Houdini (Nicholas Meyer, 2014)

Personnage aussi fascinant que méconnu, Harry Houdini est encore, presque 90 ans après sa mort, entouré d’un épais voile mystérieux. Illusionniste, cascadeur, performer, Harry Houdini a eu une vie très mouvementée qui mérite largement d’être adaptée et retranscrite sur écran! Mais à ce jour, seules quelques fictions se sont penchées sur l’existence de cet homme hors norme. La plus connue est le film de George Marshall datant de 1953, Houdini le grand Magicien, avec Tony Curtis dans le rôle-titre; Paul Michael Glaser (Starsky dans Starsky et Hutch) l’a incarné dans un téléfilm de 1976, The great Houdini; en 1996, un documentaire nommé Houdini sort sur grand écran et retrace l’existence du magicien avec des images d’archives; Harvey Keitel endosse le rôle dans Le Mystère des Fées – une Histoire vraie en 1997; Jonathan Schaech s’est aussi épris du personnage dans le téléfilm Houdini de 1998; le film expérimental Cremaster 2 (1999) voit également une transposition de  l’illusionniste; et Guy Pearce se métamorphose aussi dans le film Au-delà de l’Illusion. Mais seule une poignée de ces quelques adaptations se sont intéressées à l’ensemble de la vie de cet être si singulier. Nicholas Meyer répare cette injustice avec sa mini-série en 2 épisodes Houdini, qui fait appel à Adrien Brody pour prendre les traits du maître de l’illusion!

La vie, l’histoire et la personnalité d’Harry Houdini sont fascinantes, d’autant plus que de nombreuses zones d’ombres persistent encore. Avec la complicité du metteur en scène allemand Uli Edel (qui aime l’histoire puisqu’il a réalisé des téléfilms historiques comme Mike Tyson, l’Histoire de sa Vie, Rasputin, Jules César, et dans un autre genre le film Body avec Madonna!), il va insuffler un rythme très moderne à cette relecture de la vie du personnage, et va en faire une sorte de héros dont l’intelligence et les prouesses physiques vont mener de la pauvreté à la reconnaissance internationale.

Dès le début du premier épisode, on est projeté sur un pont duquel Houdini s’apprête à sauter, afin de plonger 15 mètres plus bas à travers un trou dans la glace! Le tout enchaîné bien sûr, et il devra se défaire de ses liens dans cette eau extrêmement froide et remonter à la surface le plus rapidement possible afin de ne pas mourir noyé! L’ambition du personnage est démontrée d’entrée de jeu avec cette performance impressionnante, et on va entrer de plein fouet dans ce biopic palpitant et étonnant! Meyer et Edel foncent à 100 à l’heure pour évoquer la vie de ce maître, et vont passer d’une époque à l’autre afin de comprendre le cheminement qui l’a emmené de Budapest aux quartiers pauvres d’Appletown dans le Wisconsin, puis à New York, et jusqu’aux plus grandes villes du monde dès lors que sa réputation de prestidigitateur le lui a permis.

Nicholas Meyer a rédigé un script prenant, qui s’appuie sur le livre de son propre père, le psychanalyste Bernard C. Meyer, lequel a consacré un livre au magicien en 1976 intitulé Houdini: a Mind in Chains – a psychanalytic Portrait. Il y a donc un solide travail de recherche effectué sur plusieurs générations, qui permet à la série Houdini de s’appuyer sur des faits concrets, tout en se permettant d’enrober la réalité par moments. Ainsi, Meyer développe un aspect méconnu d’Houdini, qui aurait été un espion pour le gouvernement américain lors de ses différentes incursions en Europe et en Russie. Ce parti-pris permet de rajouter un élément politique intéressant, avec une implication directe dans la course pour empêcher la 1ère guerre mondiale. Cela ajoute évidemment du suspense, avec des moments certes fictionnels, mais qui intensifient l’aspect héroïque du personnage.

Mais au-delà de ces aspects qui déplairont forcément aux adeptes de la vérité pure, Houdini est un vrai grand spectacle qui met en avant l’univers trop rarement exploité de la magie. On y suit Adrien Brody qui s’essaie aux tours les plus connus du maître (la fameuse cellule de torture chinoise, la disparition de l’éléphant) et qui, au travers de son talentueux jeu d’acteur, donne à Houdini toute sa prestance mâtinée d’un soupçon de suffisance. Sûr de lui et constamment soucieux de plaire à son public, il cherche à chaque fois à perfectionner ses tours et à créer des illusions qui laisseront le spectateur béat. Et comme on est très proche du personnage, on va même découvrir les techniques se cachant derrière certains tours, ce qui permet de démontrer toute l’ingéniosité du personnage, tout en se disant parfois que la réalité est tellement simple, notamment pour le coup du passage à travers le mur par exemple!

Houdini s’attache à dépeindre les interactions avec ses proches évidemment, notamment sa mère avec qui il était très lié. Cette relation fusionnelle embarrassera souvent sa femme Bess, qui est régulièrement reléguée au second rang. Pour Houdini, sa mère a toujours été celle qui a indéfectiblement cru en lui, et sa mort n’en sera que plus douloureuse. Suite à ce drame, il va s’intéresser au monde du spiritisme, afin de tenter d’entrer en contact avec l’esprit défunt de sa mère. En homme méticuleux qu’il était, il va constamment tenter de déterminer la nature réelle des dons proclamés par les voyants et extralucides qu’il va rencontrer, et il va commencer à mener une chasse aux malfaiteurs dans ce domaine, qui va l’occuper une bonne partie de son existence.

On va croiser des figures célèbres comme Raspoutine ou Arthur Conan Doyle, et Houdini est une excellente plongée dans la fin du 19ème-début du 20ème siècle, traitée avec un vrai soin visuel, et un habillage sonore des plus réussis signé John Debney. Kristen Connolly campe une Bess à la fois fougueuse et résignée, Evan Jones joue le très enthousiaste meilleur ami, et le reste du casting permet également à cette série de donner un aperçu véritablement captivant de la vie de cet illustre personnage, avec bien évidemment une mention particulière à Adrien Brody, qui permet d’en faire une figure véritablement attachante malgré les aspects moins sympathiques de sa personnalité!

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