Si Joe Penhall n’est pas spécialement connu (il a notamment rédigé le script de La Route), cela devrait logiquement évoluer suite à la diffusion de sa série Mindhunter, qui est à la fois un succès critique et public. Prenant place à la fin des années 70, elle raconte le quotidien de 2 agents du FBI travaillant au sein du département des sciences comportementales, et qui vont être à l’origine d’une étude innovante sur le comportement des auteurs de crimes violents. Basé sur le livre Mindhunter: dans la Tête d’un Profileur de Mark Olshaker et John E. Douglas, ce show en 10 épisodes va raconter la naissance du profilage et de la classification des tueurs, avec notamment l’apparition du terme de tueur en série.
Mindhunter nous présente Holden Ford et Bill Tench, le premier étant inspiré de l’agent John E. Douglas (qui a rédigé le bouquin cité plus haut), le second étant une transposition de l’agent Robert Ressler. Bill Tench gère les sciences comportementales, et va demander à Holden Ford de l’aider avec ses formations à travers le pays. C’est en travaillant ensemble que l’idée d’une sorte de cartographie des meurtriers commence à poindre… Si la série parle de tueurs psychopathes, elle reste relativement sobre visuellement, et on n’assistera pas aux crimes commis. L’intérêt de Mindhunter réside dans le fait de capturer ce qui se passe dans la tête de ces tueurs, en cherchant un sens, des raisons à leurs actes barbares. C’est pour cela que Ford et Tench vont entamer des interviews avec ces auteurs de crimes violents.
Un des personnages qui ressort vraiment de la série, c’est sans conteste Ed Kemper. Ce géant (2,06 m et 160 kilos) semble paradoxalement très doux, et l’acteur qui l’incarne possède à la fois le physique et le talent qui en font un double parfait. Cameron Britton (Stitchers) est à la fois flippant et intéressant, et on a envie de continuer à écouter ce personnage raconter sa vie. La vie d’Ed Kemper a été difficile, et entendre la version d’un tueur en série est très particulier. Cela n’excuse en rien les actes commis, mais donne une vision plus précise des raisons qui l’ont poussé à agir de cette manière. La performance de Cameron Britton est franchement impressionnante, surtout quand on la compare avec des extraits des vraies interviews de Kemper!
Jonathan Groff (Glee) campe l’agent Holden Ford avec un mélange de détermination et de fascination pour ces figures du mal, qui en fait un personnage complexe. Holt McCallany (Fight Club, Du Plomb dans la Tête, Jack Reacher: never go back) joue un Bill Tench plus âgé et plus posé, qui ne comprend pas toujours l’entrain de Ford. Il garde une certaine distance avec les sujets qu’il étudie, tandis que Ford semble vouloir s’immiscer dans leur cerveau afin de mieux les comprendre. Les deux personnages offrent deux points de vue différents, ce qui va forcément générer des conflits entre eux. Une 3ème personne va arriver pour coordonner leurs recherches, il s’agit de Wendy Carr, une consultante externe. L’Australienne Anna Torv (The secret Life of us, Fringe) va elle aussi la jouer de manière bien complexe, et va être un élément très important dans le développement de ces recherches comportementales.
Mindhunter bénéficie d’une exposition importante grâce à l’implication de David Fincher, qui est producteur exécutif, et qui met en scène les 2 premiers et les 2 derniers épisodes. L’auteur de Seven est à l’aise dans le monde des tueurs en série, et ce show possède des similarités avec son Zodiac. On sent le très grand travail de recherche qui a permis de le créer, et à chaque épisode, on ressent le poids de tous ces dossiers qui ont été consultés. Si Mindhunter ne fait pas dans le glauque en visualisant les crimes, son atmosphère n’en est pas moins forte, car entendre des tueurs raconter leurs exploits met finalement aussi mal à l’aise. C’est dans cette confrontation constante entre deux figures de la justice et ces criminels que réside une grande partie de l’intérêt de cette série, car ce sont des passages obligés pour pouvoir constituer une ébauche d’étude sur la criminalité. Là encore, on voit un Holden Ford bien plus enthousiaste que son partenaire Bill Tench, toujours soucieux de conserver une distance de sécurité mentale avec ces tueurs.
Mindhunter apparaît déjà comme un classique du genre, ses 10 épisodes bénéficiant d’un solide traitement visuel (Fincher n’y est pas pour rien évidemment!), et offrant des axes de développement très intéressants pour sa seconde saison. La reconstitution des années 70 est excellente, et précise jusque dans les moindres détails! Cette plongée dans les prémices de la psychologie criminelle est intense et d’une très grande intelligence, et Joe Penhall joue avec cette fascination pour le mal, qu’il tente de capturer grâce à Holden et Ford.