Le tout nouveau Testament (Jaco Van Dormael, 2015)

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Jaco Van Dormael est un cinéaste à part. Après un documentaire sorti en 1981, Stade 81, il réalise 10 ans plus tard sa première oeuvre de fiction, Toto le Héros, qui convoque déjà un imaginaire très prononcé. En 1996, avec Le huitième Jour, il s’intéresse à la rencontre improbable et poétique entre un homme d’affaires et un autiste. Et en 2009, il entraîne Jared Leto dans une fable ésotérico-poétique sur le sens de la vie avec Mr. Nobody. Le tout nouveau Testament semblait l’amener dans un domaine bien plus populaire, la comédie, sans toutefois oublier les ingrédients absurdes qu’il affectionne tant.

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Les bande-annonces sont souvent trompeuses, je ne vous apprend rien. En découvrant celle de ce film, j’ai été immédiatement séduit par l’humour bien barré du réalisateur, et je m’attendais comme beaucoup à une comédie hilarante. Mais Le tout nouveau Testament n’est pas une comédie pure, et va apporter des moments d’émotions et dramatiques que l’on n’attendait pas vraiment pour le coup. On est donc forcément déçu par cette publicité mensongère, mais passé ce cap, on découvre un film s’inscrivant en toute logique dans la lignée de la filmographie de Jaco Van Dormael. Le mélange d’absurde, de poésie, de légèreté et de gravité fait de ce film une nouvelle pièce caractéristique du cinéma si particulier du metteur en scène belge.

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Le point de départ détonnant du film, qui voit la fille de Dieu balancer les dates de décès de chaque être humain à travers leurs téléphones portables, est un concept juste génial, surtout quand on voit quel vieux aigri et mauvais est ce Dieu. Le scénario de Van Dormael et Thomas Guntzig (qui a travaillé avec le réalisateur sur le spectacle Kiss & cry) propose une relecture osée et totalement absurde du principe même de Dieu et de sa Création. L’idée est réellement originale, et va donner lieu à des séquences baignant dans un mélange d’humour et de poésie bienvenus. Mais on va rapidement glisser vers un registre plus sombre, que l’on ne pensait pas trouver dans ce film. Dieu n’est franchement pas tendre avec sa fille, qui va décider de fuguer et d’aller voir sur Terre comment ça se passe.

Le tout nouveau testament

Benoît Poelvoorde est excellent dans le rôle de ce Dieu méchant comme la peste, vaniteux et exécrable. Son comique très visuel en fait un personnage très drôle, à qui il va arriver bien des malheurs depuis que sa fille a touché à son ordinateur. Sa fille, qui est jouée par Pili Groyne, aperçue dans Alléluia, et qui est très douée! On a encore François Damiens et Yolande Moreau, ce qui renforce l’idée de départ d’un film très drôle. Catherine Deneuve vient compléter le casting par sa présence, même si son segment n’est pas des plus intéressants. Le film va en effet être divisé en plusieurs chapitres, qui vont voir Ea, la fille de Dieu, partir à la recherche de ses apôtres, et découvrir le monde. Il y a une vision rafraîchissante de ce qui nous entoure, thématique si chère à Van Dormael depuis des décennies. Chacun de ces films va nous donner à réfléchir sur notre propre existence, notre propre conception de la vie, et surtout sur les changements que nous pourrions y apporter. Le tout nouveau Testament se situe dans une continuité cinématographique évidente, et les amateurs ne seront certainement pas déçus.

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Van Dormael va traiter de sujets aussi variés que les rêves d’enfants face à la réalité du monde adulte, la musique, la différence physique, le sexe, l’amour, l’univers, en passant d’un élément à l’autre sans problème, tout comme il le faisait déjà dans Mr. Nobody. Jaco Van Dormael est un cinéaste traitant des liens universaux, toujours à la recherche des enchaînements d’éléments, qu’ils soient temporels ou physiques, jouant avec les événements de manière poétique (la séquence de l’oiseau) ou humoristique (les séquences avec Kevin!). Il y a derrière ses films une volonté de capter une certaine logique, une essence derrière l’écran qui nous donnerait la force de continuer, un sens dans lequel aller finalement. Le sens de l’existence, démontré d’une belle manière, au gré d’un film qui paraît discontinu, mais bouillonnant d’idées, avec des références subtiles à d’autres films (ShiningLéon, Le Mépris…).

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Le tout nouveau Testament n’est pas la comédie délirante que l’on était en droit d’attendre au vu de sa bande-annonce, mais il est une fable drôle et touchante sur la vie et sur les travers de l’être humain. Sans être aussi novateur et fort que ce que l’on pouvait espérer, il nous plonge dans une extension de l’univers familier du réalisateur belge. Certains seront déboussolés, d’autres ravis, et d’autres comme moi apprécieront simplement ce dépaysement pas aussi drôle que prévu, mais assez bien fait pour qu’on le suive tranquillement.

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2 réponses à Le tout nouveau Testament (Jaco Van Dormael, 2015)

  1. Sonia dit :

    Décidément ces Belges sont gentiment barrés et ta critique me donne envie de le voir pour passer un moment décalé et métaphysique….Poelvoorde fait partie de ces acteurs irremplaçables et je ne vois aucun autre pour porter un tel film du coup !

  2. Wade Wilson dit :

    C’est du Van Dormael pur jus, si tu as apprécié ses autres films, tu ne pourras qu’adhérer à celui-ci! ^^

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