C’est en août 1985 que Légion fait sa première apparition, dans le comics Les Nouveaux Mutants 25. Il est créé par le légendaire scénariste Chris Claremont, à qui l’on doit certaines sagas parmi les plus mythiques des X-Men, et par le dessinateur Bill Sienkiewicz. Personnage secondaire de la Maison des Idées, il possède toutefois des aptitudes psychiques très importantes, ce qui est normal puisque son père est un certain Professeur Xavier! Diagnostiqué comme schizophrène, il recèle de multiples personnalités qui lui confèrent chacune des pouvoirs différents, faisant de lui l’un des Mutants les plus puissants de la planète…
La mise en chantier d’une série sur un personnage tout de même mineur du Marvelverse suscitait une simple curiosité, puis l’annonce de l’excellent Dan Stevens dans le rôle-titre a fait grimper l’attente de plusieurs degrés. La Fox, pour qui il s’agit de la première série estampillée Marvel, avait annoncé un show se déroulant dans une autre continuité que celle des films X-Men, laissant carte blanche au showrunner Noah Hawley, le créateur de Fargo. Dans un monde où seul le gouvernement est au courant de l’existence des Mutants, Légion (qui n’est jamais appelé par ce nom, mais uniquement par son nom civil David Haller) va être traqué par la Division 3, qui souhaite comprendre à quel point il peut être dangereux.
Rarement un premier épisode aura été aussi inventif, loufoque et novateur, et cette rencontre initiale avec David Haller est tout simplement sublime! La mise en scène est démentielle, le travail sonore tout autant, les choix musicaux claquent, et les acteurs sont habités! Il n’y a strictement rien à jeter dans ce début incroyable, qui est une sorte de série d’auteur au potentiel sacrément redoutable! David étant sous traitement dans un hôpital psychiatrique, on se retrouve dans un récit d’une magnifique complexité, qui va évoquer le passé et le présent dans un maelstrom visuel et sonore de toute beauté, en y mêlant émotion et humour avec un talent fou! Les épisodes s’enchaînent, avec toujours cette imagination narrative débordante, et on se dit qu’on tient là un pur joyau, qui se démarque totalement des autres séries (ou films) traitant de super-héros! Mais après une poignée d’épisodes (4 en gros, la moitié de la saison), on commence à se dire que c’est toujours super beau, mais que ça tourne un peu en rond… Et cette sensation ne va plus nous lâcher jusqu’à l’épisode final, faisant de Legion une sorte de rollercoaster se terminant négativement…
Il y a de temps en temps des séries qui se paient des débuts juste parfaits, et qui se vautrent par la suite. C’est le cas aussi de Dirk Gently’s holistic Detective Agency, que j’ai découverte récemment, et dont le premier épisode figure parmi les trucs les plus dingues et hallucinants que j’ai pu voir! Mais la suite fait nettement baisser le régime, et c’est sacrément dommage au vu de la folie initiale! Pour Legion, même constat, Noah Hawley ayant joué la carte atypique de manière finalement trop appuyée, jusqu’à faire que la forme prenne largement le pas sur le fond, ce dernier étant répétitif à mort… Du coup, on a une série qui est magnifique dans sa 1ère moitié, qui passe par juste sympathique, et qui termine par devenir trop poussive… Ca fait vraiment mal de voir ce schéma dégressif, mais franchement, il y a un moment où les intrigues doivent évoluer, et là on stagne clairement toujours sur la même ligne.
Dan Stevens, qui était absolument génial dans le sublime The Guest (et qui est actuellement à poils dans La Belle et la Bête), offre une belle complexité à David Haller, et en fait un personnage très intéressant. Mais il est pris dans une spirale narrative qui amoindrit l’intérêt du héros au fil des épisodes, et doit se débrouiller avec cet état de fait… Rachel Keller, qui jouait, tiens, dans Fargo, campe une Syd très attachante, à la fois fragile et forte, et apporte un contrepoint intéressant à David. Son pouvoir est très particulier, et s’avère très inhibant pour elle. Aubrey Plaza (Parks and Recreation) joue une résidente de l’hôpital bien givrée, et elle se lâche dans ce rôle bien barge! On a ensuite toute une galerie de personnages secondaires, plus ou moins intéressants, dont certains possèdent des facultés particulières. L’identité du bad guy est à ce titre originale, et sa nature également.
Mais malgré toute la virtuosité qui est mise en oeuvre dans chacun des plans de ces 8 épisodes, c’est tellement dommage de voir le show s’étioler à cause d’un récit qui ne parvient pas à se renouveler! L’ambition de Noah Hawley est totalement visible, et il met vraiment tout son coeur dans cette création! Mais à force de rester trop centré sur tout ce qui se passe dans la tête de David (avec des scènes franchement inventives), il perd des spectateurs au fil des épisodes… Un mix plus équilibré entre récit d’auteur et action aurait été une pure merveille, mais en l’état, le puissant impact du début se perd malheureusement, et fait qu’on reste au final sur une série juste sympathique. Dont on a du mal à terminer les 3 derniers épisodes, malgré le bad guy… Suite à son succès critique, Legion a été renouvelée pour une seconde saison. On va croiser les doigts pour qu’elle conserve tous ses atouts et répare ses faiblesses… Ah oui, n’oubliez pas la scène post-générique si jamais! 😉