La Plateforme (Galder Gaztelu-Urrutia, 2019)

Vers la fin des années 90 et jusqu’au terme des années 2000, un nouveau courant cinématographique espagnol nous avait livré des films de genre qui voulaient dépoussiérer les terres de Franco. On a eu Amenabar, Plaza, Balagueró, De la Iglesia, Bayona, Cerdà et d’autres encore, et il en est sorti des oeuvres comme La Secte sans Nom, Darkness, [Rec], Abandonnée, Le Jour de la Bête… Des auteurs et des films qui entendaient secouer le paysage cinématographique ibérique et proposer une alternative à Almodovar ^^

Cette nouvelle vague s’est peu à peu essoufflée, certains auteurs sont passés de manière permanente aux Etats-Unis (comme Bayona avec son sublime The Impossible et qui a depuis livré Jurassic Park : Fallen Kingdom et est actuellement à l’oeuvre sur la série The Lord of the Rings), et on repense de manière nostalgique à ces séances de découvertes au Festival de Gérardmer avec par exemple une salle bondée qui sursautait et criait à l’unisson à la première de [Rec] ! La donne a également évolué au niveau de la proposition des oeuvres, avec différentes plateformes proposant du contenu vidéo directement chez vous, comme celle qui nous intéresse aujourd’hui, Netflix. C’est en effet là-dessus qu’est disponible ce film, permettant à Galder Gaztelu-Urrutia de nous livrer son premier long métrage. Netflix piochant à travers les pays et les continents pour proposer des nouveautés attrayantes, elle pourrait permettre une émergence de nouveaux talents espagnols. Les succès de séries comme La Casa de Papel ou Elite ont peut-être ouvert la voie à de jeunes cinéastes surmotivés…

La Plateforme apparaît en tout cas comme une proposition bien intéressante, qui s’inscrit dans un système de narration de genre certes classique, mais est-ce pour mieux faire passer le wagon? On le saura d’ici quelques temps… La Plateforme est une variation sur un film que vous avez probablement déjà vu, le Cube de Vincenzo Natali. Il a un peu vieilli, notamment au niveau de la psychologie des personnages qui est tout de même relativement simpliste, et ça fait du bien de dépoussiérer ce genre très particulier et d’en tirer de nouvelles analyses! Un homme se réveille donc dans une pièce de béton, avec un autre homme situé en face de lui. Les seules ouvertures de cette pièce carrée sont situées au plafond et au sol, avec un passage permettant l’accès à une table amovible chargée de nourriture. Cette table provient d’étages supérieurs, s’arrête un moment à chaque étage, puis descend vers les niveaux inférieurs. Chaque personnage est ici pour une durée déterminée, et ils changent d’étage à chaque début de mois.

Voilà, vous savez tout ce que qu’il y a à savoir sur les éléments de départ du film! ^^ Tout le reste va donc être une variation à partir de cette base très mystérieuse, et le film va développer un récit de plus en tendu. Ivan Massagué (Le Labyrinthe de Pan, Les derniers Jours) joue Goreng, le personnage principal qui se réveille donc dans ce lieu qui a tout d’une prison, et qui va chercher à en comprendre les mécanismes. Cet homme calme et plutôt intellectuel va devoir remettre en question pas mal de certitudes au gré de son avancée et de ses rencontres… Car il va croiser d’autres personnages eux aussi enfermés, chacun ayant sa propre vision du lieu et de la manière d’en sortir.

J’avais vu Vivarium la semaine dernière, juste avant que les cinémas ne ferment ^^, et je trouvais l’argument sociologique et de critique sociale exagéré par les critiques. En comparaison, La Plateforme m’apparaît bien plus pertinent sur ces thématiques, en développant une vraie hiérarchisation sociale avec les différents niveaux existants. Les strates sociales sont très bien représentées, et renvoient aux nantis, à la classe moyenne et à la classe défavorisée, avec le seul élément de la nourriture. Car la nourriture est ici centrale, tant géographiquement que socialement. Le rythme des journées est donné par cette plateforme de victuailles qui descend afin de nourrir les personnes présentes à chaque niveau. Evidemment, la table se vide au fur et à mesure que la plateforme descend… Une allégorie très simple et d’autant plus efficace sur le pouvoir de ceux qui sont au-dessus, et qui ont accès à une table énorme remplie de dizaines de plats…

La démonstration va même flirter avec l’absurde vers la fin du film, mais le message est bien là, et en ces temps de confinement, on ressent d’autant mieux cette portée sociale étonnante et intéressante. Et encore une fois, contrairement à Vivarium qui reste assez en surface, La Plateforme n’hésite pas à user de violence et de situations glauques pour étayer son propos. Avec ce rythme assez rôdé, ça n’est pas aussi dérangeant que ça pourrait l’être, mais le récit à le mérite de poser un contexte immersif et de le traiter avec soin. La descente aux enfers de Goreng donne lieu à un film très bien écrit et d’une belle maîtrise, qui sans être un chef-d’oeuvre, s’inscrit dans une veine nerveuse qui fait plaisir sur le thème de l’homme est un loup pour l’homme!

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Le clip de la semaine : Pierre-Emmanuel Barré

J’avais déjà vu une ou deux vidéos de l’humoriste Pierre-Emmanuel Barré, mais son journal de bord du confinement est ultime !!! Chaque jour, il nous livre ses expériences et c’est à la fois très drôle et très corrosif! Un incontournable en cette période très étrange ^^ Je vous mets la toute première vidéo, et je vous invite à le suivre sur sa chaîne YouTube!

 

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Les news de la semaine : Didier Raoult

 

Cette semaine, on va laisser de côté les rares news ciné ou séries qui tombent parcimonieusement sur les sites spécialisés, puisque l’actualité est monopolisée par la crise sanitaire due au coronavirus Covid-19. En surfant sur Facebook, je suis tombé sur un partage de publication (merci Sébastien!) qui m’a particulièrement intéressé, et qui concernait le professeur Didier Raoult. J’ai passé une partie de la soirée d’hier à recouper les informations sur ce scientifique, qui a effectué une étude sur la maladie infectieuse touchant de nombreux pays actuellement. Loin d’être un spécialiste dans le domaine de la virologie, je me garderai d’apporter des conclusions sur lesquelles je n’ai pas la prétention de pouvoir trancher. Mais je tenais à partager ces différentes recherches avec vous, afin que chacun puisse se faire sa propre opinion. Pour ma part, et encore une fois en toute prudence, je me dis que la piste de la chloroquine semble être pertinente, et qu’il serait très intéressant de la tester davantage.

Je vous mets différents liens, vidéos et écrits. J’ai mis la dernière vidéo même si son titre est complètement naze avec sa seule volonté de choquer, car ce n’est pas le discours que le professeur fait dans cette vidéo justement. S’il y a un souci de lecture des vidéos, appuyez sur « play » puis sur « YouTube » juste en bas à droite de la vidéo, ça fonctionnera directement sur YT.

 

https://blogs.mediapart.fr/lenous/blog/200320/fin-de-partie-pour-le-covid-le-pr-raoult-et-la-chloroquine?utm_source=facebook&utm_medium=social&utm_campaign=Sharing&xtor=CS3-66&fbclid=IwAR1MbhFjgMy9_fSK075M4Di4mIQ4okd0zhu3XXKsVtFMWYz2ec7nE-y-Z60

 

https://www.marianne.net/societe/la-chloroquine-guerit-le-covid-19-didier-raoult-l-infectiologue-qui-aurait-le-remede-au

 

https://fr.wikipedia.org/wiki/Didier_Raoult

 

http://www.leparisien.fr/societe/coronavirus-et-chloroquine-les-essais-vont-etre-reproduits-a-grande-echelle-21-03-2020-8285217.php

 

https://www.franceinter.fr/societe/coronavirus-non-la-chloroquine-n-a-jamais-ete-interdite-par-agnes-buzyn

https://www.linternaute.com/actualite/guide-vie-quotidienne/2489467-chloroquine-et-plaquenil-un-espoir-de-guerison-face-au-coronavirus/

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Entre deux Mondes (Olivier Norek, 2018)

Olivier Norek est un auteur français spécialisé dans le polar, à qui l’on doit une série de romans centrés sur le capitaine Coste : Code 93, Territoires et Surtensions. Avec Entre deux Mondes, il laisse temporairement son personnage fétiche de côté pour nous embarquer dans une réalité qui a eu lieu officiellement du début des années 2000 à 2016, mais qui perdure toutefois encore aujourd’hui. En lisant la 4ème de couverture, j’ai été interpellé par cette accroche mystérieuse : « Adam a découvert en France un endroit où l’on peut tuer sans conséquences. » Je me suis donc laissé tenté et j’ai voulu connaître cet endroit hors normes pourtant situé sur notre territoire. Comment un lieu en France pourrait-il permettre de telles exactions sans que la justice tente d’arrêter les auteurs de meurtres?

La réponse est à la fois simple et pas si évidente : cela se déroule dans la Jungle de Calais. On a tous entendu parler des migrants qui se réunissaient dans ce camp avec pour seul espoir le passage vers l’Angleterre. Calais étant le point le plus proche du Royaume-Uni, la ville a cristallisé tous les rêves de liberté de milliers de réfugiés, venus en famille ou morcelés, avec des membres encore restés au pays. Fuyant les guerres ou les dictatures, les étrangers qui arrivaient en France provenaient d’Afghanistan, de Syrie, d’Irak, d’Erythrée… La Jungle a « accueilli » des milliers d’habitants, avec un pic de population à presque 10 000 personnes! Sachant qu’elle est établie sur une superficie de 4  km carré, on arrivait à une densité moyenne de 2250 personnes par kilomètres carré en 2016…

Olivier Norek, qui a été bénévole à Pharmaciens sans Frontières, a une expérience de l’intérieur de ce que peuvent vivre les réfugiés (c’était avant la Jungle, notamment avec des personnes venant d’ex-Yougoslavie). Il est ensuite entré dans la police, où il est devenu lieutenant. Il s’est donc naturellement orienté vers le polar dans ses écrits, et a donc choisi également de traiter de ce sujet explosif qu’était (est!) la Jungle… Car aujourd’hui, il y a encore 2000 personnes présentes… Le style très précis et direct de Norek colle parfaitement à ces évocations multiples d’existences qui vont s’entrecroiser, et la brutalité du propos est relayée par une plume brute et incisive.

On va suivre cette femme et sa fille en fuite traversant la Méditerranée pour rejoindre l’Angleterre, ce flic Syrien qui n’en peut plus de voir les atrocités perpétrées au nom de Bachar Al-Assad, un flic français qui débarque à Calais et qui va découvrir une réalité à peine crédible… On va avoir plusieurs points de vue sur cet état de fait, ce centre névralgique concentrant tous les espoirs et toutes les frustrations de gens déracinés, et qui n’ont plus grand-chose à quoi se raccrocher… Sous cette surface rugueuse se cache une vision humaniste, qui est certes terriblement bousculée par ce qu’elle découvre, mais qui décide coûte que coûte d’exister encore. Olivier Norek nous embarque dans un récit qui fait mal, et on se prend de bons uppercuts dans la face.

Mais c’est justement cette capacité à adopter un ton neutre et percutant qui permet de montrer la déshumanisation des gens vivant dans ce camp. C’est du direct dans la face, et ça ouvre les consciences de manière tranchante… Et surtout, l’auteur ne fait pas dans le pathos, et nous embarque dans des scènes qui vont susciter de l’émotion là aussi de manière brute. Je ne dévoilerai pas grand-chose du récit, car il sera d’autant plus prenant si vous vous y aventurez, mais l’auteur sait comment se nourrir du réel pour que sa fiction soit aussi réaliste que possible. D’ailleurs, il le dit dès l’entame du roman « Face à la violence de la réalité, je n’ai pas osé inventer. Seule l’enquête de police, basée sur des faits réels, a été romancée. » Ca fait d’autant plus froid dans le dos…

Olivier Norek va adopter le point de vue des migrants vivants dans le camp, mais aussi celui des flics chargés de contenir les tensions du camp… On a des gens qui ne cherchent qu’à s’en sortir, d’autres qui veulent faire le mal, certains usant de violences pour parvenir à gagner l’Angleterre, et le problème de cette Jungle s’avère relativement complexe. Les routiers sont pris d’assaut par certains migrants, les migrants se battent entre eux, les flics tentent de contenir cette marmite bouillonnante avec violence aussi… Le fait d’avoir plusieurs sons de cloche, avec des migrants à bout et des flics qui n’en peuvent plus non plus, montre à quel point cette situation cauchemardesque affecte tout le monde… Et dans ce microcosme, une économie locale, des gens qui s’entraident, et toujours cet espoir ténu qui tente de perdurer…

Entre deux Mondes prend réellement aux tripes, nous faisant découvrir un monde que l’on ne peut pas connaître si on ne fait pas partie des autorités ou d’organisations humanitaires, et ce roman est une descente captivante et terrifiante dans une réalité que l’on peut difficilement concevoir… Norek a justement ce don de nous y embarquer totalement, et de passer de l’horreur à l’espoir, cheminant entre les différentes existences évoquées qui vont se battre chacune à sa manière, avec les armes dont elle dispose, et avec la force intérieure qu’elle conserve. Il y a dans ce roman une humanité poignante face à une réalité désarmante, et Entre deux Mondes mérite vraiment d’être découvert!

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Le clip de la semaine : Trezïa – Dark Art

J’ai découvert très récemment le groupe mulhousien Trezïa, composé de 5 membres venant d’univers très différents, permettant de donner une vraie richesse à leurs compos! Hugo à la gratte électrique, Izïa au chant et à la guitare, Arthur à la basse, Guillaume au clavier, et Dany à la batterie. Ca nous donne un blues rock bien énergique et de belles évolutions musicales, comme en atteste ce très bon Dark Art! Je vous invite à aller les découvrir sur Facebook, ça vaut le coup d’oreille! 🙂

 

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