L’une des séries les plus attendues de 2023 vient de s’achever après 9 épisodes, alors que l’on avait déjà appris il y a quelques semaines qu’une seconde saison verrait le jour. L’aura autour du jeu vidéo a fait monter la hype à un très haut niveau pour cette adaptation, et la tâche a été très délicate pour Neil Druckmann et Craig Mazin afin de transposer les aventures d’Ellie et Joel à l’écran. Il fallait éviter de simplement faire un copier-coller de ce survival apocalyptique, développer des zones parfois inexplorées dans le jeu, tout en recréant des séquences incontournables chères aux gamers. Cela demandait un numéro d’équilibriste des plus ardus, et on va donc découvrir si cette saison 1 tient l’ensemble de ses promesses.
Comme nous ne sommes pas sur une diffusion à la Netflix avec tout le package d’un seul coup, mais que l’on a suivi le parcours de Joel et Ellie sur 9 semaines, cette critique ne se privera pas de spoiler, donc si vous n’avez pas encore regardé l’ensemble des épisodes, passez votre chemin et revenez plus tard ^^ Je ne reviendrai pas sur le fait que The Last of Us 1er du nom est un chef-d’oeuvre absolu selon moi, et que je craignais tout autant que j’attendais avec impatience cette adaptation par HBO. Quand on a un objet vidéoludique aussi parfait cinématographiquement et émotionnellement, il est légitime d’être un tant soi peu craintif quant au résultat final d’une telle transposition. La toute première annonce concernant les showrunners avait alors eu un effet très rassurant, puisque Neil Druckmann est l’un des architectes de la saga vidéoludique (il en est producteur, scénariste et co-réalisateur avec Bruce Straley), et que l’on doit à Craig Mazin l’impressionnante mini-série Chernobyl (dont il était showrunner et scénariste). La réunion de 2 hommes ayant prouvé leur gestion d’un concept de blockbuster de manière très intimiste…
Ce sont davantage les annonces de casting qui ont laissé émerger le doute, avec une Bella Ramsey qui ne semblait pas correspondre du tout au personnage d’Ellie, ni Pedro Pascal à celui de Joel. Il fallait laisser le bénéfice du doute et patienter jusqu’aux premiers épisodes afin de pouvoir se faire une opinion… Ma critique va suivre l’évolution des épisodes, et comme expliqué plus haut, elle ne se gênera pas pour spoiler, donc vous êtes doublement prévenus ^^
J’ai regardé le 1er épisode en 2 fois, ayant éteint ma télé au bout d’une heure… Ce que j’avais vu ne m’avait franchement pas donné envie de poursuivre, et la déception était à la hauteur de mes espérances. J’y avais vu un copier-coller certes bien filmé et bénéficiant de quelques effets spectaculaires, grâce à une production généreuse, mais l’intensité du jeu vidéo était telle que cette introduction n’arrivait clairement pas à la hauteur de son modèle. C’était certes beau mais trop mécanique, sans capacité à générer une réelle empathie et émotion. Le soir même, je me suis quand même regardé les 20 dernières minutes histoire d’au moins finir l’épisode, et la scène de fin m’a laissé percevoir un léger espoir quant à la suite… Mais clairement, ce premier épisode n’était pas à la hauteur…
Après avoir découvert des Joel et Ellie sans grande envergure, le second épisode nous en montre un peu plus sur ce monde post-apocalyptique, avec surtout une scène bien stressante avec des Claqueurs. On se dit alors qu’il peut y avoir un certain potentiel sur la durée, si le développement est à l’avenant. Je n’arrivais toujours pas à accrocher aux personnages principaux, qui selon moi ne représentaient pas les Joel et Ellie du jeu… Et puis arrive l’épisode 3, qui est certainement le plus clivant avec son décrochement de la temporalité et son évocation inattendue d’une romance. Le virage est très surprenant, et cela fonctionne à merveille car on est touché en plein coeur sans avoir été prévenu! L’épisode va narrer l’existence sur plusieurs décennies de 2 hommes qui vont se découvrir et vivre ensemble dans leur coin isolé, et ce récit est tout simplement bouleversant. On est tellement loin du matracage woke habituel, que ça fait du bien de voir un tel niveau d’écriture dans l’élaboration d’une histoire d’amour aussi belle, qui se nourrit de l’ensemble des petits détails disséminés ça et là. Il s’agit sans conteste de l’un des épisodes les plus marquants de cette saison 1, et les prestations de Nick Offerman (qui excellait déjà il y a 3 ans dans Devs!) et Murray Bartlett sont exemplaires!
