route et on a adopté ici un style supersonique histoire de se croire dans un grand huit, et c’est juste infernal. J’en suis sorti avec le même mal de crâne que pour Fast & Furious X, et niveau comparaison, on ne peut pas dire que ce soit flatteur.

Je sais qu’on est dans une époque où tout va plus vite, tout est plus criard et qu’on n’arrive même plus à suivre tout ce qui nous est balancé sur les écrans de toute taille, mais franchement, pourquoi viser cette overdose quand le premier film maîtrisait son sujet avec classe et nous offrait une histoire captivante et d’une très belle fluidité visuelle? On n’a pas besoin d’en rajouter dans les mouvements excessifs, les couleurs qui viennent de partout où les fausses problématiques narratives, quand on peut prendre chacun de ses éléments et leur apposer un traitement censé comme dans le premier film. Dès le second épisode de cette saga, Spider-Man : Across the Spider-Verse atteint déjà les limites de cette histoire et est déjà gangrené par ce principe de surenchère que très peu de blockbusters sont capables d’éviter. On est dans un trop-plein esthétique et dans un désert émotionnel qui fait de ce film une très grande chute vis-à-vis de son modèle. On en ressort avec la tête qui tourne mais pas dans le bon sens du terme.

J’allais presque oublier de parler du personnage de Miguel O’Hara! Celui qui est connu pour être Spider-Man 2099 est ici une caricature qui serait presque drôle si on ne s’était pas déjà pris autant de trucs dans la tête au préalable. Cet excellent personnage en comics ne coupe pas à la dénaturation, et il est la plupart du temps filmé de dos histoire de prendre la pose imposante qui permet de souligner sa musculature et son côté supérieur et inquiétant. C’est fait tellement de fois qu’on en a rapidement plus rien à faire, et je vous conseille de relire les épisodes de Peter David et Rick Leonardi, qui sont tellement plus intéressants narrativement et graphiquement! On passera sur le Peter Parker original, dont le traitement juste comique est ridicule, et qui démontre parfaitement la débilité des dialogues. Il dit par exemple à Miles qu’il adore passer du temps avec lui alors qu’ils ne s’étaient jamais revus depuis leur première aventure ^^ Pour ceux qui avaient apprécié la team du premier Spidey, n’en attendez pas trop ici quand même au niveau des personnages…

Ce film fonctionne énormément au fan service, mais à un point tel qu’on est envahi d’infos lors de certaines séquences, et que ça produit l’effet inverse de celui escompté, puisqu’à un moment on n’a même plus envie de voir tout ça. Il y a un moment de fan-service que j’ai trouvé bien cool, je ne vous le dévoilerai pas, mais même là ils arrivent à le rabaisser. Une scène avec ce personnage était largement suffisant, le plan supplémentaire ensuite ne servait strictement à rien… Bref, je ferai très probablement l’impasse sur l’épisode 3, car comme pour Fast & Furious X (décidément…), ça se termine de manière brutale et ça permet de bien jauger sa motivation pour voir la résolution de ce bordel. La mienne est au plus bas ^^

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Les news de la semaine : Titus Pullo

C’est avec une certaine tristesse que l’on a appris cette nuit la mort de l’acteur irlandais Ray Stevenson à l’âge de 58 ans. Il a dû être hospitalisé alors qu’il était sur un tournage, et est décédé d’une maladie sans que l’on ait davantage de précisions. Sa carrière l’aura souvent vu embrasser des rôles dans des productions historiques, à commencer par Le Roi Arthur d’Antoine Fuqua en 2004, suivi des Trois Mousquetaires en 2011 pour Paul W.S. Anderson (il incarnait Porthos). Il a également flirté avec la mythologie, obtenant le rôle du volubile Volstagg dans les 3 premiers films de la saga Thor. Black Sails en 2016-2017, puis Vikings en 2020 lui assureront encore une aura télévisuelle historique, ainsi que Les Médicis : Maîtres de Florence en 2019. Du côté de Marvel, il a incarné un Frank Castle pas déconnant dans le pourtant pas terrible Punisher : Zone de Guerre signé Lexi Alexander.

Mais s’il ne doit en rester qu’un, ce sera le rôle qui l’a révélé au grand public : Titus Pullo, le gladiateur de la superbe série Rome de 2005 à 2007. Le show de Bruno Heller est sans conteste le précurseur de Game of Thrones, et Ray Stevenson apportait toute sa puissance, sa gueule et ses capacités émotionnelles pour faire de Titus Pullo un personnage que l’on a adoré suivre au gré des épisodes, aux côtés du tout aussi excellent Kevin McKidd dans le rôle de Lucius Vorenus. Si Ray Stevenson aura été un acteur discret qui n’aura pas eu la chance de devenir une star incontournable, il possédait l’étoffe et le charisme de ceux que l’on aime découvrir au fil d’une filmographie modeste mais solide. Pour boucler la boucler d’une manière légèrement romantique, histoire d’apaiser cette tragédie, il est décédé en Italie, là où il avait tourné Rome

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Les news de la semaine : casting Deadpool 3

Bon, alors que le début de tournage de Deadpool 3 est menacé par la grève des scénaristes (il devait démarrer ce mois-ci), on a le temps de faire un point casting histoire de voir que cette suite pourrait s’avérer bien plus proche de ses prédécesseurs que ce que l’on pourrait croire suite au rachat par Disney. Même si on est toujours craintif concernant son classement annoncé R par la firme aux grandes oreilles, car on est jamais à l’abri d’un retournement de veste de leur part, il faut bien avouer que le casting fait envie avec tous ces retours annoncés!

 

Aux côtés des incontournables Ryan Reynolds et Hugh Jackman, on verra donc à nouveau Morena Baccarin endosser le rôle du love interest Vanessa, Leslie Uggams jouera à nouveau Blind Al, Dopinder reviendra sous les traits de Karan Soni, le super-héros sans super-pouvoirs Peter sera à nouveau présent sous les traits de Rob Delaney, et Brianna Hildebrand ainsi que Shioli Kutsuna reformeront le couple Negasonic Teenage Warhead/Yukio. Dans un monde où les changements de firme induisent automatiquement des recast, ça fait franchement plaisir de revoir toutes ces trognes! Manque plus que Josh Brolin en Cable et Zazie Beetz en Domino et on est pas mal!

 

Changement de stratégie du côté de Disney + en ce qui concerne les séries Marvel, puisque pour la première fois, ils vont tenter de sortir un show en mode Netflix, à savoir tous les épisodes d’un coup. C’est Echo qui écope de ce choix, avec une date de sortie fixée au 29 novembre. Par contre ce qui est étonnant, c’est que la saison 2 de Loki prévue pour le 6 octobre est quant à elle bien prévue à un rythme hebdomadaire. On pourrait penser que Disney ne croit pas du tout au potentiel d’Echo, personnage secondaire qui risque bien de ne pas attirer les foules sur la plate-forme, tandis que Loki a des chances d’engranger quelques abonnés supplémentaires. Avec la restructuration entamée par Bob Iger et la baisse de la cadence imposée, Echo serait-elle une série sacrifiable? On pourrait décemment penser qu’Iger n’aurait probablement pas choisi de la tourner s’il avait encore été à la tête de la structure à ce moment-là, en tout cas, c’est l’impression qui se dégage de ce choix étrange.

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