Un(e)secte (Maxime Chattam, 2019)

J’avais découvert Maxime Chattam il y a bien longtemps avec sa Trilogie du Mal (L’Ame du Mal, In Tenebris, Maléfices) qui s’était avérée très dérangeante et très addictive. J’ai retrouvé la trace de l’auteur en début d’année dernière, avec son excellent Le Signal qui se voulait une modernisation et une relecture très personnelle des écrits en mode Stephen KingLe Signal avait été publié en 2018, et l’an dernier il nous livrait Un(e)secte, titre étrange sous lequel il nous plonge dans 2 enquête policières parallèles.

Atticus Gore est un flic de Los Angeles qui va être mis sur une enquête des plus étranges et glauques : un cadavre non identifiable a été retrouvé, et pour cause, la victime a été intégralement débarrassée de sa chair et réduite à l’état de squelette, alors qu’elle portait encore ses vêtements! Le principe de décomposition ne permettant pas une disparition aussi rapide et extrême des tissus humains, Gore va devoir sérieusement remettre en question sa logique en matière de crime… A des milliers de kilomètres de là, la détective privée Kat Kordell est chargée d’enquêter sur la disparition d’une jeune femme solitaire, Lena Fowlings, sur la demande de sa mère terriblement inquiète.

Maxime Chattam est un auteur rodé, qui maîtrise ses partitions et qui sait comment embarquer instantanément le lecteur à ses côtés, tel un bon conteur devant son feu de camp. On va rapidement se prendre de sympathie pour ses 2 personnages principaux, bénéficiant chacun d’un background psychologique intéressant et de failles auxquelles on peut s’identifier, tout en mettant l’accent sur le caractère absurde et irréaliste de la scène de crime. Rien de tel que la cohésion d’une connivence de caractères et d’une curiosité exacerbée pour appâter le lecteur, non? Bien sûr que oui, et donc une fois encore, ça fonctionne! ^^

L’inspecteur Atticus Gore est un électron libre dans son service, loup solitaire adepte de thrash metal qui préfère se protéger sentimentalement plutôt que de s’engager. Kat Kordell est une dure à cuire qui elle aussi aime garder ses distances avec les autres et avec ses propres sentiments. Les 2 partagent une belle intransigeance dans leur boulot et une volonté de faire éclater la vérité sur les cas qu’ils traitent. Finalement, Chattam use d’une maxime chère à Stan Lee depuis ses débuts : parler de personnages ancrés dans la réalité, possédant de vraies failles, et confrontés à des événements qui les dépassent afin de les surmonter. C’est finalement une base commune à de très nombreux pans de l' »industrie » culturelle, qu’il s’agisse des films, des romans, des séries ou des comics! Et face à ce patronyme étrange d’Atticus Gore, je parierai que Chattam est fan d’Atticus Ross et de Depeche Mode! ^^

Là où on s’attendait à des fourmillements constants et des sensations désagréables à l’instar de son excellent Maléfices, les insectes ne sont finalement pas aussi présents que ce que l’on pensait. Je me souviens encore de mes démangeaisons en lisant Maléfices, brrrrr… Bon, on va commencer par les spoils, puisque la 4ème de couverture dévoile directement le noeud de l’intrigue, ce qui est une aberration… Donc si vous avez envie de lire ce livre, ne lisez pas le résumé hein… Et le titre lui-même en dévoile déjà un peu trop, c’est dommage aussi…

Mais sinon la magie de Chattam agit toujours, et on est surpris  à reprendre en main très rapidement ce bouquin après l’avoir posé, et à enchaîner les chapitres compulsivement. Comme quoi, les pavés peuvent se lire très rapidement quand le contenu happe le lecteur! On va se balader dans les bas-fonds new-yorkais, sur les hauteurs calmes de Los Angeles, et on va découvrir diverses strates de populations, des plus démunis aux plus puissants, le lien étant fait par les 2 enquêteurs. Il y a un véritable caractère ludique à la lecture de ce livre, qui nous fait mener l’enquête avec un mélange de suspicion et de curiosité fonctionnant à plein régime. Les différents protagonistes croisés sont brossés avec un style efficace et direct, et on va à chaque fois se demander dans quelle catégorie les ranger… Suspect ou allié? La frontière est parfois mince entre les 2…

