Banshee saison 1 (David Schickler, Jonathan Tropper, 2013)

C’est complètement par hasard que je suis tombé sur cette série, dans laquelle je me suis laissé embarqué après avoir lu le point de départ plutôt étonnant: un homme récemment sorti de prison se rend dans une ville perdue de Pensylvannie, où il va endosser le rôle du shérif local après un concours de circonstances bien violent. Il va se familiariser avec la population locale composée de Amish, d’Indiens et de rednecks pure souche! L’histoire a de quoi surprendre, et je m’attendais à un traitement sympathique mais qui ne ferait pas de vague, la série étant produite par Alan Ball, le papa de True Blood à laquelle je n’avais pas particulièrement accrochée. Et je me suis retrouvé au final devant une pure série bad-ass où la violence, le sexe et l’humour noir démontent tout, dans une atmosphère sudiste que ne renierait certainement pas Joe R. Lansdale!!!

Le premier épisode fixe les règles bien personnelles du show de David Schickler et Jonathan Tropper en mettant en avant l’explosivité du récit et en combinant à merveille violence graphique et sens de la dramaturgie. On a un personnage principal génial qui est un anti-héros par excellence, et qui va se retrouver de l’autre côté de la loi en endossant la défroque du shérif… Ce n’est pas pour autant qu’il va devenir un modèle de droiture, ce qui va donner lieu à une réinterprétation bien fun de la loi! Banshee va évidemment faire quelques concessions au réalisme, mais ce postulat de départ accepté, va dérouler au gré des épisodes un sens du rythme diablement efficace doublé d’une approche des personnages vraiment originale! Schickler et Tropper vont s’amuser comme des petits fous à créer cette petite ville de Banshee, et la galerie d’une trentaine de personnages va se découvrir peu à peu de manière souvent très violente ou drôle!

C’est dans sa représentation de la violence que Banshee surprend tout d’abord, avec une approche viscérale et bien crade que l’on a pas l’habitude de voir! Les combats ne se font pas forcément à la loyale, car le but est avant tout de survivre, et l’on assiste à des scènes bien hard où l’on déchire des doigts, où l’on tranche les parties et où on perce les yeux avec un degré de sauvagerie véritablement surprenant, tout en conférant à ces scènes un sens dramatique extrêmement fort et graphiquement magnifique! Banshee n’a rien du show édulcoré du samedi soir, il frappe fort et de manière vicieuse en ne lésinant pas sur l’hémoglobine et les fractures ouvertes, posant les bases d’un récit qui va lui aussi aller très loin!

Le melting-pot que représente Banshee va ouvrir sur des présentations de personnages bien originales, et l’on peut citer pêle-mêle Rebecca, la magnifique Amish totalement délurée, Sugar, l’ex-taulard qui va venir en aide au nouveau shérif Lucas Hood, Olek, l’homme de main ukrainien sans pitié… Banshee frappe extrêmement fort et crée des personnages totalement géniaux, comme celui de Kai Proctor, le mafieux local à la violence froide incroyable; Job, le drag-queen spécialiste du hacking qui est magistral, ou encore Mr Rabbit, le diabolique mafieux ukrainien prêt à tout pour retrouver Lucas Hood…

Il y a véritablement un souffle hérité de Lansdale sur cette série qui partage de nombreux thèmes avec l’auteur texan! On retrouve au gré des épisodes une nation aryenne, des bikers totalement barges, des Amish ancrés dans leurs traditions, des rednecks complètement givrés, et j’en passe! Tout comme dans un bon roman d’Hap & Leonard, Banshee est une ode à la violence décomplexée, aux situations bordéliques et à l’humour très noir, avec en point central ce Lucas Hood magnifié par l’excellent Anthony Starr, acteur totalement inconnu et qui ne devrait décemment pas le rester après sa prestation hallucinante!

La précision dans la construction des personnages doit beaucoup au travail ciselé sur les dialogues, qui prennent très souvent l’apparence de joutes verbales tendues et géniales! Chaque personnage cherche à tirer la couverture à lui, qu’il s’agisse de quête de pouvoir, d’argent ou de sexe, et Banshee résume ces tiraillements humains de la manière la plus efficace qui soit par ses accès de violence soudains et ces affrontements quotidiens qui rappellent l’ère du western! Le bad boy Lucas Hood en shérif n’est finalement pas le plus à craindre dans le patelin, et la montée en puissance des épisodes est tout simplement énorme! Les flashbacks sur la période en prison de Lucas sont d’une intensité rarement atteinte, avec cette oppression totale et cette absence d’espoir magnifiée par la figure hallucinante du détenu albinos! Ce colosse est la Nemesis de Lucas, et il va lui pourrir l’existence chaque jour de détention…

Ulrich Thomsen joue Kai Proctor avec une classe et une sombre détermination qui en font l’un des bad guys les plus intéressants que j’ai pu voir, TV et ciné confondus! Cet acteur danois qui avait joué dans Festen fait véritablement froid dans le dos, et devrait faire parler de lui dans les années à venir… Hoon Lee, qui jouait dans Premium Rush, est absolument génial dans le rôle de Job, qui est la représentation parfaite du Leonard Pine de Lansdale!!! Un humour ravageur et une propension à la violence exacerbée en font la drag-queen la plus sévèrement burnée du Sud américain!

Banshee est un pur moment de bonheur qui va très loin, traversé par des femmes fatales qui n’ont pas froid aux yeux, mention à la jeune Rebecca qui s’affranchit des traditions amish à travers une expérimentation sexuelle puissante, et qui voit toutes ces interférences entre des personnages mener à un résultat complètement explosif et jouissif! Et j’oubliais presque de parler de l’amour perdu de Lucas qui est véritablement poignant, puisqu’il revoit la femme qui a partagé sa vie avant son séjour en prison. L’espoir et le désespoir se succèdent lors de ses rencontres avec elle, et ce sentiment de chute est terriblement bien rendu par un Anthony Starr bourré d’émotion contenue! Banshee est parfaite sur tous les tableaux, et cette plongée en plein Sud réactionnaire fait un bien fou!!!

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