Les épisodes suivants vont revenir sur Joel et Ellie, en mettant l’accent sur leur relation balbutiante, entre méfiance et légers signes d’affection. Le travail d’écriture est exemplaire, avec des dialogues emplis d’une émotion latente donnant peu à peu chair aux personnages. On commence à sincèrement apprécier cette version de Joel et Ellie, même si elle ne correspond pas totalement à celle des jeux vidéos. Ces épisodes 4, 5 et 6 donnent envie de poursuivre l’aventure, entre introspections captivantes et quelques morceaux de bravoure visuels! On a notamment droit à la séquence de sniper de Joel, qui a dû concentrer une bonne partie du budget en effets spéciaux ^^ C’est sacrément tendu et ça fait plaisir de retrouver l’âme du jeu! Globalement, on a une évocation impressionnante des villes effondrées (ce qui constituait l’un des atouts majeurs du jeu) et des décors somptueux. On a véritablement l’impression de replonger dans le jeu et de s’immerger une nouvelle fois dans ces environnements dangereux et beaux à la fois… La partition musicale est signée par l’Argentin Gustavo Santaolalla, qui était le compositeur principal de l’ensemble de la saga vidéoludique. On retrouve donc avec un très grand plaisir ses sonorités si reconnaissables, avec bien évidemment la guitare tenant une place de choix.
L’un des aspects les plus réussis du jeu et de cette 1ère saison, c’est de ne pas avoir une vision tranchée entre le Bien et le Mal, et de découvrir des personnages évoluant à la frontière au vu des circonstances. Cet aspect est essentiel dans l’avancée de la dramaturgie et dans le développement de personnages forts, puisque les notions de culpabilité et de rédemption sont souvent exposées. Chacun doit vivre avec sa part d’ombres et soit les propager sur ceux qu’ils vont croiser, soit parvenir à les contenir grâce à une certaine luminosité gagnée lors des relations… Il y a une portée philosophique et/ou métaphysique à de nombreux moments, et ça fait un bien fou d’avoir une qualité d’écriture supérieure à la moyenne!
Les 3 derniers épisodes ne vont pas parvenir à maintenir le niveau aussi haut… Avec un Left Behind en passage obligé, on revient une fois encore sur un épisode traitant du passé, en se focalisant cette fois-ci sur l’amitié/amour entre Ellie et Riley. Mais en terme de romance, l’épisode 3 avait déjà donné le meilleur, et on est ici très loin du compte au niveau émotionnel, avec un récit qui copie-colle sans prendre de véritable hauteur par rapport au matériau de base. Le décor du centre commercial est franchement classe, et on ne s’ennuie pas, mais l’ensemble est bien plus convenu que ce que l’on avait pu avoir précédemment. L’épisode avec David et sa communauté s’appesantit lui aussi sur une figure bien moins travaillée que dans le jeu vidéo, et on a l’impression de se retrouver face à un pervers issu de la série Dexter… Même si à chacun de ses épisodes, il y a toutefois assez d’éléments pour que l’on ait encore envie de poursuivre le visionnage… Au détour d’un personnage, d’un dialogue ou d’une situation qui va redonner un peu de vie ou d’émotion, on souhaite donc continuer et découvrir comment tout cela va s’achever…
L’épisode final est presque anecdotique tant il suit le schéma initial sans trop s’en éloigner. Ce n’est pas l’intro qui rappelle une séquence bien faiblarde de Sans un Bruit qui va rehausser le niveau… Arrivé au bout de ces 9 épisodes, le sentiment est étrange, car on a apprécié cette traversée et la nouvelle plongée dans cet univers riche et surprenant, mais on reste aussi sur notre fin par certains aspects… Au niveau des infectés bien sûr, qui ont pas mal brillé par leur peu de temps de présence… Ce qui est bien dommage puisqu’ils ont permis de générer des séquences bien stressantes et que le travail sur les effets spéciaux et les maquillages sont vraiment réussis! C’est donc assez frustrant de ne pas avoir eu davantage d’interactions avec les Claqueurs et autres grosses bestioles, surtout que cette adaptation a fait l’impasse sur plusieurs moments-clés qui présentaient des ennemis bien badass!
Mais la qualité d’écriture est bien présente, on ressent une émotion palpable à de nombreux moments, et la mise en scène répartie entre 7 réalisateurs possède une belle homogénéité et une profondeur rejoignant l’univers du jeu. On se retrouve donc avec une première saison qui s’est découvert avec plaisir, même si on aurait apprécié qu’elle aille encore plus loin. Pedro Pascal et Bella Ramsey sont parvenus à créer une belle alchimie, bien que l’on n’arrive pas à s’ôter de l’esprit qu’il ne s’agit pas des « vrais » Joel et Ellie. Il faut dire que prendre une jeune femme de 19 ans pour jouer une ado de 14 ans, ça fausse déjà pas mal la donne… On va donc maintenant attendre la saison 2, qui reprendra certainement la trame de The Last of Us Part II, laquelle pourrait bien être divisée pour se voir développée avec une saison supplémentaire.