Le Philosophe qui n’était pas sage (Laurent Gounelle, 2012)

3ème bouquin de l’auteur en 3 ans (il a publié L’Homme qui voulait être heureux en 2010 et Les Dieux voyagent toujours incognito en 2012), Le Philosophe qui n’était pas sage poursuit son exploration de l’âme humaine à travers des personnages en pleine crise existentielle, faisant face à une remise profonde de leur mode de vie. Spécialiste en sciences humaines et vouant une affection particulière à la psychologie ainsi qu’au domaine philosophique, Laurent Gounelle nous livre à chaque roman un récit initiatique qui bouleversera fondamentalement ses personnages.

Ici, le dépaysement sera également géographique puisque le personnage principal quitte son univers new-yorkais feutré pour le couvert étouffant de la jungle amazonienne, dans une quête vengeresse afin de soulager son désespoir. Sandro est prof de philosophie, et sa femme est décédée dans des circonstances mystérieuses alors qu’elle effectuait un reportage sur une tribu amazonienne pour le compte d’un journal. Tenant la tribu pour responsable, Sandro met en place un plan bien tordu afin de leur faire payer…

Laurent Gounelle nous livre un nouveau roman philosophique étant encore une fois une subtile critique de notre société en confrontant le groupe d’Occidentaux et les membres de la tribu indienne, dont les modes de vie sont diamétralement opposés. La découverte de ces habitants de la forêt amazonienne apporte une grande fraicheur, les Indiens faisant preuve d’un entrain et d’un sens de la réalité d’une grande justesse et d’une grande simplicité. Forcément, la complexité permanente des Occidentaux en prend un coup, et tout le vernis superficiel de ces derniers ne tient pas face à la vision limpide des Amazones.

Gounelle nous donne un récit qui prend la forme d’une parabole, opposant ces 2 types d’existence en prenant bien soin de démontrer à quel point notre société moderne se trouve engluée dans des circonvolutions inutiles. En pénétrant dans cette immensité verte si éloignée des rumeurs urbaines de New York, Laurent Gounelle déstabilise totalement le personnage de Sandro qui choisit de mener son plan machiavélique à distance, lui restant isolé dans sa hutte à l’écart des villageois afin de n’avoir aucun contact direct avec eux, et envoyant le groupe de Krakus et ses hommes faire son sale boulot. Sandro souhaite saper la confiance et le sens des valeurs des indiens, en leur offrant une vision individualiste du monde. La connexion permanente des indiens entre eux et avec la nature va se retrouver malmenée par les tentatives de Sandro, qui va créer de subtils pièges dans lesquels la tribu va commencer à tomber. Le premier essai consistera à réunir les indiens le soir pour un briefing dans lequel les messages transmis véhiculeront pour la plupart des points négatifs, afin de changer la vision que la tribu a de la nature. En évoquant les dangers permanents plutôt que la beauté des lieux, Sandro parvient à immiscer une certaine crainte dans le groupe, qu’il va cultiver par d’autres stratagèmes. La machine diabolique est lancée…

Le personnage de Sandro est en souffrance permanente, et a besoin de punir les coupables pour donner un semblant de sens à ce qui lui reste d’existence. Sa détermination vengeresse souligne surtout à quel point l’homme est au bout du rouleau, et à quel point il se perd dans cette souffrance… La nature même des plans qu’il élabore renvoie directement au déracinement du réel que l’on vit quotidiennement en Occident, à l’image de ce vidophore créé pour apaiser les esprits, et qui n’est finalement qu’une représentation de notre sacro-sainte télévision! Chaque piège nous met face à nos propres paradoxes, comme le choix de définir tel objet comme étant indispensable et luxueux, afin de créer un besoin impérieux chez les sauvages de l’obtenir… En passant la journée à réunir de quoi l’acheter, mais en n’étant toujours pas plus heureux après l’acquisition de l’objet en question…

3ème réussite pour Laurent Gounelle, qui traite toujours des mêmes sujets mais qui parvient à se renouveller à chaque bouquin, Le Philosophe qui n’était pas sage est une plongée captivante dans la jungle amazonienne et dans l’inconscient occidental!

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