Tsunami mexicain (Joe R. Lansdale, 2001)

La publication des romans de Joe R. Lansdale est soumise à d’étranges lois, qui s’affranchissent des contraintes temporelles et logiques. Tsunami mexicain est le 7ème tome des aventures d’Hap Collins et Leonard Pine, mais il sort en poche après le 8ème, l’excellent Vanilla Ride. Pire, les 1er et 6ème bouquins ne sont jamais sortis par chez nous… Ces parutions hasardeuses ont au moins le mérite de créer de bonnes surprises, et c’est sans conviction que je jetais un oeil en librairie juste pour la forme, jusqu’à tomber sur ce Tsunami mexicain!

Le récit commence de manière presque déprimante, avec Hap et Leonard englués dans un train-train quotidien fait de boulot d’appoint et de relations sans saveur… Enfin je parle pour Hap, qui ne sait plus trop s’il est toujours avec son infirmière de charme Brett, Leonard ayant trouvé un compagnon idéal en la personne de John. Mais n’empêche, même dans l’écriture de Joe Lansdale, on sent moins de conviction sur le départ… Mais le bonhomme m’aura bien feinté finalement, car dès que les affaires (entendre les emmerdes) reprennent, il ressort sans prévenir sa plume acérée pour le plus grand bonheur de ses fans!

Si le boulot de vigile à l’usine de poulets est sans histoire, c’est tout autre chose le soir où Hap découvre une femme en train de se faire massacrer par un gars totalement déjanté. En grand chevalier servant qu’il est, il va secourir la demoiselle en détresse qui survivra grâce à lui, et va se retrouver à la clé avec un bonus de 100 000 dollars! L’occasion est inespérée pour les 2 compères de s’offrir un vrai voyage et de vraies vacances, et sur le conseil du petit ami John, ils s’embarquent pour une croisière tranquille… Bon, la tranquillité n’est jamais le maître mot avec Hap et Leonard, et ils ont vite fait de reprendre leurs bonnes vieilles habitudes, et se retrouvent coincés dans la ville de Playa del Carmen, embringués dans une histoire de cul (pour Hap) qui va virer au règlement de comptes avec la mafia locale… Après les bikers, le Ku Klux Klan, les flics ripoux et les truands de tous bords, il fallait bien qu’ils exploitent un peu les bas-fonds d’autres frontières!

Joe Lansdale nous convie à une aventure bien burnée comme il se plaît à les écrire, et l’on va assister à des scènes brutales emplies de sang et d’absurdité, comme avec ce mafieux nudiste qui se balade la bite à l’air, ce molosse gigantesque nommé Requin-Marteau (qui se balade aussi la bite à l’air), ce vieux qui manie la machette comme personne, ou encore les vieilles connaissances que sont Hanson, Veil et Jim Bob ou encore Bob le tatou! Du beau monde pour un dépaysement qui s’avèrera finalement tout aussi animé que leurs belles journées texanes!

Tsunami mexicain est dans la droite veine de la plume géniale de Lansdale, et on avale ce bouquin avec une aisance déconcertante tout en se fendant régulièrement la gueule au détour de ses pages. Qu’il s’agisse de l’évocation d’une charmante demoiselle: « La patronne, derrière le bar, se nommait Marlie; c’était une énorme gouine avec une coupe au carré et un corps de la taille et de la corpulence d’un lutteur de sumo ou, si vous préférez, d’une pomme de terre de cent cinquante kilos. Heureusement, elle ne s’habillait ni comme un lutteur de sumo ni comme une patate. »; d’un trajet en taxi: »Puis on se serra contre un autre taxi comme pour le provoquer en duel. On était assez proche pour dévisser le bouchon de son réservoir et lui refaire le plein d’essence. Mais, apparemment, ce n’était pas encore assez pour notre fou du volant. Il le colla tellement que si la vieille qui y étais assise avait descendu sa vitre, j’aurais pu lui rouler une pelle. »; ou de la description d’un bad guy: « Oh, mon Dieu! Ca doit être celui-là, votre Requin-Marteau. Doux Jésus! Tu lui mets une chaussette et une chaussure sur la bite, tu la caresses un peu, et il s’en servira de troisième jambe. »; Joe Lansdale parvient à chaque fois à trouver un langage sacrément imagé et une intonation du terroir bien sensible qui fait de ses phrases des modèles de prose pas forcément très châtiée! Et c’est du coup un véritable plaisir de suivre l’évolution de ce récit et de croiser tous ces personnages hauts en couleurs!

Tsunami mexicain est encore une fois un classique instantané de l’auteur, qui parvient à chaque fois à nous replonger dans une atmosphère familière tout en trouvant le moyen de nous offrir une certaine originalité dans son récit! La marque d’un grand, fier de ses origines texanes et à la gouaille imposante, que ne renierait pas Deadpool!!!

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