Running Man (Stephen King, 1982)

Après Le Fléau et Marche ou crève, Running Man est le 3ème roman de Stephen King à traiter d’un futur désastreux, et il s’inscrit cette fois dans une veine orwellienne très affirmée. Le fossé entre les classes sociales s’est irrémédiablement creusé, et dans ce monde où les voitures volent et les riches s’extasient devant les jeux, les pauvres sont amenés à être la chair à canon privilégiée… Un constat qui n’est pas sans rappeler Les Chasses du Comte Zaroff, et Stephen King (sous le pseudonyme de Richard Bachman) va nous proposer sa version futuriste de ces fameuses chasses!

Quand on cite Running Man, on pense en premier lieu au film très coloré et fun de Paul Michael Glaser avec Arnold Schwarzenegger! Ce chef-d’oeuvre kitsch (qui se déroule en 2019!) est aux antipodes de ce qu’est le bouquin, qui lui est nettement plus réaliste et sombre. L’adaptation cinématographique n’a conservé que la thématique de départ, pour s’articuler autour des gros bras d’Arnold! Mais n’empêche, ça fait plaisir de le revoir de temps en temps! ^^ Dans le livre, Ben Richards est un être résolument cynique, qui va devoir participer aux jeux afin de sauver la vie de sa petite fille mourante. La vision sociale est on ne peut plus pessimiste, Ben vivant avec sa femme dans un quartier laissé à l’abandon par les politiciens, et son épouse n’hésitant pas à faire quelques passes pour gagner l’argent nécessaire à l’achat des médicaments pour leur fille… Un contexte social résolument glauque qui a été totalement laissé de côté lors de l’élaboration du film!

King nous convie à ce futur dystopique avec un sens de l’écriture aguerri, et ses paragraphes en mode compte à rebours augmentent la tension. Sa vision terne et tragique fait de temps en temps penser à Blade Runner (sorti la même année que ce roman), et on va suivre un homme prêt à tout pour sauver sa fille. Il va être sélectionné pour La grande Traque, le programme-phare de la chaîne unique du pays, dans lequel il va devoir fuir la bande de tueurs lancée à ses trousses. La population a le droit de participer en contactant la chaîne si Ben est aperçu, et l’appât du gain va en motiver plus d’un lorsqu’il va croiser leur route… Ben va devoir faire profil bas, se déguiser, changer de ville afin de semer ses poursuivants, mais il doit envoyer régulièrement des vidéos attestant qu’il est toujours en vie.

Sa froide détermination et son caractère trempé vont en faire un redoutable adversaire, capable de tuer des flics pour sauver sa peau. Les producteurs de l’émission vont se faire un plaisir de le faire passer pour un psychopathe, déformant la réalité pour que le public le haïsse et le dénonce. On est clairement dans une sorte de variation des jeux du cirque, et l’aspect totalitaire est oppressant. King nous convie à une chasse à l’homme anti-spectaculaire, dans laquelle Ben Richards va tenter d’arriver jusqu’au bout afin de sauver sa fille. Il va rencontrer en chemin des personnes prêtes à l’aider, qui vont elles-mêmes prendre de gros risques, et il va peu à peu se rendre compte du caractère symbolique de son action. Alors qu’il court au départ pour sa fille, il va comprendre qu’il lutte pour la classe sociale défavorisée dont il fait partie, face à l’oppression de ceux qui se planquent dans leurs tours d’ivoire tout en se délectant de la mort en suivant leur émission. Ben va tenter de renverser ce système décadent, et la fin est assez étonnante…

Running Man se suit agréablement, sans être toutefois l’un des meilleurs ouvrages de l’auteur. On est dans une sorte de série B qu’il enrichit d’un constat social intéressant, et qui constitue une vision très pessimiste du futur…

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