J’ai toutefois préféré l’atmosphère géniale du Signal, avec cette petite bourgade tranquille traversée par un mal insidieux, mais ce récit est assez intriguant et bien écrit pour donner envie d’aller jusqu’au bout! Maxime Chattam est un très bon conteur, de ceux vers qui on a envie de retourner régulièrement! 🙂

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Les news de la semaine : Fake news

Il est loin le temps où c’était la honte de lire ses comics à la vue de tout le monde! Les super-héros n’ont jamais été aussi populaires, touchant toutes les couches de populations et se faufilant à travers tous les médias. Quand on voit la suprématie de l’empire Disney, on se rend compte à quel point les rouages ont été modifiés depuis 15-20 ans!

Mais la contrepartie de cette surmédiatisation, c’est bien évidemment la multiplication exponentielle des articles dédiés, et donc des sites dits spécialisés. Pour ma part, je fonctionne avec 2 sources d’informations très fiables, Comicsblog et Les Toiles Héroïques. 2 médias qui prennent le temps de vérifier leurs sources et dont la priorité est de partager de vraies infos avec les passionnés. Mais d’autres cèdent rapidement à la tentation du merchandising dans cette société de surconsommation, et s’intéressent davantage aux clicks qu’à la vérité… Arno Kikoo nous livre une très belle réflexion et enquête sur ces pratiques qui polluent quotidiennement les réseaux sociaux. Il s’appuient sur l’excellent travail de Pierre Chanliau, (le p’tit gars juste en bas ^^) éditeur sur MCUExchange, qui a pris le temps de recenser les news annuelles d’un de ces média aux moeurs légères… Les résultats sont assez éloquents et permettent une analyse frontale de ce problème majeur. Je vous laisse découvrir tout ça en cliquant juste ici! ^^

 

C’est le 4 novembre que débarquera Eternals, la méga-production Marvel qui ira encore plus loin dans le cosmique! J’avais déjà partagé un visuel dévoilant un Céleste observant la Terre, cette fois il est de bien meilleure qualité! Cette vision gigantesque promet de redéfinir fondamentalement les bases de l’univers Marvel, et le pari est à la fois très risqué et très attractif!

 

Coup dur pour Doctor Strange and the Multiverse of Madness, puisque le réalisateur Scott Derrickson quitte le projet, qui devait être tourné d’ici une petite année… Sous l’argument des différends créatifs peuvent se cacher toutes les raisons du monde, et on n’apprendra probablement pas la vérité avant la fin de l’exploitation du film… Il va falloir toutefois aller très vite pour trouver un remplaçant au metteur en scène qui avait déjà oeuvré sur le premier Doctor Strange!

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Le clip de la semaine : The Young Gods – Figure sans Nom

The Young Gods est un groupe mythique de la scène électro, qui a acquis une solide réputation dès leurs débuts dans les années 80. Leur approche progressive permet de construire des morceaux véritablement envoûtants, et vivre un concert live doit être un moment fabuleux!

Avec Franz Treichler au chant, à la guitare et au sampler, Cesare Pizzi au sampler, et Bernard Trontin à la batterie, le groupe suisse a une reconnaissance internationale largement méritée, et leur discographie regorge d’excellentes surprises. Je vous laisse découvrir cette sublime Figure sans Nom, et vous invite à découvrir davantage ces Young Gods!

 

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The Invitation (Karyn Kusama, 2015)

Karyn Kusama avait eu un démarrage indé assez enthousiaste de la part des critiques avec Girlfight en 2000, avant de se faire lyncher pour ses Æon Flux (2005) et Jennifer’s Body (2009). Pour ma part, j’avais trouvé Girlfight et Jennifer’s Body sympas, sans plus. Du coup je ne me suis pas attardé sur le reste de sa filmo, avec The Invitation en 2015 et Destroyer en 2018. Cette séance de rattrapage pour son 4ème long a été sacrément bénéfique, me laissant découvrir une oeuvre résolument surprenante et qui m’a laissé sans voix!

