Hostiles (Scott Cooper, 2017)

La bande-annonce d’Hostiles ne m’avait pas laissé indifférent, avec cette promesse d’un film de toute beauté dans lequel la poésie contemplative se mêlait à la sauvagerie humaine. En traitant du racisme à la fin du 19ème siècle, Scott Cooper revient sur l’une des blessures fondamentales sur laquelle se sont pourtant construits les Etats-Unis. Avec cette citation de D.H. Lawrence en exergue: « L’âme américaine est dure, solitaire, stoïque: c’est une tueuse. Elle n’a pas encore été délayée. », Cooper va nous inviter à un voyage difficile et complexe, à la fois dans l’âme tourmentée de ses personnages, mais aussi dans des territoires tout aussi sauvages… Hostiles va apporter un éclairage intéressant sur le « bien-fondé » de la suprématie blanche au détriment des nations indiennes, en mettant face à face un capitaine d’armée obligé de reconduire un chef Cheyenne dans ses terres.

L’ouverture du film est juste impressionnante, avec cette séquence d’une grande violence qui prend clairement aux tripes. Scott Cooper nous place en plein milieu d’un affrontement sanglant et émotionnellement très difficile, et Rosamund Pike s’avère juste incroyable dans sa prestation! L’actrice vue dans Jack Reacher ou Gone Girl impose le respect avec sa manière de jouer Rosalie Quaid, et elle va certainement arracher des frissons aux spectateurs! Il y a une puissance émotionnelle primale dans son jeu, qui fait que l’on va clairement s’attacher à ce personnage. Christian Bale quant à lui est davantage dans la retenue, et j’avoue ne pas être un grand fan, mais sa composition de Joseph Blocker est correcte. Je ne pouvais cependant pas m’empêcher de me demander ce que ça aurait donné si le rôle avait été donné à Matthew McConaughey! Ouais, ça aurait été quand même plus puissant!^^

Scott Cooper, à qui l’on doit Crazy Heart, Les Brasiers de la Colère ou encore Strictly Criminal, adopte un rythme très lent pour nous conter cette dangereuse traversée à travers les Etats-Unis, en filmant dans les sublimes paysages du Nouveau-Mexique et du Colorado. Sa mise en scène met en avant la beauté de ces contrées, constamment mise en relation avec la nature profonde des hommes qui la traversent. On peut toutefois regretter, malgré la beauté des lieux, une certaine approche un peu trop classique. Au vu de la bande-annonce, on espérait quelques envolées métaphysiques telles qu’Alejandro Gonzalez Innaritu les avait sublimées dans son magnifique The Revenant. Hostiles n’est clairement pas dans la lignée de ce chef-d’oeuvre, mais se pose comme un film contemplatif toutefois intéressant.

On trouve également quelques éléments classiques dans sa progression dramatique, avec des enchaînements de séquences attendues. Cooper s’est attardé sur le script initial de Donald E. Stewart pour en faire ressortir ce mélange de rudesse et d’humanisme, afin de brosser un portrait très nuancé des différentes communautés en présence. Joseph Blocker est un soldat persuadé qu’il faut éradiquer les Peaux-Rouges, et il a face à lui un Wes Studi très digne qui semble avoir une vue d’ensemble bien plus vaste. L’acteur est un habitué des rôles d’Indiens puisqu’on l’a vu dans Danse avec les Loups, Le dernier des Mohicans, Geronimo, Le nouveau Monde… En traitant d’un racisme ancestral pour les Etats-Unis, Scott Cooper nous montre que ce problème reste malheureusement toujours d’actualité…

Cooper apporte un soin particulier à chacun des personnages gravitant autour de Blocker, ce qui va permettre de conserver une solidité au script. Bill Camp, Rory Cochrane, Jesse Plemons, Stephen Lang, Adam Beach, Peter Mullan, Ben Foster… Il y a une poignée d’acteurs talentueux qui font avancer le film dans une direction intéressante, en apportant à la fois un certain humanisme mais également un aspect désespéré… Dans ces territoires hostiles, les ennemis vont devoir se soutenir face aux dangers qui les guettent, et ils vont se rendre compte de la complexité de leurs relations. Le propos n’est certes pas nouveau, et est traité avec soin par un Scott Cooper impliqué. Cependant, le début offre une telle intensité dramatique qu’il est difficile de la retrouver par la suite. En l’état, Hostiles est un film intéressant qui parvient à être crédible et beau, mais on peut malgré tout être déçu par un certain manque d’intensité que l’on était en droit d’attendre au vu de la bande-annonce.

Ce contenu a été publié dans 2010's, Cinéma. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *