Tape-Cul (Joe R. Lansdale, 1998)

5ème roman de la série Hap and Leonard (voir la checklist Joe . Lansdale), Tape-Cul concentre le meilleur de Joe R. Lansdale pour constituer ce qui est (pour l’instant) le meilleur bouquin de cette saga! Il m’en reste encore quelques-uns à relire, et je bouquine aussi entre-temps d’autres auteurs, mais ce Tape-Cul m’a franchement fait bien marrer et le concentré d’action s’avère encore plus percutant que dans les oeuvres précédentes de l’auteur texan! Dans Bad Chili, Hap rencontrait Brett, une superbe rousse avec qui il faisait quelques galipettes entre deux fracassages de mâchoires avec son pote Leonard. Le temps aidant, leur relation a évolué et les deux tourtereaux envisageraient même d’emménager ensemble… Mais avant cela, il faut que Brett règle un problème de taille, celui de sa fille toxico et prostituée, qui semble avoir vraiment besoin d’aide pour sortir de sa merde…

Bien évidemment, Hap ne peut pas répondre par la négative à la demande de Brett, et avec Leonard, ils vont composer un trio bien explosif qui s’en va aller bastonner du maquereau pour récupérer la gamine. Comme d’habitude chez Lansdale, on a un point de départ très série B, mais qui va être rapidement transcendé par l’originalité de son écriture et ce mélange d’humour et de poésie absurde inimitable! « Le lendemain matin, on descendit sans se presser la Highway 87, en direction de Lubbock, à travers un des territoires les plus désolés et les plus hideux de cette face de la lune. C’est le genre de paysage dans lequel on s’imagine qu’on va se péter la gueule. Chaque fois qu’on passait devant un arbre rabougri – ou plutôt un buisson, à vrai dire – j’avais envie de sauter de la voiture et de m’y accrocher de toutes mes forces pour éviter d’être aspiré dans une sorte de néant cosmique lovecraftien. »

Dans leur périple, Hap, Leonard et Brett vont rencontrer un ex-maquereau nain, un ancien biker devenu prêtre défroqué, et toute une galerie de personnages hauts en couleur comme les affectionne l’auteur. Et comme dans chacune de ses oeuvres, il croque ses protagonistes avec un style tranchant, vif et drôle qui fonctionne à chaque fois! « Même de loin, on se rendait compte qu’il était à peu près aussi propre et mignon qu’un tas fumant de merde chié par un chien malade. Il portait une salopette décolorée, à même la peau, et il crachait de temps en temps un jet brun dégueulasse – du tabac, espérais-je. » Tiens, d’ailleurs, ça me rappelle qu’ils vont aussi faire la connaissance d’un tatou, qui va devenir le meilleur ami de Leonard, après une séquence assez surréaliste!

Les bouquins de Joe R. Lansdale, ce sont des odes aux vieux polars, aux western et à la littérature pulp, avec des intrigues composées de bagarres régulières et de luttes d’egos entre mâles dominants. Mais sous ce vernis se cache d’autres sensibilités, à travers les personnalités d’Hap et Leonard bien évidemment. Hap est un Blanc hétéro et pacifiste, capable de tomber en pâmoison dès qu’une jolie donzelle se retrouve en difficulté, et Leonard est un Black homo adepte de la castagne, bien déterminé à envoyer chier ceux qui l’emmerdent. Les 2 potes ont des caractères diamétralement opposés, et pourtant ils sont indissociables et sont toujours présents l’un pour l’autre. Les dialogues qu’ils ont sont excellents, soulignant toujours leurs différences de point de vue et destinés à accorder leur violons, comme avant leur départ en mission. Leonard est une sorte de réaliste pragmatique, et il le fait bien comprendre à Hap en lui disant qu’il n’est qu’un pauvre naïf toujours trop pacifique. « A toi tout seul, t’as le coeur plus sensible que tous les démocrates du Congrès. Tu n’aimes pas les armes. A cause de Brett, dans cette histoire, tu vas à l’encontre de tout ce à quoi tu crois. Tu ne lui dois pas tant que ça. Moi, si je sais où se trouve un nid de vipères et que je peux l’écraser, j’estime que c’est mon devoir de le faire. Toi, j’imagine que tu nourriras ces foutus serpents, que tu essaieras de les élever, que tu paieras peut-être leurs études… Je ne suis pas en train de peser le pour et le contre du bien-fondé de ton attitude, là, je décris simplement ce que tu es et ce que tu devras affronter. »

Quand on plonge dans un roman de Lansdale, on a vraiment du mal à le lâcher avant la fin, et on y retourne très rapidement, parce qu’on se prend d’affection pour ses anti-héros qui malgré tout ont un profond sens de la justice. Péter des gueules pour améliorer le monde, ça va tout de même plus vite qu’en glissant une enveloppe dans une urne… Mais quand on s’attaque à la mafia locale, il vaut mieux s’armer jusqu’aux dents pour avoir une chance de s’en tirer… Encore un excellent ouvrage de la part du Texan donc, et si ce n’est pas encore fait, je vous invite à découvrir ses romans!!!

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