We own this City saison 1 (2022)

20 ans après avoir créé la série Sur Ecoute, considérée par beaucoup comme l’une des meilleures productions télévisuelles, David Simon nous livre aujourd’hui un récit passionnant avec cette mini-série en 6 épisodes. Je suis passé à côté de Sur Ecoute à l’époque, mais je peux comprendre son classement au vu des qualités ressortant de son travail sur We own this City. En plongeant dans le quotidien de cette unité de police de Baltimore, on va découvrir un monde âpre, violent et cynique. D’entrée de jeu, avec cette introduction lors de laquelle Jon Bernthal est impérial en prônant les valeurs de son unité, on sent qu’on ne se retrouve pas devant le tout-venant de la petite lucarne… Cette séquence pose des bases très importantes et démontre à quel point les apparences masquent une réalité intensément trouble, et l’aura du personnage de Wayne Jenkins est magnifiée par la prestation encore une fois exceptionnelle de Bernthal. Ce qui caractérise Jon Bernthal à chacun de ses rôles, c’est son intensité, et là il nous offre encore une prestation impressionnante, avec son jeu sur la gestuelle du perso et son regard qui ne vous lâche plus. Arrogant, ambitieux, fraternel, animal, la façon dont il joue Wayne Jenkins est composée de toutes ces facettes qu’il va intensifier de manière instinctive, pour composer un nouveau personnage captivant dans sa filmographie.

Je reviens rapidement sur la production de la série, avec donc David Simon qui est le co-créateur aux côtés de George Pelecanos, qui était notamment scénariste et producteur sur une poignée d’épisodes de Sur Ecoute. Les 2 hommes se connaissent bien puisqu’ils ont encore collaboré sur Treme et The Deuce (en co-créant cette dernière). Je ne peux me baser que sur mon ressenti par rapport à We own this City, mais quand on analyse la densité, le sens narratif et la gestion des personnages, on ne peut qu’être admiratif devant les qualités de conteurs des 2 hommes, qui puisent dans une triste réalité pour nous offrir une série d’exception. Parce qu’il faut quand même que je vous précise une chose que je n’ai découverte qu’à l’épisode 4, c’est que ce récit est tiré d’une histoire vraie! ^^ Il ne s’agit pas d’un spoil, donc je me permets de vous l’indiquer ici ^^ Ce qui m’apparaissait comme une excellente intrigue policière a soudainement pris encore plus de poids avec la réalité des faits présentés, et tout le talent narratif du duo et de leur équipe fait que l’on est immergé en plein coeur d’un gros scandale judiciaire de la manière la plus documentée et immersive possible.

L’équipe est clairement aidée par le metteur en scène Reinaldo Marcus Green (La Méthode Williams), qui apporte une densité marquante au scénario, en mettant en avant l’atmosphère de cette ville de Baltimore. Sa manière de filmer les rues et ses personnages pris dans la tourmente offre une dimension supplémentaire au récit, et on est happé par ces multiples existences corrompues par le pouvoir et par la ville elle-même. On sent qu’un idéal existait à un moment donné, mais qu’il a été balayé par une réalité plus crue et moins noble du métier de policier, et l’éclairage politique et financier apporté par les auteurs vient encore donner davantage de crédibilité à cet ensemble. L’analyse du point de vue des défenseurs des droits civiques amène également beaucoup d’intérêt, renvoyant sans le vouloir à l’excellent documentaire 13th signé Ava DuVernay. Le traitement du racisme est évoqué frontalement, avec son lot d’arrestations arbitraires, et surtout avec des figures problématiques connues de la police elle-même… A ce titre, l’acteur Josh Charles est excellent dans le rôle de Daniel Hersl, un flic ouvertement raciste qui n’hésite pas à abuser de son statut et de son pouvoir. La manière dont il compose Hersl est impressionnante de suffisance et d’auto-satisfaction, et il parvient à créer un personnage détestable à souhait!

On sent qu’il y a eu une vraie émulation lors de la création de cette série, à chaque strate de sa production. Aux côtés de l’impérial Bernthal, on a toute une galerie de personnages principaux et secondaires se fondant dans l’ensemble de manière très efficace, chacun composant un des rouages essentiels de cet ensemble. Dans ce type de séries aux multiples personnages, on en a souvent  dont l’écriture est inférieur, mais ici, chacun possède son intérêt et brille à un certain moment. Wunmi Mosaku (elle a joué dans Loki!) campe Nicole Steele, une avocate idéaliste spécialisée dans les droits civiques, qui va être confrontée à une réalité très difficile dans son combat pour la minorité afro-américaine. Elle apporte elle aussi beaucoup de subtilité à son personnage, et ses diverses rencontres avec les différents acteurs de la ville s’avèrent très intéressantes. Kevin Davis fait partie des personnages que j’ai le plus apprécié également, ce préfet de police devant faire avec une marge de manoeuvre des plus limitées, lui qui tente de modifier le cours des choses en n’ayant aucun soutien de la mairie. Son personnage permet de démontrer toute l’absurdité d’une position tributaire de choix politiques catastrophiques, et il n’est au final qu’un bouc émissaire que l’on pourra dégager le moment venu…

Je vous ai déjà parlé de Jon Bernthal? ^^ C’est assez drôle de le voir incarner tout ce qu’il combattait lorsqu’il revêtait le costume du Punisher! 😉 S’il était intense dans le rôle de Frank Castle, il l’est tout autant après avoir franchi la ligne jaune, avec ce personnage tortueux de Wayne Jenkins. Dans cette unité chargé de la lutte anti-drogue et armes à feu, on va découvrir un certain esprit fraternel qui peut pousser les individus à aller trop loin… Je vous conseille vivement ces 6 épisodes reflétant toute la noirceur de l’âme humaine, tandis que certains luttent pour encore y croire… Encore un gros coup de la part d’HBO! 😉

Ce contenu a été publié dans Série. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *