Après nous avoir livré en 2013 une relecture impressionnante des origines du Fils de Krypton avec Man of Steel, Zack Snyder s’est vu confier une suite qui voit l’opposition entre les 2 figures majeures de l’univers de DC Comics! Un choc des Titans annoncé à grands renforts de communication, qui a paradoxalement plutôt desservi cette réunion au sommet…
A force de dévoiler tous les éléments de l’intrigue à travers de multiples teasers, bande-annonces, photos de tournage etc…, il ne reste finalement que peu de place à la surprise… Cette communication à outrance est un réel problème contemporain, mais fait partie d’une stratégie marketing toujours accrue qui ne parviendra décidément pas à être subtile… 3 ans après avoir évoqué de manière à la fois puissante et très intimiste l’existence de Superman, Znyder retrouve le scénariste David S. Goyer (qui partageait la paternité du récit avec Christopher Nolan, le réalisateur de Batman begins, The dark Knight: le Chevalier noir et The dark Knight rises). Goyer a travaillé sur ce film avec Chris Terrio, le scénariste d’Argo, et qui travaille sur Justice League: 1ère Partie et Justice League Part two. La volonté de planifier l’univers DC est évidente, et Terrio va donc être le fil conducteur narratif de l’expansion de cet univers.
Alors que Man of Steel offrait une vision très complexe et emplie d’émotions de la figure de Superman, on perd ici tout le crédit apporté au personnage, qui s’avère totalement lisse et creux. Au-delà des événements de la fin de Man of Steel sur lequel va reposer l’opposition entre les 2 surhommes, on a totalement perdu toute ce qui faisait l’intérêt et la complexité du personnage. Superman ne va représenter qu’une idée, celle d’un pouvoir sans limites qui va lancer Batman dans une croisade pleine de vengeance et de fureur. Dès lors, il va être difficile de ne pas prendre parti pour le Chevalier noir, qui va cristalliser la peur de l’humanité face à un pouvoir supérieur. Henry Cavill, qui était très charismatique dans Man of Steel, ne peut pas faire grand-chose avec un personnage sous-développé.
Face à lui, Ben Affleck, qui avait été décrié de très longs mois après avoir obtenu le rôle, s’avère très à l’aise et efficace tant en Bruce Wayne qu’en Batman! L’aspect vieillissant du personnage lorgne du côté du comics Batman: dark knight de Frank Miller, et il s’avère être le personnage le plus intéressant du film. Zack Snyder nous offre à travers lui quelques scènes de combats bien brutes et graphiques, laissant la rage du héros s’exprimer de manière très sombre. On retrouvera également quelques éléments hérités de Christopher Nolan, mais Snyder parvient à maîtriser le personnage et à nous donner sa propre vision. Pour ma part, c’est toujours plus intéressant que la paire Nolan/Christian Bale! Ben Affleck agit en tant que dernier rempart face à un être surpuissant, et son côté torturé justifie une certaine énergie du désespoir.
Si l’opposition entre les 2 surhommes pouvait apparaître comme factice, il n’en est rien, et on comprend aisément les motivations poussant Batman à vouloir tuer Superman! Le film s’ouvre sur une séquence de destruction massive, qui relate celle qui avait lieu à la fin de Man of Steel. On revit le combat de Superman contre le Général Zod, mais du point de vue humain de Bruce Wayne cette fois-ci. Cette scène est très impressionnante, et ses connotations directes avec le 11-Septembre s’avèrent très marquantes. Zack Snyder plonge Wayne dans un chaos total, qui va être déterminant dans sa quête de vengeance.
Aux côtés des héros, on retrouve un certain Lex Luthor! Jesse Eisenberg (Bienvenue à Zombieland, The social Network) se glisse dans la peau du mégalomane psychotique avec une très belle aisance, et nous livre une composition étonnante et totalement désaxée! Il apparaît comme un ennemi complètement dingue, et c’est justement dans cette folie qu’il gagne une certaine crédibilité en tant qu’antagoniste! Eisenberg s’est fait plaisir avec ce rôle, et apporte un certain humour au personnage! Gal Gadot quant à elle nous livre sa vision de Wonder Woman, la célèbre Amazone qui s’avère impressionnante et très puissante! l’actrice vue dans la saga Fast & furious apporte une belle solidité au personnage, elle qui avait aussi été décriée après avoir été choisie pour le rôle. L’excellent Jeremy Irons joue un Alfred au cynisme bienvenu, offrant un contrepoint intéressant face à un Bruce Wayne prêt à tuer pour protéger le monde.
Alors qu’il voulait se poser comme un incontournable pilier offrant les bases d’un univers étendu à venir, Batman v Superman: l’Aube de la Justice ne parvient pas à atteindre le sommet escompté. Il constitue un film d’action certes réussi, et dans lequel on ne s’ennuiera pas, mais il est loin de la puissance d’un Man of Steel. L’opposition entre les 2 figures mythiques offre quelques moments forts, mais c’est principalement à cause d’un traitement édulcoré de Superman que le film perd en force. Et on sent que Snyder est bien plus inspiré par le Chevalier noir que par le Kryptonien, sa mise en scène étant davantage inspirée lors des séquences de Batman. Et si la fin offre quelques moments étonnants, c’est dommage que les producteurs n’aient pas osé aller jusqu’au bout…