Quand on voit avec quelle aisance Noah Hawley triture les principes d’écriture, de musicalité, de narration, d’image et bien d’autres, on ne peut que reconnaître sa force de persuasion, sa force de caractère, et applaudir à un tel degré de liberté artistique. Dans un univers parallèle et sur un network différent, il n’aurait jamais été permis à Legion de s’aventurer aussi loin du sentier balisé de la série super-héroïque, et heureusement, c’est FX qui est en charge du programme! Dans un univers alternatif, Legion aurait eu de nombreuses ramifications avec les X-Men de Bryan Singer, et aurait certainement eu un ou deux crossovers avec The Gifted… Dans le genre balisé, cette dernière remplit son office sans prendre de risques. Tandis que Noah Hawley bénéficie chez FX d’une liberté de créativité qui fait totalement rêver!
Cette seconde saison s’avère plus immersive et réussie que la précédente, laquelle brillait le temps d’une poignée d’épisodes sublimes avant d’accuser le coup d’une écriture redondante. Mais visuellement, elle restait magnifique, et Hawley est parvenu cette année à davantage lier le fond et la forme, afin de moins se perdre dans des digressions inutiles. Cela ne signifie pas qu’il n’y a pas quelques scories, et on aurait pu se passer de deux épisodes poussifs… Mais la magie opère davantage car il y a une réelle cohésion structurelle, avec en point central le combat entre David Haller et Amahl Farouk. Après tout, Farouk a passé 30 ans dans la tête de David, à le manipuler et à le faire passer pour fou, il est bien temps que la vengeance se mette en place! La dualité entre ces personnages radicalement différents fonctionne vraiment bien, et le show a trouvé un interprète de choix pour le très vieux mutant en la personne de Navid Negahban, l’acteur iranien transfuge de Homeland. Il endosse le rôle avec une prestance et une solidité impressionnantes, conférant toute la supériorité inhérente à un homme qui se croit au-dessus de l’humanité. Amahl Farouk est à la fois digne, érudit et flippant!
Face à lui, Dan Stevens poursuit sa personnification de David Haller de manière moins dingue que dans la première saison, puisqu’il a été reconnu qu’il n’était pas fou finalement. Au sein de la Division 3, il va tenter de comprendre et maîtriser ses pouvoirs psychiques, et il va pouvoir compter sur l’aide de sa petite amie Syd (Rachel Keller) et de leurs proches. Chaque épisode va cette année encore être l’occasion d’un trip unique, dans lequel on va être immergé d’un bout à l’autre avec pour seul regret d’arriver au générique de fin (sauf pour un ou deux épisodes). Il y a une telle richesse dans l’univers de cette série qu’on se retrouve fasciné par un mec qui a un panier en osier sur la tête (l’amiral Fukyama!) ou un trio de belles femmes à moustaches aux voix discordantes, qui rappellent furieusement la voix de l’ordinateur dans les mythiques Portal et Portal 2! Legion est un trip halluciné qui se déroule dans un univers parallèle aux films X-Men, et qui se permet du coup de s’affranchir totalement de la continuité. Une aubaine pour Noah Hawley qui en profite pleinement, et honnêtement, s’il n’y avait pas noté Marvel à un moment, on ne se douterait même pas qu’on est dans une adaptation de comics!
Hawley nous balade dans des lieux oniriques, avec notamment cet immense désert que David et Amahl parcourent dans une sorte de course contre la montre au ralenti… La Division 3 offre une vision très étrange d’un bâtiment gouvernemental dans lequel plane une certaine angoisse, avec notamment ces messages audio diffusés toute la journée… Et l’utilisation de la musique dans chaque épisode est parfait, avec même quelques passages en mode comédie musicale comme c’était déjà le cas dans la saison 1, et qui offrent un contrepoint absurde achevant de faire de l’ensemble de cette série une proposition unique! Et chaque plan est un régal pour les yeux, donc autant en profiter pleinement!
Pour moi, il n’y a que 2 personnages sans intérêt dans cette série, ce sont Melanie Bird et Oliver Bird. C’est justement quand le show s’intéresse davantage à eux qu’il perd en puissance, et lorsqu’il les remet de côté qu’il revient en force. Et on peut dire que cette saison a bien gagné niveau puissance, surtout quand on arrive à l’épisode final, qui là encore est d’une inventivité et d’une folie créative qui font bien plaisir! Je ne spoilerai évidemment pas, ce qui ne me permettra pas du coup de développer les idées mises en place par Noah Hawley, mais les qualités narratives et dramatiques du show sont incontestables! On en ressort très perturbé, et avec l’impression d’avoir assisté à quelque chose de très spécial, et c’est vraiment un gage de qualité pour le travail d’Hawley et de toute l’équipe! Et au vu de ce final, heureusement qu’on avait appris récemment qu’une saison 3 avait été signée! Malgré des audiences très faibles, cette série mérite de continuer, et j’espère que son succès critique lui permettra de se diffuser de plus en plus largement. En tout cas, la saison 3 risque bien d’être la plus passionnante!!!