Tout commence par un dîner mondain des plus classiques, entre une poignée d’amis qui ne se sont pas vus depuis 2 ans. On sent quelques réticences de la part de certains, une convivialité enjouée de la part d’autres, et un sentiment diffus de gêne qui ne s’exprime pas. On se dit qu’en temps normal, la glace prend un peu de temps à être brisée, mais ici ça commence à geler de plus en plus, sans que l’on parvienne à en déterminer les raisons. Il va s’agir de détails fugaces, comme une porte fermée à clé, une personne surprise dans l’entrebâillement d’une porte, un discours qui semble un peu trop calculé… On a l’impression de se retrouver en mode Cluedo mais en se demandant pourquoi les hôtes ont organisé cette réception d’amis perdus de vue.

Plusieurs facteurs participent activement à la réussite totale de ce long métrage. Pour commencer, l’écriture au cordeau assurée par Phil Hay et Matt Manfredi, qui travaillent ensemble depuis une vingtaine d’années, et qui ont déjà co-écrit Æon Flux, ce The Invitation et Destroyer pour Kusama. La précision impressionnante et la rigueur exemplaire de leur script en fait un modèle du genre, offrant à ce huis-clos une intensité étonnante. L’évolution du récit se fait de manière très progressive en jouant avec les sensations du spectateur et les intentions des personnages, ce qui s’avère au final à la fois ludique et ultra-crispant! Il y a autant de lectures différentes que de protagonistes, et on est constamment sur le fil en se demandant s’il y a une vraie noirceur ou s’il s’agit au contraire d’une parano exacerbée. En cela, la réussite du duo est magistrale!

La mise en scène de Kusama ensuite, qui va s’appliquer à coller au plus près du script de Hay et Manfredi, en lui offrant un écrin faussement clinquant dans cette maison huppée de Los Angeles, juchée sur une colline proche du célèbre panneau Hollywood, et où règne un calme qui ne semble pas si serein que ça. L’habileté avec laquelle la réalisatrice gère sa chorale de personnages est là aussi étonnante, car tout semble couler naturellement tandis que l’intrigue avance tranquillement. Elle joue très efficacement avec les interactions entre les personnages, nous questionnant à plusieurs reprises sur les agissements de certains, créant des doutes, les levant, les faisant à nouveau planer… Le mélange des émotions successives est savamment géré, d’autant plus que les apparences semblent très fragiles…

Les acteurs ensuite, qui s’insèrent tous parfaitement dans cette étrange réunion. Logan Marshall-Green en premier lieu, avec son rôle mutique qui laisse influer une certaine rage intérieure. Ce clone de Tom Hardy est un excellent acteur, je vous l’avais déjà signalé lors de ma vision du très bon Upgrade de Leigh Whannell (il a également joué dans Prometheus, mais personne n’est parfait). Sa façon de suggérer ses tourments intérieurs tout en gardant cette apparence de calme en fait un personnage complexe et très intéressant. L’excellent Michiel Huismans, vu dans Game of Thrones, 2:22 ou The Haunting of Hill House apporte une suffisance et une compassion exaspérante à son personnage, et il est secondé par une Tammy Blanchard (Raisons d’Etat) qui semble projeter une empathie forcée envers ses invités. Le reste du casting se cale sur les acteurs principaux pour complexifier l’ensemble, et pour perdre peu à peu le spectateur dans ses conjectures.

