Un Justicier dans la Ville (Michael Winner, 1974)

C’est en 1974 que Michael Winner va imposer les bases du vigilante movie avec cette adaptation d’un roman de Brian Garfield mettant en scène un homme décidant de prendre les armes après l’agression de sa femme et de sa fille. Rôle emblématique dans la carrière de Charles Bronson, qui incarnera Paul Kersey dans pas moins de 5 films!

Un Justicier dans la Ville s’inscrit parfaitement dans la veine paranoïaque des années 70 avec sa flambée de violence, n’hésitant pas à aller à contre-courant d’une politique libérale pour pointer du doigt les lacunes du système judiciaire et l’augmentation de la délinquance. Le portrait dressé par Winner (et Garfield) est celui d’une société gangrenée par la drogue et la criminalité, allant jusqu’à atteindre des individus censés être à l’abri de ce genre de problèmes. Mais Paul Kersey va découvrir à ses dépens que la misère des bas-fonds peut avoir des répercussions sur sa propre existence, et celle de ses proches…


L’architecte soucieux de trouver des logements décents pour chaque catégorie de la population va se retrouver marqué à vie, et va voir ses penchants utopistes changer radicalement. Confronté à la mort de sa femme et au viol de sa fille, il va entamer une vendetta et se transformer peu à peu en l’opposé de ce qu’il était et représentait jusque-là. Il va découvrir que si la police ne peut découvrir les coupables, il peut très bien essayer de faire justice lui-même. La descente de Paul Kersey est entamée…

L’intelligence du film est de suivre la progression de Kersey avec beaucoup de réalisme, celui-ci ne décidant pas du jour au lendemain de mener une action radicale, mais étant amené presque malgré lui à devenir un justicier. Le premier meurtre le laisse dans un état lamentable, tant il est choqué par l’acte qu’il vient de commettre. Mais le premier sang a été versé, et Paul Kersey a franchi la limite, le retour en arrière est impossible. Il va passer petit à petit du bureaucrate consciencieux au vengeur solitaire, aidé par une mise en scène très sobre de Michael Winner qui ne tient pas à juger ses actes. On suit la métamorphose d’un homme meurtri, qui va trouver dans cette mission de justicier une raison de continuer à vivre. Il est intéressant de faire le parallèle avec le personnage du Punisher créé la même année par Gerry Conway, Ross Andru et John Romita, Sr., qui est inspiré directement de Paul Kersey!

Charles Bronson incarne cet anti-héros avec sobriété et force; Kersey n’est pas un surhomme, et apparaît plutôt comme un individu lambda. C’est ce caractère anonyme qui va lui permettre de ne pas attirer l’attention, les criminels ne se méfiant pas de ce petit homme à l’allure anodine. Parallèlement aux bandits, la police va tenter de percer l’identité de ce justicier qui leur échappe sans cesse. A ce titre, il faut noter la savoureuse composition de Vincent Gardenia dans le rôle du détective Frank Ochoa, qui cache sous sa rudesse une vision nettement moins tranchée que celle des autres flics. Il est un personnage presque entre deux eaux, et gagne justement en intensité par cet aspect ambivalent.

On notera la présence de l’excellent Jeff Goldblum dans son tout premier rôle! Il joue un des agresseurs de la femme et de la fille de Kersey, et parvient à faire ressortir tout le dégoût que l’on peut avoir pour un tel personnage! Denzel Washington commence lui aussi sa carrière dans ce film, avec un rôle figuratif!

Sévèrement critiqué à sa sortie pour son côté réactionnaire (tout comme L’Inspecteur Harry en 1971), Un Justicier dans la Ville a acquis au fil du temps une réputation non usurpée, le film n’étant pas un pamphlet gratuit mais une vision désabusée du déclin de la société, et de la lutte d’un homme pour tenter d’endiguer cette décadence. Le film prône l’autodéfense, ce qui est très compréhensible au vu de l’épreuve traversée par Paul Kersey, qui va appliquer la loi du Talion dans une époque marquée par la violence. Un Justicier dans la Ville va donc marquer durablement son époque, et va lancer un genre à lui tout seul. Le vigilante movie est né, et il aura toujours une dette envers Kersey/ Bronson…

Ce contenu a été publié dans 70's, Cinéma. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *