Anatomie de l’Horreur (Stephen King, 1981)

En 1981, cela faisait presque 10 ans que Stephen King avait émergé comme étant l’un des auteurs horrifiques les plus côtés, et sa réputation n’allait que grimper encore exponentiellement. Son premier roman, Carrie, avait été un immense succès dès sa sortie en 1974, et chacun de ses ouvrages suivant (excepté ceux publiés sous le pseudonyme de Richard Bachman) rencontrait également le succès. L’auteur avait atteint une telle renommée, qu’il était dès lors légitime qu’il puisse donner son point de vue sur le genre horrifique dans son ensemble. C’est l’idée que lui a suggéré Bill Thompson, l’éditeur ayant publié ses 5 premiers romans lorsqu’il travaillait pour la maison Doubleday. Il lui a proposé de rédiger un essai ambitieux qui représenterait un tour d’horizon du genre horrifique à travers les divers médias où il s’exprime, qu’il s’agisse de littérature, de cinéma, de séries, d’émissions radiophoniques…

King a été rapidement emballé par l’idée, qui lui permettrait d’éclaircir une bonne fois pour toutes de nombreuses questions qu’on lui posait souvent, tel « Pourquoi vous écrivez des bouquins d’horreur? » ou « Pourquoi les gens payent-ils pour avoir peur? ». Après avoir préalablement donné son point de vue lors de diverses conférences ou quelques courts essais (notamment sa belle intro de Danse Macabre), il pourrait enfin s’exprimer totalement et définitivement sur le sujet, en brassant toutes les thématiques du genre et en analysant l’ensemble de ses composantes. C’est ainsi qu’est né cet Anatomie de l’Horreur, paru en 1995 en France, alors qu’il avait été édité en 1981 aux Etats-Unis! Un retard de 14 ans assez inexplicable… Et pour la petite histoire, il ne faut pas confondre cet essai nommé Stephen King’s Danse Macabre en version originale, avec son recueil de nouvelles Danse Macabre paru en 1978, dont le titre original est Night Shift!

Stephen King va donc entamer son tour d’horizon en nous conviant avec beaucoup de nostalgie et d’humour à son enfance et à son adolescence, lorsqu’il découvrait les nombreux romans, films, dramatiques télé et radio qui allaient forger sa passion pour le genre! Son analyse va se faire de manière à la fois structurée et instinctive, sa prose rendant le tout très vivant et bien loin des poncifs barbants et didactiques habituels. Il y met de l’émotion, y glisse des souvenirs, y ajoute une plume entraînante pour nous donner envie de poursuivre cette lecture passionnante qui plonge dans les différents recoins obscurs du genre horrifique. Il va définir ce qu’est un monstre, avec toutes les graduations que cela représente, va analyser des classiques littéraires tels que le Dracula de Bram Stoker ou le Frankenstein de Mary Shelley, mais va aussi nous inviter à découvrir des oeuvres moins connues et pourtant emblématiques du genre, comme le Maison hantée de Shirley Jackson, La Maison d’à Côté d’Anne Rivers Siddons ou le Ghost Story de Peter Straub.

King va nous donner envie de (re)lire des classiques mais également de découvrir des auteurs modernes tout aussi passionnants, et son bouquin est une vraie mine d’or pour les lecteurs! Maison hantée est vraiment excellent, tout comme Les Femmes de Stepford d’Ira Levin, et il y a encore tellement de bouquins à dévorer! Même constat pour le cinéma, puisque cet essai m’a permis de découvrir le méconnu Prophecy – le Monstre de John Frankenheimer, qui s’avère vraiment bon! King va parler de l’influence de films comme L’Exorciste ou La Nuit des Morts vivants, et va aussi traiter d’oeuvres moins connues comme L’Enfant du Diable ou Gog, en revenant aux films de monstres des années 50 comme Des Monstres attaquent la Ville, ou les films de SF du genre Les Soucoupes volantes attaquent (que j’ai du coup revu, et qui est quand même bien ennuyeux passée la découverte gentiment kitsch…).

Son chapitre consacré à la radio est très intéressant, et va nous faire découvrir une époque où les images n’avaient pas encore totalement impacté l’esprit humain. En ce temps, les dramas étaient nombreux sur les ondes, et les auteurs rivalisaient d’ingéniosité pour faire frémir les auditeurs. Inner Sanctum, Dimension X, Suspense et tant d’autres ont fait frissonner dans les années 50, et des auteurs réputés ont participé à ses émissions, à l’image de Ray Bradbury, ou d’Orson Welles lors de sa célèbre émission consacrée à La Guerre des Mondes qui a fait paniquer le pays entier! La suite logique, avec l’avènement de la télévision, sera des anthologies comme La Quatrième Dimension ou Au-delà du Réel!

Anatomie de l’Horreur est un vaste champ de découverte qui va permettre aux lecteurs de mieux cerner les ambitions de l’auteur, et de même comprendre pourquoi on lit ce genre de bouquins! Les explications de King sont simples et finalement très justes : après tout, plonger dans l’horreur et en ressortir indemne, n’est-ce pas une belle manière de se sentir vivant? Je vous invite donc à plonger dans cette oeuvre passionnante et à découvrir des films, des romans, et tout un pan nostalgique qui pourraient bien vous intéresser!

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