On va découvrir des pans du passé de certains personnages, on va en apprendre davantage sur leur présent, et on va tenter de lier le tout pour comprendre pourquoi il s’est passé 2 ans avant qu’ils se revoient. D’autres protagonistes se sont ajoutés à la liste depuis, sans que l’on connaisse leur nature véritable, mais l’avancée de la soirée, entre déclarations de vérité et tentatives de faire entendre son point de vue aux autres, va passer de moments ludiques à des instants bien tendus, avant de se calmer pour mieux repartir ensuite. Le jeu où chacun doit dire ce qu’il veut, les révélations sur ce que certains ont fait durant ces 2 années, l’attente face à un retard, le stress qui monte quand on ne comprend pas trop où veut en venir son interlocuteur… Il y a une précision chirurgicale dans la montée progressive des tensions, et The Invitation est une oeuvre maîtresse du genre! J’adore quand un film parvient à me balader sans que je parvienne à en saisir tous les tenants et aboutissants avant la toute fin, et quand tout concorde pour en faire une réussite totale! The Invitation est un film très marquant, et dont l’aura perdure bien après sa vision!

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Play (Anthony Marciano, 2019)

Cette année, j’ai pris la décision d’être un peu plus ouvert culturellement parlant, de prendre des risques en tentant quelques films que je ne serais pas allé voir normalement, de me fier aux divers avis lus et entendus un peu partout. Ce Play, je ne serai jamais allé le voir si je n’avais pas lu quantité d’avis positifs et de critiques enthousiastes, et j’ai donc décidé de tenter l’expérience, surtout que le sujet pouvait s’avérer intéressant et provoquer de belles émotions!

On est le 6, et je pense que je vais annuler ma bonne résolution. Je ne pense pas être insensible, mais en découvrant ce film, je n’ai tout simplement pas compris ce que les gens ont pu y trouver… Le point de départ de Max qui remate toutes les vidéos qu’il a tourné depuis son enfance, avec comme idée de jouer sur la nostalgie des spectateurs et sur la notion du temps qui passe, je dis OK, le principe est bien cool et peut ouvrir sur de belles histoires. Mais se taper toutes les soirées dansantes des djeun’s (dans la chambre musique à fond, en boîte de nuit, en vacances, à la fête de la musique, etc…), ça fait très répétitif quand même… On assiste donc à une succession de clichés, qui pris indépendamment peuvent faire sourire, mais qui mis bout à bout semblent réellement interminables… Le principe de ces tranches de vie est qu’elles n’intéressent au final que ceux qui les ont vécues, et Anthony Marciano ne parvient pas à nous y intéresser… En tout cas pas moi malheureusement.

Voir l’évolution de ces mômes amenés vers l’âge adulte en passant par la case étudiants, c’est une belle manière de tirer le portrait de toute une génération au final. Mais ce n’est pas en plaçant judicieusement une veste en jeans avec Metallica dessus, une réplique de Fight Club ou des posters de films 90’s que l’on va intéresser le spectateur à ce qui se passe. Du coup, on suit ce film de manière très (trop) distanciée comme une succession de saynètes sans grand intérêt, dont la multiplication dessert au final le propos. L’aspect nostalgique, la prise de conscience du temps qui s’écoule inexorablement, la tragi-comédie de l’existence humaine sont à peine frôlés, et ce simplement vers la fin du film. Il y a quelque chose de mécanique dans la construction de ce film, qui empêche l’émotion de percer.

Anthony Marciano n’en est pas à son coup d’essai, puisqu’il réalise ici son 3ème long métrage, qu’il a à chaque fois co-écrit avec Max Boublil, et dans lesquels le comédien joue toujours. Les Gamins, Robin des Bois, la véritable Histoire et donc aujourd’hui ce Play. Je ne connaissais pas cet acteur, mais il ne m’a pas franchement touché dans ce film. On suit cette bande de potes avec plus ou moins de détachement selon les scènes, et on arrive en bout de course à une conclusion tellement attendue mais qui génère au moins un minimum d’empathie et d’émotion. Mais attendre la fin d’un film pour qu’il se passe quelque chose n’est pas un signe de réussite… On pourra se consoler avec un beau travail de reconstitution des années 90, la présence en guest du toujours efficace Alain Chabat, et une bande-son pour les nostalgiques. Ah oui, et la séquence avec les flics, c’est la meilleure du film selon moi! ^^

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