Après avoir découvert l’éprouvant Incendies de Denis Villeneuve, j’ai voulu explorer son oeuvre, et c’est ainsi que j’ai pu me procurer Polytechnique, qu’il avait réalisé un an avant. Si Incendies m’avait mis une grosse claque (voir la trace), Polytechnique m’en a mis une deuxième… Il semblerait bien que Denis Villeneuve soit l’un des metteurs en scène les plus talentueux en activité!
Sous un titre paraissant anecdotique, se cache l’évocation d’un fait divers survenu au Québec il y a plus de 20 ans. Le 6 décembre 1989, Marc Lépine, un jeune homme de 25 ans, se rend à l’Ecole Polytechnique de Montréal avec un fusil d’assaut et fait un carnage. Denis Villeneuve va traiter ce sujet toujours sensible (le film s’est fait avec de nombreuses critiques et polémiques) avec une sensibilité étonnante doublée d’une vision frontale de l’horreur. C’est simple, vous pouvez oublier le très surestimé Elephant, et plonger dans le noir et blanc captivant de Villeneuve!
Polytechnique est un voyage vers le Mal et la mort, filmé avec une grâce incroyable par Villeneuve, qui parvient à créer une sensation d’apesanteur à travers laquelle filtre une poésie tragique. C’est cet élément que je pensais trouver à l’époque d’Elephant, et qui lui faisait cruellement défaut. Cette vision directe et pourtant empreinte d’une substance bien plus riche que celle d’une simple démonstration. Villeneuve ne rapporte pas des faits, il nous fait vivre des instants, collant au plus près de ces étudiants apeurés, rendant palpables l’angoisse, la douleur et la mort.
Loin d’être clinique, Polytechnique est avant tout humain, captant davantage les gestes et les regards que les impacts de balle. Qu’il s’agisse du tueur ou des victimes, la vision est similaire et développe presque un aspect sociologique en ne portant aucun jugement. Les raisons de l’acte impardonnable de Marc Lépine sont données, puisqu’il a laissé une lettre derrière lui. Dans cet immense bâtiment scolaire, il sème la terreur parmi ses semblables, auxquels il se soustrait volontairement. Maxim Gaudette parvient à faire ressortir un côté encore humain au personnage du tueur (qui n’est pas nommé dans le film), mais dont les quelques traces ressemblent à des derniers spasmes… Sa composition est remarquable, et Villeneuve s’avère également un excellent directeur d’acteurs.
Sébastien Huberdeau, Karine Vanasse et Evelyne Brochu apportent à ce film toute leur fragilité et leur justesse, s’imprégnant de l’atmosphère tragique et dense créée par Villeneuve. Le travail sur le son, sur la lumière, sur les cadrages, il n’a rien laissé au hasard et a composé une oeuvre où la beauté se mêle à la violence. Un très grand film, injustement méconnu, et qui ne laisse pas indemne.
Comment t’as chopé ça, j’ai toujours eu envie de le voir, d’autant plus maintenant.
Officiellement ou officieusement? 😉 C’est un film véritablement surprenant et qui mérite d’être découvert! Si tu as apprécié Incendies, tu connais les capacités du bonhomme!