Nobody (Ilya Naishuller, 2021)

Je n’attendais pas grand-chose de ce Nobody, étant en froid avec Bob Odenkirk depuis que j’avais vu les premiers épisodes de Better call Saul… Il était tellement génial en second rôle dans Breaking Bad, ce fut une sacrée déception de voir que son personnage ne tenait pas la distance en tant que rôle principal… Du coup, le voir en tête d’affiche d’un film donnait l’impression de se lancer dans un DTV sans âme… Mais si on peut effectivement pencher pour une série B en mode seconde zone, ce Nobody possède toutefois quelques cartouches bien percutantes qui en font un DTV plutôt qualitatif! Et qui se paie même une sortie cinéma au final!

Ilya Naishuller est un metteur en scène russe qui s’est fait une petite réputation avec son Hardcore Henry, gros shoot d’adrénaline à la première personne sorti en 2015. Il est principalement metteur en scène de clip, avec son groupe fétiche Leningrad pour qui il a composé 4 vidéos, et il revient aujourd’hui avec un nouveau film d’action qui aime bien se comparer à John Wick. Il faut dire que le scénario est signé Derek Kolstad, qui a rédigé John Wick, John Wick 2 et John Wick Parabellum (avec 3 autres scénaristes pour ce dernier). Et pour boucler la boucle, Chad Stahelski et David Leitch, les metteurs en scène de la saga (Leitch uniquement en co-réal avec Stahelski sur le 1er) sont producteurs sur ce Nobody. On a donc bien cerné la note d’intention, et on n’est pas ici pour offrir une variation sur Roméo et Juliette.

Vendre le film en le comparant à l’excellent premier opus mené par Keanu Reeves peut s’avérer dangereux, car il va être extrêmement difficile d’atteindre le niveau incroyable de ce chef-d’oeuvre du film d’action. Les suites quant à elles sont nettement plus communes déjà, mais le premier opus fait partie du haut du panier dans le genre. On imagine donc difficilement Bob Odenkirk en mode John Wick, mais il va opter pour un registre plus référentiel et absurde, qui va du coup lui permettre de s’avérer crédible dans ce rôle punchy! Il joue Hutch Mansell, un père de famille sans histoire à la vie plus que monotone, qui va être confronté une nuit à l’intrusion de 2 cambrioleurs. Il ne va pas agir en héros, mais cette situation va le confronter à d’anciens démons, et réveiller des pulsions bien violentes que l’on n’aurait jamais prêté à cet homme sans relief… Ce « nobody » que même son fils ne respecte pas et dont la femme s’est peu à peu éloigné va retrouver goût à son existence avec les suites de cette affaire de cambriolage, et le récit va sévèrement partir en vrille…

Derek Kolstad rédige un script qui va mettre l’accent sur l’aspect fatigué et aigri de cet homme, qui retrouve un but dans une escalade de violence d’autant plus radicale qu’on ne s’attendait pas à le voir exploser de la sorte! La séquence du bus est franchement géniale, avec un côté très réaliste dans le sens où il se prend de sacrés coups dans la tronche également! Il y a une brutalité presque bestiale dans son comportement, et on se rend bien compte qu’il libère toutes les frustrations accumulées depuis des années! On se retrouve donc dans un mélange de série B assez hardcore par moments, et d’humour frisant l’absurde lors de séquences à la limite de la caricature! Mais l’ensemble se maintient plutôt bien, et la générosité en terme de violence fait que ce film rend d’une certaine manière hommage à son aîné John Wick, même s’il n’en atteint pas le niveau.

L’aspect débridé et semi-parodique est clairement représenté par le bad guy russe Yulian, interprété avec beaucoup de motivation par Aleksey Serebryakov. Yulian est un individu capable de chanter (faux) et de trucider un homme la minute d’après, dans la plus pure tradition des méchants de série B! Connie Nielsen joue la femme de Hutch, on a un Michael Ironside méconnaissable, RZA qui vient faire une p’tite apparition… Et on a surtout ce bon vieux Christopher Lloyd en père de Hutch, lui qui sera à jamais Doc Brown!!! Lloyd intègre les séquences les moins crédibles, mais elles fonctionnent sur le capital sympathie pour l’acteur de Retour vers le Futur!

Ilya Naishuller appose une mise en scène inspirée sur son film, qui n’a pas la prétention de venir tutoyer John Wick, mais qui déçoit moins que John Wick 2 et 3 du coup. Il s’avère au final plus surprenant, avec cette capacité à doser le suspense et à créer des effets d’attente avant le déclenchement des hostilités, effet qui participe grandement au côté pastiche réussi! Et Bob Odenkirk possède une classe certaine dans la peau de ce nobody qui a bien plus d’énergie que l’on pourrait croire!!!

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