J’avais eu plusieurs retours positifs sur ce film d’Yvan Attal, qui promettait de nombreuses joutes verbales bien savoureuses. Camélia Jordana poursuit une belle reconversion, puisque après avoir été révélée par la Nouvelle Star en 2009, la chanteuse a commencé à tâter du cinéma en 2013. Elle a même remporté le César du meilleur espoir féminin pour son rôle dans Le Brio, ce qui est certainement mérité!
Yvan Attal n’en est plus à ses débuts, puisqu’il réalise ici son 5ème film, et ce qui frappe d’entrée de jeu, c’est l’aisance de sa mise en scène. Sa manière de filmer ses personnages est vraiment belle, et il les inscrit dans le cadre de l’école ou de la cité avec un réalisme et une touche de poésie qui s’alimentent l’un l’autre. La découverte de Neïla Salah sur fond de Marvin Gaye est vraiment classe, et Attal s’approprie l’atmosphère parisienne en faisant ressortir un vrai charme. Tout est aisance dans ce film, tant dans la mise en scène que dans la fluidité des dialogues, salves percutantes et imagées qui vont faire vaciller les esprits qui y sont confrontés, et qui paradoxalement vont permettre à Neïla, qui en est tout d’abord victime, de se réaliser.
Neïla est étudiante en droit, et cette future avocate va devoir développer sa maîtrise de la langue, de la diction, de l’intonation, et son charisme. La jeune banlieusarde est décrite avec réalisme et sans exagération, et on croit à ce parcours qui va la voir évoluer et gagner en confiance dans ce milieu difficile, où en plus elle est la cible privilégiée d’un vieux professeur acerbe et cynique. Daniel Auteuil est impeccable dans le rôle de cet homme qui se sent clairement supérieur aux autres, et qui accepte de faire don de ses talents et connaissances pour en léguer une partie à ses pauvres étudiants incultes. L’entrée en matière de son premier cours est juste énorme, et suscite des émois forts chez ses étudiants. Le professeur Pierre Mazard n’a pas sa langue dans sa poche, et il flirte constamment avec l’insulte et le racisme, tout en effectuant des pirouettes verbales pour éviter d’être taxé de raciste. Du coup, la première rencontre avec Neïla est plutôt explosive…
Les circonstances vont amener Mazard à coacher Leïla pour un concours d’éloquence, ce qui ne va pas se faire sans tensions. Là encore, les joutes verbales sont très savoureuses, et les dialogues finement ciselés par 5 scénaristes! Victor Saint Macary, Yaël Langmann, Yvan Attal, Noé Debré et Bryan Marciano sont crédités au scénario, et apportent des piques rafraîchissantes et incisives! Tout le film repose sur ces confrontations verbeuses, qui sont l’apanage des étudiants en droit, et que l’on peut voir à travers les différentes phases du concours d’éloquence. Mais c’est clairement le personnage de Daniel Auteuil qui ressort du lot avec ses diatribes tranchantes et toujours limites! Face à lui, Neïla va tenter de s’adapter, de ne pas se laisser pousser dans ses derniers retranchements, et d’apprendre à rétorquer avec classe et esprit.
Le Brio est vraiment un film prenant, avec ses 2 personnages opposés qui vont sans cesse se jauger, s’esquiver et d’une certaine manière s’apprécier. Mazard est l’archétype du vieux con, qui possède pourtant un savoir énorme et un sens de la répartie sans faille. Camélia Jordana interprète Neïla avec beaucoup de conviction, avec un sens de l’humour pétillant et une vraie fraîcheur! Elle parvient à tenir tête à ce vieux bougre, et son évolution est très intéressante à suivre. Et comme si ça ne suffisait pas, Yvan Attal parvient à nous intéresser aux personnages secondaires, en brossant des portraits attachants sans forcer le trait. Le Brio s’avère être une excellente surprise, et une très belle révélation pour cette actrice talentueuse!