Spider-Man : Across the Spider-Verse (Joaquim Dos Santos, Kemp Powers, Justin K. Thompson,2023)

Je viens de relire ma critique du premier opus, et je me demande comment on a pu passer d’une aussi belle réussite à… ça. Tout ce qui faisait la fraîcheur de cet excellent Spider-Man : New Generation a soit totalement disparu, soit à été intensifié jusqu’à atteindre un trop-plein… Bon, déjà il y a eu des ajustements au niveau de la réalisation, puisque les responsables du premier film, à savoir Bob Persichetti, Peter Ramsey et Rodney Rothman n’ont pas rempilé 5 ans après, mais ont été remplacé par un autre trio, Joaquim Dos Santos, Kemp Powers et Justin K. Thompson. Powers est un des co-réalisateurs de Soul, tandis qu’il s’agit du premier long métrage de ses compères. Le schéma est assez similaire au premier trio, puisque seul Peter Ramsey avait lui aussi déjà réalisé d’autres oeuvres au préalable. Mais la grosse différence, c’est que le trio initial avait toute latitude pour poser les bases d’un nouvel univers, tant dans sa partie graphique que narrative, tandis que suite au statut acquis par ce premier film, le second trio avait pour mission de réitérer son exploit.

La paire de scénariste initiale Phil Lord-Rodney Rothman s’est transformée en trio Phil Lord-Christopher MillerDave Callaham, et on pourrait se dire que le duo Lord-Miller fonctionnant ensemble ne peut amener que du mieux. Mais on sent une volonté qui doit planer bien au-dessus (l’ombre d’Amy Pascal très certainement) qui a décidé d’en mettre plein la vue à grands renforts d’effets visuels, un peu comme elle le fait avec les Venom : Let there be Carnage et autre Morbius? Bref, il manque singulièrement une authenticité à ce second épisode, et je vais revenir sur les manques et les trop-plein qui en font un gros objet boursouflé de 2h20, trop long pour tenir la route et sans accroche émotionnelle valide.

L’un des éléments qui fonctionnait très bien dans Spider-Man : New Generation était sa gestion des personnages et sa capacité à susciter des émotions sincères, on nageait alors en pleine aventure ado avec son lot de questionnements moraux et de liens affectifs, notamment ceux entre Miles et son père, qui s’avéraient très crédibles et très touchants. Ici, ça commence direct avec de l’humour très mal placé, et un décalage constant entre ses parents et Miles, mais sans que l’on se dise que ça fonctionne… Là où on avait envie que les choses s’arrangent entre eux dans le 1er, on se sent ici très peu concerné et on reste à distance de leurs problèmes, parce qu’ils sont traités avec une forme d’artificialité qui ne donne juste pas envie d’y croire. Les dialogues sont insipides au possible, et on se croirait presque dans les diatribes familiales chères à ce bon vieux Dom Torretto, c’est dire… Il faut dire aussi que la VF n’aide certainement pas car elle semble elle aussi très détachée…

L’identité visuelle du premier film avait fait l’effet d’un bel électrochoc, et les réalisateurs se devaient de maintenir le niveau pour ce second film. Résultat : ça dégueule constamment de couleurs et ça change de charte graphique quasiment tout le temps en s’adaptant à chaque personnage. Le début va nous offrir un Vautour alternatif bien laid visuellement, et la palme du too much revient certainement à Hobie Brown, le Spider-Punk, dont l’image se transforme à chaque seconde, entre changements de couleur et effets de texture. C’est visuellement fatiguant, et le film ne va pas s’arrêter là, puisque cette surenchère va se poursuivre avec des séquences d’action dégueulasses qui vont partir dans tous les sens dans un maelstrom épuisant de couleurs et de vitesse. Toute la fluidité du premier film a été laissée sur le bord de la route et on a adopté ici un style supersonique histoire de se croire dans un grand huit, et c’est juste infernal. J’en suis sorti avec le même mal de crâne que pour Fast & Furious X, et niveau comparaison, on ne peut pas dire que ce soit flatteur.

Je sais qu’on est dans une époque où tout va plus vite, tout est plus criard et qu’on n’arrive même plus à suivre tout ce qui nous est balancé sur les écrans de toute taille, mais franchement, pourquoi viser cette overdose quand le premier film maîtrisait son sujet avec classe et nous offrait une histoire captivante et d’une très belle fluidité visuelle? On n’a pas besoin d’en rajouter dans les mouvements excessifs, les couleurs qui viennent de partout où les fausses problématiques narratives, quand on peut prendre chacun de ses éléments et leur apposer un traitement censé comme dans le premier film. Dès le second épisode de cette saga, Spider-Man : Across the Spider-Verse atteint déjà les limites de cette histoire et est déjà gangrené par ce principe de surenchère que très peu de blockbusters sont capables d’éviter. On est dans un trop-plein esthétique et dans un désert émotionnel qui fait de ce film une très grande chute vis-à-vis de son modèle. On en ressort avec la tête qui tourne mais pas dans le bon sens du terme.

J’allais presque oublier de parler du personnage de Miguel O’Hara! Celui qui est connu pour être Spider-Man 2099 est ici une caricature qui serait presque drôle si on ne s’était pas déjà pris autant de trucs dans la tête au préalable. Cet excellent personnage en comics ne coupe pas à la dénaturation, et il est la plupart du temps filmé de dos histoire de prendre la pose imposante qui permet de souligner sa musculature et son côté supérieur et inquiétant. C’est fait tellement de fois qu’on en a rapidement plus rien à faire, et je vous conseille de relire les épisodes de Peter David et Rick Leonardi, qui sont tellement plus intéressants narrativement et graphiquement! On passera sur le Peter Parker original, dont le traitement juste comique est ridicule, et qui démontre parfaitement la débilité des dialogues. Il dit par exemple à Miles qu’il adore passer du temps avec lui alors qu’ils ne s’étaient jamais revus depuis leur première aventure ^^ Pour ceux qui avaient apprécié la team du premier Spidey, n’en attendez pas trop ici quand même au niveau des personnages…

Ce film fonctionne énormément au fan service, mais à un point tel qu’on est envahi d’infos lors de certaines séquences, et que ça produit l’effet inverse de celui escompté, puisqu’à un moment on n’a même plus envie de voir tout ça. Il y a un moment de fan-service que j’ai trouvé bien cool, je ne vous le dévoilerai pas, mais même là ils arrivent à le rabaisser. Une scène avec ce personnage était largement suffisant, le plan supplémentaire ensuite ne servait strictement à rien… Bref, je ferai très probablement l’impasse sur l’épisode 3, car comme pour Fast & Furious X (décidément…), ça se termine de manière brutale et ça permet de bien jauger sa motivation pour voir la résolution de ce bordel. La mienne est au plus bas ^^

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