Uncharted (Ruben Fleischer, 2022)

Il aura fallu plus de 10 ans pour que l’adaptation de la série de jeux vidéo Uncharted voit le jour, et le projet aura eu le temps de passer en de nombreuses mains avant d’être finalisé. En 2010, David O. Russell était pressenti à la mise en scène, puis ce sont Seth Gordon, Joe Carnahan, Shawn Levy, Dan Trachtenberg ou encore Travis Knight qui se sont succédé au poste de réalisateur sans jamais aboutir… Ca a nettement moins bougé au niveau du casting principal, avec l’évocation de Nathan Fillion, puis Mark Wahlberg qui affirmait lui-même avoir obtenu le rôle principal, alors qu’il n’en était rien…

On arrive donc aujourd’hui à cette configuration avec Ruben Fleischer, cher à Sony depuis le succès de son Venom, et avec le très bankable Tom Holland, alter-ego de Spider-Man chez Sony. On sent dès le départ une volonté de bien formater le projet, afin qu’il s’inscrive correctement dans le moule permettant d’engranger un maximum de billets verts… Et c’est à priori bien ce qui est en train de se passer. Mais ce qui nous intéresse surtout, c’est la pertinence d’une telle adaptation, et son niveau de réussite vis-à-vis d’une saga vidéoludique exemplaire et indispensable!

Forte de 6 jeux principaux et 2 jeux annexes, la saga Uncharted (qui signifie « inexploré ») est une réappropriation brillamment inspirée de Tomb Raider et d’Indiana Jones, faite d’exotisme, d’émotions, de vertige et d’humour, pour un résultat des plus savoureux et emballants!!! J’ai profité du second confinement pour découvrir tout cela, et j’ai adoré les aventures de Nathan Drake et de Sully!!! Il y a un réel souffle épique, un véritable sens de l’aventure et du gigantisme, et un vrai suspense dans le mode d’exploration! Uncharted est une modernisation parfaite de ces jeux et films à l’ancienne, et permet de passer des heures et des heures dans des environnements luxuriants et ensoleillés, ou dans des grottes glaciaires et autres sous-marins perdus! La saga nous fait passer par tellement d’environnement différents et très bien construits, que cette immense balade est un pur régal!!!

Ce qui saute aux yeux directement avec cette adaptation, c’est que les producteurs ont décidé de revoir drastiquement à la baisse le côté globe-trotter de Nathan, puisque s’il part de New York à Barcelone, il n’aura ensuite droit qu’à un voyage vers les Philippines. En terme de dépaysement, c’est sensiblement identique au dernier James Bond, Mourir peut attendre, et on se dit qu’il y a quelques sesterces qui ont été économisé sur le budget TripAdvisor. Là où les jeux vidéo nous baladent à travers le monde, il y a de quoi être légèrement frustré sur les destinations du film. Le premier jeu seul nous promenait déjà dans pas mal d’endroits bien différents… On sent toutefois une filiation avec l’intrigue du premier Uncharted : Drake’s Fortune, dans lequel Nathan suivait les traces de son ancêtre Francis Drake, et recherchait le mythique Eldorado! Dans le film, pour parler à un plus grand nombre, Nathan se lance sur les traces de Magellan

On sent une volonté de coller à l’esprit des jeux, et on ne s’ennuie finalement pas dans ce film, qui devrait être le premier d’une longue saga. Après tout, on ne peut pas prendre un réalisateur et un acteur de franchises sans caresser l’espoir de faire de multiples films… Le problème de cette approche, c’est qu’on sent un certain caractère lisse, histoire de rester dans cette mouvance marvellienne, qui veut que l’on offre des films calibrés pour plaire au plus grand nombre. Alors oui, certains projets sortent du lot (Les Gardiens de la Galaxie, Logan), mais cette approche systémique a nettement tendance à répéter une formule éprouvée, quitte à sacrifier l’innovation et la fraîcheur, afin de prendre moins de risques… Mais c’est très souvent dans les risques que l’on trouve l’originalité et la réussite, et c’est bien dommage de ne pas aller plus loin que cette surface trop classique…

Tom Holland nous fait du Peter Parker, ce qui était bien évidemment pressenti, et s’en sort avec son côté ingénu et sympathique. Mais en l’état, il est loin de la personnalité bien plus travaillée du véritable Nathan Drake, et on regrette évidemment cet état de fait. Pareil pour Sully, qui est un personnage très intéressant dans la mythologie, avec son côté baroudeur bougon et grande gueule, très loin de ce qu’en fait Mark Wahlberg… Lequel est toutefois assez efficace pour que son jeu suffise, si on accepte que Sully ne soit pas Sully… Parce que Sully sans moustache ne peut pas être Sully!!! En fait, Uncharted (le film) se maintient à flot grâce à ce travail quasi-mathématiques visant à jouer sur les divers capitaux-sympathie des personnes à l’oeuvre, ainsi qu’en misant sur le fameux fan-service que Sony ne lâchera désormais plus vu les recettes mirobolantes de Spider-Man : no Way Home. On passe un bon moment,  on ne s’ennuie pas, mais on reste loin des qualités étonnantes des jeux vidéo.

On appréciera les jeux de confiance/méfiance entre les divers protagonistes, élément bien évidemment tiré des jeux vidéo, et qui est plutôt bien traité dans cette adaptation. Ca fait plaisir de rencontrer Chloe Frazer en chair et en os, même si là encore, la personnalité de l’aventurière est bien plus marquée dans les jeux. Ruben Fleischer nous offre une scène d’action aérienne bien barrée, qui renvoie à Uncharted 3 : l’Illusion de Drake, et même si elle est assez irrespectueuse du principe de gravité, elle n’en est pas moins vertigineuse. On a même une volonté de piquer un p’tit élément à LA scène mythique des jeux, l’intro d’Uncharted 2 : Among Thieves, et on espère que ce clin d’oeil soit juste un avant-goût de ce que Ruben Fleischer pourrait nous offrir dans une suite…

En gros, cet Uncharted se suit agréablement, avec son côté aventures sympathique, même s’il est restreint par une vision qui reste relativement en surface. Il s’agit d’une introduction sympa, mais on va attendre de voir les personnages prendre de la bouteille pour gagner en maturité et en rugosité, afin de peut-être nous offrir une ou des adaptations plus proches des jeux dans le futur? On est en droit d’espérer… Sinon, la scène de fin en mode Fast & Furious n’était pas forcément nécessaire, et on sent juste l’artificialité qui a donné naissance à cette séquence bien portnawak… Ca m’a vraiment penser à la scène de fin de Fast & Furious : Hobbs & Shaw… Et surtout, les jeux vidéo nous ont habitué à voir Nathan tomber, chuter, virevolter tout le temps, et on est loin du compte ici, malgré quelques péripéties sympas…

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