Si l’actrice Olivia Wilde est surtout connue pour sa participation à la série Dr House, elle s’est également tourné vers la mise en scène à partir de 2019 avec Booksmart, et revient aujourd’hui avec son second long, l’énigmatique Don’t worry Darling. Si Booksmart jouait la carte de la comédie sociale en suivant 2 étudiantes, Wilde bifurque avec son nouvel opus, qui va prendre des atours de thriller bien tendu. On sent une certaine maîtrise dans le propos et dans sa visualisation, et on se laisse embarquer avec plaisir dans cette quête de la perfection.
Le mythe de la communauté parfaite est un thème récurrent dans la littérature ou au cinéma, et Olivia Wilde apporte sa pierre à cet édifice de manière intéressante, avec une proposition de thriller certes pas inoubliable, mais qui parvient à jouer habilement avec le spectateur. Dans cette évocation de l’existence d’une classe sociale privilégiée durant les années 1950, Florence Pugh confirme une fois encore l’étendue de son talent, dans un rôle qui lui permet de puiser dans une belle gamme d’émotions. Alice est en couple avec Jack Chambers, et ils habitent dans une ville perdue en plein désert, sorte de havre de paix niché dans un recoin inhospitalier. Jack, comme tous les hommes de cette ville, travaille dans une entreprise sur un projet secret, et Alice, à l’instar des autres femmes, n’a aucune connaissance de la nature de son travail.
Mais la vie paisible et festive dans cette ville lui convient, et Olivia Wilde recrée avec beaucoup de soin le quotidien d’une femme des 50’s. Sous la lumière permanente du soleil, vivent des femmes épanouies et des hommes bien décidés à mener leur tâche à bien. Mais ce cadre idyllique semble masquer une réalité bien plus inquiétante, et lorsqu’une des résidentes commence à craquer, Alice va voir ce beau vernis s’effriter peu à peu, et va devoir répondre aux questions surgissant alors. Si on a effectivement déjà croisé ce type de récit à plusieurs reprises, Olivia Wilde se l’approprie avec conviction et use d’une mise en scène efficace pour nous plonger de plus en plus dans ce rêve américain qui s’étiole.
La visualisation du départ des hommes le matin est presque parodique, et démontre le cadre entièrement contrôlé dans lequel vivent ces couples. Wilde parvient à faire naître de la tension à partir de séquences pourtant basiques, comme lorsque Alice nettoie ses vitres. La réalisatrice nous fait vivre les sensations d’étouffement qui l’étreignent à plusieurs reprises, et le travail sur le son participe lui aussi activement à la création de cette tension. On sent le gouffre s’ouvrant de plus en plus sous les pieds d’Alice, et on se demande comment elle va pouvoir trouver les réponses aux éléments inquiétants venant perturber son quotidien millimétré.
Autour de l’excellente Florence Pugh, on a un Harry Styles lui aussi très bon dans le rôle du jeune mari motivé à réussir sa carrière, et un Chris Pine sachant jouer avec son égo dans le rôle de celui qui dirige la communauté. Olivia Wilde s’est octroyée le rôle d’une des amies d’Alice, et tout ce beau petit monde se retrouve sous un soleil écrasant, dans cette petite ville qui veut être le meilleur endroit pour vivre. L’aspect superficiel sera montré à plusieurs reprises, comme lors de cette scène où Alice cuisine tranquillement, et c’est justement la vision de ce vernis de bonheur s’effritant qui donne son sens à ce film. Les conventions sociales, la soif du pouvoir, l’envie de sécurité font que ces couples se sont retrouvé dans ce lieu isolé du reste du monde, dans un pacte silencieux dont les enjeux ne sont pas connus de tous.
Olivia Wilde emprunte à plusieurs oeuvres littéraires ou cinématographiques que je ne peux pas citer sous peine d’indiquer la direction du film, mais elle les utilise de manière efficace et intelligente, pour nous offrir un Don’t worry Darling qui est une proposition sympathique et maîtrisée.